Encore une fois point de soleil pour la vampire, point de crépuscule ni de doux rayons qui vous réchauffent le corps et le cœur. Non, une froide et éternelle nuit, des ténèbres constantes et grandissantes qui emplissaient lentement l'âme des enfants de la nuit. Depuis quelques temps la jeune Ceinwyn avait renoncé à repousser la noirceur de sa condition. Peu désireuse de croiser Armand, d'anciens camarades ou anciens professeurs, elle n'osait plus remettre les pieds dans la cité, aussi devait elle se nourrir des jeunes fous s'aventurant dans la forêt. Malgré les interdictions et les mises en garde, il y en avait beaucoup plus qu'on ne pourrait le penser. D'ailleurs, cette nuit encore une jeune fille était passée entre ses bras. Elle l'avait serré contre sa poitrine, enlacé sa taille avec douceur, caressé son visage et prit sa vie avec la même délicatesse.

Elle avait laissé tomber le corps deja froid dans l'herbe humide sans lui prêter attention, toute à son plaisir personnel et s'offrant sans retenue à la joie de se sentir "vivante". Étrangement, elle sentait légèrement qu'un vent froid tourbillonnait autours d'elle, cinglant ses chairs. Le sang chaud emplissant ses veines lui permettait de sentir son corps se refroidir au contact de l'air et encore mieux, de sentir la morsure du froid. Elle se mordilla les lèvres...

*Délicieux...*

Elle marcha sous les arbres, caressant distraitement du bouts des doigts la dague qu'Il lui avait offerte, suivant délicatement les courbes du petit pommeau. Pendue à sa ceinture, elle reposait dans un simple fourreau de cuir beige, "emprunté" à un voyageur qui avait mal finit... Elle repensa à cet être agaçant, lâche et imbue de lui même et manqua de laisser échapper un murmure

*Raziel...*

Elle secoua la tête émergeant de sa rêverie. Voila à peine quinze minutes qu'elle marchait et déjà plus rien. Plus de froid, plus de sensation sur sa peau. Le sang qu'elle avait pris sur la fille ne réchauffait plus son corps. Elle était de nouveau belle et bien morte. Un sourire narquois éclaira son visage. Un jour, s'accommoderait elle aussi bien de sa condition de vampire que le félistia? Sans doute... Elle continua de laisser ses pas la mener ou bon leur sembler, replongeant en elle même. Laissant ses réflexions gouverner tout son être, elle n'était rien d'autre qu'une petite chose fragile et naïve. Vivante, elle ne se serait jamais laissé à tant de faiblesse.

Mais la mort vous change n'est ce pas? Surtout lorsque vous vous relever pour comprendre qu'il allait falloir chasser et tuer pour survivre. Elle repensa à Elament et à ses protecteurs, comme Armand, puis aux démons et aux membres qui composaient leur armée, comme Raziel. Les vampires étaient partout. Mais elle, elle se sentait entre les deux, ne se souciant guère des guerres meurtrières qui pouvaient opposer ses deux camps. Après tout il lui suffisait d'attendre, de les regarder dépérir, se dessécher et tomber en cendre, de se protéger, se faire discrète et elle leur survivrait. Mais tout cela, pour quoi faire?...

Le calme de la forêt la fit sursauter, elle maudit son côté lunatique et se concentra sur son environnement. Elle sentait une présence, quelqu'un était très proche, de plus, elle n'avait pas était discrète, pas le moins du monde d'ailleurs. Sa respiration n'avait put la trahir puisque inexistante, il en était de même pour les battements de son cœur. Simplement, laissant ses pieds la guider, elle avait marcher de la façon la plus "humaine" possible, autrement dit, un simple villageois n'aurait pas fait plus de bruit. Elle regarda de droite à gauche plusieurs fois avant de penser à (enfin) lever la tête.

Un peu plus loin une silhouette sur une branche... Elle se maudit, elle et sa négligence, espérant ne pas s'être mise dans une situation désespéré. Dans le cas contraire, il allait lui falloir laisser ses jolis plans de survies de côtés et ça ne lui disait rien. Elle se figea légèrement, en attente d'une quelconque réaction, inquiète...

Ez3kiel - Barb4ry - 3ème vidéo

Une présence se fit entendre, trop bruyante pour un lieu aussi silencieux. Les longues oreilles sensibles de l'elfe noir ne purent s'empêcher de capter le bruit de ses pas et toute l'insouciance de la scène se déroba, comme un nuage qui devenait pluie pour nous faire chuter au sol sur lequel il devait rester désormais, clouer par sa propre conscience et ses mécanismes de chasseur, tourné vers ce que sa vision par les cinq sens pouvaient repérer. Il fut un temps où cela l'aurait brusquement réveillé de ses songes, mais avec le temps, il avait compris instinctivement la différence entre menace et ce qui ne l'était pas.

Il redressa son buste, sous l'impulsion de son dos contre l'arbre. Ses yeux s'abaissèrent vers la forêt et en tournant le cou, le sol s'offrit à son regard. Sous la lumière des étoiles, il ne put qu'apercevoir une sombre silhouette, regard peu enclin à apporter d'autres informations, de là où il se trouvait. Mais ses pupilles ne le trahissaient pas, elle semblait légèrement terrifiée et pointait son regard vers lui. Plus ses yeux s'accommodaient de l'obscurité sous les cimes des arbres, plus il eut la confirmation d'une femme plutôt maigre. Ce n'était pas un démon et encore moins une menace pour lui. Il en sourit, un sourire paisible comme un soulagement. Ce n'était ni l'heure de la chasse, ni l'heure des hostilités, peut-être celle d'une rencontre.

"BONSOIR!" s'exclama-t-il d'une voie grave et forte dépourvue de violence.

Il encercla de ses mains, la base de la branche sur laquelle il s'était assis, l'eau se forma de ses poignées à ses phalanges et le froid naquit de sa paume, pour la geler. Puis il mordilla son pouce gauche pour en sortir un fil d'eau comme il en avait l'habitude depuis des mois d'escalades et de sauts d'arbre en arbre. Il fixa l'extrémité à la manche de glace et enroula le fil autours de sa main comme une bobine avec rapidité, puis il se laissa pencher vers le sol, s'arrêtant à quelques mètres du tas de feuilles qui jonchait la terre dans cette saison d'automne. Son don lâcha son emprise sur l'eau qu'il avait créé, et l'eau s'éparpilla en vapeur.

Désormais plus proche de cette jeune femme, il comprit rapidement à force d'en voir, que c'était une vampire par le manque de chaleur et de palpitation sanguine qui s'en dégageait. L'elfe noir avait pitié de cette race, sujet à l'appel du sang et la nécessité d'y répondre, enfermé dans la nuit, dans l'ombre de toute chose, plus apte que les autres à accepter la proposition des démons ou de se former en famille pour "survivre". Les vampires représentaient tout ce qui était facile à corrompre, à manipuler. Et cela se rependait parmi les êtres humains comme la peste, par une simple ponction bien contrôlée. Triste état que voilà, la raison pour laquelle malgré les capacités hors du commun que ceux-ci pouvaient déployer. Et puis sa condition physique lui suffisait amplement et la vampirisation, même avec les inconvénients, constituait pour lui une sorte de triche. Par ailleurs, son métier ne lui permettait pas de ne vivre que la nuit ou profiter du mauvais temps.

Certains personnes auraient fui en voyant un vampire mais il éprouvait plus de la pitié de leur état. Peut-être était-ce son expérience avec une vampire ou son assurance par rapport à sa force qui lui permettait de prendre de la distance par rapport à la "dangerosité" d'une telle race. Et puis, bien que cela lui paraît lointain, d'un autre temps, l'elfe noir avait été un démon ravagé par le désir frénétique de sang. Il comprenait ce besoin à assouvir, cette nécessité, qui rendait nerveux dès l'instant où l'on était seul, jusqu'au désespoir. Pour les vampires, surtout les jeunes, les infants comme disent les Familles, c'était le désespoir de la mort qui envahit peu à peu la chair au fil que le temps passait et que les aiguilles trottaient dans la tête. Un désespoir qui paralyse ou réveille les pulsions les plus primitifs. Qui corrompt l'être jusqu'à le rendre fou, lui offrant le choix entre la terreur et un narcissisme qui croit dans sa "lucidité". Sûrement l'épreuve la plus dure que puisse affronter un être humain et sûrement pas celui qui le rend fort.

L'elfe noir avait pitié d'eux. Vu ses capacités et sa confiance en lui, il pouvait ne pas fuir face à leurs problèmes et c'est ainsi qu'il s'approcha de la vampire, sans peur face à cette créature qui semblait perdue.

"Aurais-tu peur de moi? Ou plutôt de toi-même?"

Elle le regarda faire son petit manège étrange. Tsss un aqua?Encore un pauvre pantin d'Elament supposa elle. Cachant son intérêt elle regarda comment il procédait. C'était une drôle d'idée mais ça avait l'avantage de marcher. La jeune vampire devina qu'il devait avoir de l'expérience concernant son élément, ce qui ne la rassura pas, bien au contraire. Survivre... Il lui fallait à présent survivre, et non vivre. Non il ne lui fallait plus rien attendre de la vie et elle le savait.

Elle le regarda, plus proche à présent, elle était de plus en plus inquiète, craignant pour son existence et trouvant cela légérement misérable. Mais elle avait beau survivre grâce à la mort des autres, elle voulait rester "en vie". L'immortalité, c'est grisant et attirant, alors quand on vous l'offre, vous ne crachez pas dessus et vous cherchez à la garder! Certes les dents et les griffes de Cein ne suffiraient pas toujours à la défendre mais quoi qu'il arrive elle essaierai. Après tout, si Armand et Raziel parvenaient à vivre avec "ça" pourquoi ne le pourrait elle pas? Elle voulait aller chercher amour et réconfort auprès de la lune mais quitter l'aqua des yeux ne l'enchantait guère. Telle une renarde apeurée, elle ravala un couinement devant lui, crispée, les muscles bandés, désirant seulement s'enfuir, mais craignant de déclencher une réaction violente chez son interlocuteur... Il s'approcha encore, elle retint un feulement de désapprobation et fixa son visage dans une expression froide et impassible, dissimulant sa peur qui était néanmoins palpable. Seuls ses yeux exprimaient un désespoir et une crainte inexplicable, seuls ses yeux paraissaient humain dans ce visage de glace, seuls ses yeux brillaient et scintillaient dans l'encre de la nuit. Lorsqu'il parla, elle braqua les deux miroirs de son âme sur lui, le fixant avec attention... Sa voix résonna entre les arbres, douce et claire, filant se perdre dans l'infinie du ciel

"A quoi bien la crainte et la peur puisqu'elles n'évitent pas le danger?"

Parfaitement agaçant. Ce mortel rodait autours d'elle comme un chien qui avait senti la faiblesse, un chien qui sentait la peur en l'animal sauvage piégé. Il n'avait rien de mieux à faire? Pas de pauvres démons à abattre ou de jeunes élèves à terroriser? Qu'il aille voir ailleurs enfin, elle avait autre chose à faire, elle. Elle le détailla un instant alors qu'il passait devant elle... Il semblait si sur de lui, c'était hilarant. Elle le fixa de ses yeux luisants lorsqu'il s'arrêta. Elle ne sourcilla pas, étrangement calme comparé à l'instant précédent. Sa vanité et son trop plein d'audace calmèrent Cein. Ses épaules se soulevèrent... Elle se moquait éperdument des considérations philosophique de l'elfe.

"Je m'appelle Ceinwyn... qu'est ce que ça peut te faire?"

Elle ferma les yeux et s'imagina ailleurs... Elle se revit élève et humaine, loin des problèmes existentiels des vampire, loin du sang, loin de la bête... Soudain une douleur s'empara de ses entrailles et un gémissement lui échappa, ses bras enserrèrent son ventre et elle se pencha en avant, baissant la tête vers le sol... Ses pupilles de prédateur s'agrandirent, elle posa son regard sur son interlocuteur... Faim, elle avait faim, elle venait de boire pourtant mais une faim inexplicable venait de se réveiller, torturant son corps et son âme. La bête, en pensant à elle, Cein l'avait réveillée. Elle avait réveillé la faim insidieuse et inextangible qui rodait en chaque vampire. Elle sentit pulser dans ses veines une force étrange, un manque puissant et une envie de violence et de sang...

Son corps eut un sursaut, ses cheveux glissèrent sur ses épaules et legerement devant son visage. Dans les ténèbres ont pouvait apercevoir un oeil brillant qui ne lachait pas l'elfe noir. La bête gronda de nouveau en elle, hurlant pour sortir, hurlant pour dévorer la vie qui couler ainsi inpunement devant elle. Elle était au bord d'une frénésie implacable et terrifiante et ne pouvait quitter des yeux la gaterie devant elle. Un bout de langue gourmand glissa sur ses lèvres...

La douleur dans son ventre hurlait, la bête criait à mort, son corps tremblait. Faim frénétique, elle n'avait encore jamais ressentie ça. Était-ce parce qu'elle venait d'apprendre à tuer parfois? La bête était plus forte qu'avant à cause de cela? Ses pupilles s'écarquillèrent d'un désir exacerbé en voyant la peau de l'elfe apparaitre... Elle ne cherchait même pas à comprendre, elle regardait ses gestes, comme hypnotisait, imaginant ses crocs percer cet épiderme.

Son corps fut soulevé par un violent sursaut. Une odeur la prit à la gorge et excita ses instincts meurtriers. Oh Dieux, cette odeur tant aimée, cette odeur qui faisait d'elle une esclave comblée. Elle ferma les yeux, crispant tout ses muscles et respira avec délice et envie cette odeur. Qu'avait il donc fait? Pourquoi sentait il ainsi le sang? Un cri intérieur sembla lui déchirer les entrailles

*Tu t'en moque... prend le, prend sa vie prend son âme...*

Elle ouvrit des yeux inquiets, regarda autours d'elle et aperçut la main ensanglantée qu'il lui tendait. Elle retint un couinement. Une nouvelle fois, son corps se crispa et se souleva legerement.

*VITE PUISQU'IL TE LE PROPOSE*

Elle secoua la tête légérement en tentant de chasser l'esprit pervers de son corps... Une idée étrange lui traversa l'esprit. Mais d'où venait cette bête que chacun des siens avait en elle? Elle voulait savoir... Qu'était elle? Qui les avait fait et pourquoi étaient ils là? Réflexions legerement déplacées certes. Elle releva brusquement la tête vers ce dénommé Shin et d'un même mouvement se mordit la lèvre du bas avec une violence non contenue. Ses canines suivis de ses autres dents pénétrèrent dans la chair froide, un flot de sang coula immédiatement. Un sang noir, plus noir que celui des mortels. La douleur irradia son visage, elle sentit le précieux liquide couler le long de son cou, sur sa poitrine et détremper sa tunique.

Elle ôta dans un soupir frôlant l'extase et le soulagement ses dents de sa propre chair. Elle léchouilla la plaie peut ragoutante, instantanément, les chairs commencèrent à repousser, lentement mais surement. Le sang cessa de couler, elle s'essuya le menton d'un revers de manche, fière d'avoir fait taire la bête. Ok, la façon n'était pas particulièrement douce mais le résultat était la. Elle leva un sourcil et se releva doucement.

Frottant d'une main son pantalon, elle toucha la peau sous sa lèvre. C'était déjà presque guérie, mais c'était douloureux. Bon, ce n'était pas bien important...

Elle regarda l'eau nettoyer tout ce sang d'un air déçu... Il ne fallait pas gâcher la nourriture. Mais le sang semblait intarissable, "tant qu'il y à de la vie il y à de l'espoir". C'était exactement ça, tant qu'il y à de la vie, il y à du sang. Elle fit claquer sa langue sur son palais, le gout de son sang en bouche. Comme un fin gourmet profitant du vin en bouche elle savourant le gout métallique et profita un cours instant de l'arôme.

Elle haussa les épaules en entendant sa voix.

"Je vais bien, j'ai simplement faim"

Elle repensa au temps ou elle pouvait encore grignoter quelques graines salés quand elle avait faim. C'était finit, ses repas se devaient d'être exclusivement liquide et d'un couleur rougeâtre. Fabuleux, cela promettait toujours de folles exaltations des papilles... Elle le regarda de haut en bas. Shin? Ce nom résonnait d'une façon très légérement familière. Oh elle avait du entendre ce nom parmi les moutons d'Elament. Des moutons hein? Pourtant, certains n'avaient rien de doux agneaux près à se laisser tendrement égorger par la tendre et aimante bergère qu'était Ceinwyn.

Oui parfaitement, tendre et aimante. Lorsqu'elle séduisait un beau et jeune Elamentiens au sang chaud, elle le faisait bien, elle était douce jusqu'à ce qu'il l'emmène dans sa couche. La elle s'occupait de lui un instant et prenait ce qu'il lui fallait avant de filer à l'approche des mortels rayons... Rien de bien méchant en somme. Si ce n'est que quelques beaux et jeunes Elamentiens au sang chaud c'était réveillé trop tôt et que Ceinwyn avait faillit les tuer... Ou pire! Y passer!

Elle fit de nouveau claquer sa langue sur son palais...

"Oui j'ai faim, je me mettrai bien quelque chose sous la dent... enfin quelqu'un la pour le coup"

Elle sourit amusée, elle semblait plus adoucie que tout à l'heure. Elle fit craquer son cou, posa une main sur sa hanche et prit une posture excessivement séduisante... D'un ton de comédienne, elle déclama, au bord de l'éclat de rire

"Que faut il que je fasse pour gagner ma ration de sang?" Une petite révérence vint souligner le tout "User et abuser de tout cela monseigneur" elle montra son corps "car je vous l'offre en échange d'un bon repas"

Il était évident qu'elle se moquait gentiment, elle en faisait beaucoup trop pour que cela soit vrai et elle le savait. La vie de Cein ces derniers avait tout d'une scène de théâtre, aussi jouait elle, pour une fois, le rôle qu'elle avait choisit!

Dans un sourire elle pensa à Raziel... Bon sang, s'il avait entendue ça, elle aurait passé un sale quart d'heure. Elle l'entendait déjà sermonner: "on ne demande pas on prend"... Si Raziel avait les moyens de se servir, Ceinwyn elle, était plus jeune, plus faible et moins expérimentée. Elle ne voulait pas perdre sa non vie aussi bêtement.

Finalement, elle aimait se laisser porter par ses caprices, laissant sa faim la guider lorsque ça la chantait, et résistant lorsqu'elle le désirait. Pourquoi essayer de résister à la soif alors que c'était elle qui dictait votre vie?.. Elle regarda le dénommé Shin et ravala son invitation. Tant pis, pour elle et pour lui. Elle leva un sourcil en écoutant ses paroles, une petite moue dégoutée s'afficha sur son visage.

"La traque du gros gibier je laisse ça à d'autre, il le font très bien. Je me satisfait d'une notion qui vous semblera peut être abstraite: la facilité. Et pour le moment cela suffit à me rendre heureuse." Elle laissa passer un laps de temps entre ses paroles "Je m'en retourne donc à ma chasse alors, allez donc, vous, traquez inutilement ceux que vous qualifiez de démon..."

Elle se mordit la lèvre en le regardant

"Qu'elle dommage... Je suis sure que j'aurais pu vous en donner pour votre "argent""

Elle sourit et rigola. Toujours en le regardant, elle recula de quelques pas, appuya sa main sur un arbre et s'aida de celui ci pour faire pivoter son corps. Elle marchait lentement, dans une quelconque direction, tournant le dos à l'elfe.

"Les insouciants ignorent tout ce que leur apportent l'ombre."

Périlleux exercice de sang-froid auquel il devait s'adonner à cet instant précis, un rictus vint déchirer ses lévres, comme la sensation d'avoir reçu un coup dans la fierté. Malgré l'inconscience politique de cette vampire sur ce qui se passait à Elament et ses alentours, l'effet du mot "inutilement" eut un certain impact chez l'elfe noir qui s'en releva tout de même très vite. C'était l'ignorance des gens à laquelle il n'était pas forcément habitué. Sans prétention, les Traqueurs Infernaux avaient nettoyé le paysage de la vermine démoniaque qui y rodait dans le seul but post-bataille de piller les chariots de commerce, tuer les nouveaux arrivants, isoler et affaiblir la cité. Ainsi les routes pouvaient se redéfinir et la circulation paraissait plus fluide et le rapport de force plus clair entre les élementalistes et les démons. Ce que cette fameuse Ceinwyn ignorait c'est que son droit à la facilité était un luxe que peu de personnes pouvaient se permettre et que sans eux, son existence serait très certainement envolée à l'état présent.

Et puis une autre idée lui vint à son esprit tandis qu'elle s'éloignait le dos tourné à lui. Après le ménage des traqueurs sur la région, la quantité de viandes démoniaques était moins accessibles que celles de tout autres races. Donc la propabilité que les vampires se rabattent sur de la chair non-corrompu n'était plus négligeable. Ce qui signifiait que l'existence d'un vampire aussi faible et capricieuse que Ceinwyn en devenait véritablement dangereuse. Il ne pouvait donc pas la laisser filer ainsi. Le choix s'imposait donc entre lui proposer de la renforcer pour apprécier meilleur cru, soit de la tuer ici et maintenant. Le premier choix aurait comme défaut que parmi les meilleurs crus, on trouvait aussi les élémentalistes et que cette vampire ne s'en priverait pas. Le second choix serait selon l'elfe noir, un gachis. Néanmoins l'idée de l'embrocher par surprise était tentante, mais l'elfe noir valait mieux que cela. Choisissons tout d'abord la difficulté à la facilité.

"Vous nourrir quelques temps et vous apprendre à chasser plus gros au point que cela vous semble facile, je peux vous en donner pour votre "argent"." s'exclama l'elfe noir à forte voie tandis que l'eau de la nature ambiante parcourait son échine pour se rassembler dans son dos avec l'eau qu'il créait à partir de lui au cas où la réponse serait négative.

Elle avait fait une erreur. Oh bien sur pas qu'une seule mais s'attarder en ces lieux avec cet être n'avait pas été la meilleurs. Elle stoppa tout mouvements en l'entendant lui adresser une nouvelle fois la parole.

"Ne vous a t-on jamais appris que lorsqu'une Dame veut partir on la laisse s'éclipser?" Elle ne bougea que sa tête et son cou, laissant son corps dédaigner le gêneur "J'ai déjà un maitre... Je crois qu'il m'en donnera lui aussi pour son argent, mais la proposition est fort appréciable et je vous en remercie"

Elle tourna la tête et ferma les yeux. Comment avait dit Tyrol déjà? Des courants chauds et des courants froids? Vite, VITE... un courant chaud, il lui fallait de la chaleur. Ceinwyn voulait partir, elle se sentait à présent angoissée. Elle n'avait pas choisit la bonne personne, elle le sentait dangereux. Ces yeux s'écarquillèrent de bonheur quand enfin un courant qu'elle devina chaud passa près d'elle. Elle supplia le vent d'être encore une fois son allié.

*La chaleur... la chaleur crée des illusions, il faut que je disparaisse... au moins quelques secondes; pour que je puisse filer*

Elle se tourna lentement vers Shin, le regarda en souriant avec douceur tout en gonflant d'énergie le courant d'air chaud.

"J'en suis navré, mais il me faut partir..."

Elle expira doucement, elle était déjà fatiguée, gonfler ainsi le vent de son énergie, elle n'en avait pas l'habitude. Dans un dernier effort, elle s'entoura de cette brume chaude... L'air sembla trembler pendant quelques instants autours d'elle, rencontre de l'air chaud avec l'air froid, l'atmosphère se fit floue. La vampire, blottie au creux de cette rencontre entre deux vents n'était plus visible, ce qui devait apparaitre aux yeux de l'elfe, c'était la forêt semblant en proie à une étrange chaleur. Des volutes déformaient la vision que l'on avait des arbres et du sol et parmi elles, l'ancienne Oreade n'était plus visible... pour un temps. Ceinwyn, recula de quelques pas, hésita quelques secondes puis fila se propulsant aussi vite que possible vers l'orée de la forêt. Elle remerciait ses sens de vampire qui lui permettaient d'avancer vite et sans bruit. Pas de bruit de respiration, pas de cœur battants plus fort, quelques bruits de branches qui cassent et de feuilles qui crissent sous les pas, mais elle ne pouvait pas mieux allier vitesse et discrétion.

Elle s'arrêta, tout près de la sortie de la forêt. Appuyée contre un arbre, ses membres étaient douloureux, elle était fatiguée. Dieux, elle n'était pas une ces brutes qui étaient en cours avec elle non, elle n'avait pas autant d'énergie à placer dans ses coups, il lui fallait placer ses efforts dans des actes minimes qui ne lui demanderai que peu de concentration. Ne sachant pas si il l'avait suivie, elle se posa par terre, dos à un arbre. Comme si elle rabattait une couverture sur elle, elle donna ses dernières forces à un courant chaud et à un courant froid, elle les mélangea au dessus d'elle et s'en entoura. Épuisée, bien à l'abri, protégée par le vent, elle s'endormit, luttant comme elle pouvait contre l'écrasante fatigue...

*Bon sang... Cein... allez ma grande, si tu t'endors.. que.. tu ne te réveille pas, les rayons du soleil eux.. le feront...*