La nuit... (PV Aylwin)

Alwin se vit alors confrontée à une inquiétude. Pourquoi lui demandait-il de promettre. Les promesses avaient un défaut, elle était incapable de les briser. Et celle-ci lui coupait tant de possibilités. Avait-elle un moyen d'y échapper? Pouvait-elle prendre le risque de promettre cela? La vie se devait d'être constituée d'apprentissage et le meilleur moyen d'apprendre, c'était par essai/erreur, or, ce qu'il lui demandait, c'était de ne plus utiliser cette méthode pour explorer l'étendue de ses pouvoirs.

Elle détourna les yeux pour se concentrer, pour réfléchir. Pouvait-elle réellement abandonner cette capacité qu'avaient les être pensant à apprendre par eux-même? Et si elle s'intérressait de plus près à la magie qu'elle possédait, comment ferait-elle pour s'essayer? Mais il restait les livres, et les professeurs. Ce n'était pas suffisant! Elle n'avait pas envie de ne suivre que ce qu'on lui enseignait. Elle voulait pouvoir découvrir et peut-être même inventer de nouveaux horizons. Il était hors de question qu'elle le promette, elle ne le pouvait pas.

- Jamais je ne vais jouer avec quelque hose que je ne suis pas certaine d'avoir entièrement compris, dit-elle machinalement. Maintenant, j'ai un cours, si vous voulez bien m'excuser.

Elle se tourna vers le professeur et leurs deux regards se croisèrent. Elle n'avait rien promi.

- Merci beaucoup pour cette leçon. Au-revoir!

Elle sortit de la classe d'un rythme rapide et se rendit tout droit à son dortoir.

Quand les deux regards se croisèrent, il se passa pendant un instant quelque chose d'inhabituel. Celui du Trône avait changé, de façon inhabituelle chez lui. Au lieu des deux morceaux de ciel qui scintillaient dans ses iris, il y brillaient maintenant deux dures pierres précieuses couleur de saphir. Deux pupilles sans reflets, sans fond, qui semblaient à la fois lointaines et perçantes. Deux yeux qui semblaient voir au-delà des choses, dépouillant toute couverture pour exposer la vérité à leur lumière. Deux iris de cristal qui plaçaient toutes choses nues devant l'infini.

Comme il l'avait déjà dit, l'Ange n'employait que très rarement ses propres pouvoirs de médium. Il passait la plupart du temps pour un professeur davantage tourné vers l'étude que vers la pratique. Seulement, en cas de nécessité, il lui arrivait de montrer que ce n'était pas pour rien qu'il avait été choisi au poste de Professeur de l'Air. Il n'était pas un télépathe particulièrement efficace, mais en revanche, ses talents d'empathe étaient d'une toute autre envergure. Pendant l'instant où les yeux d'Aylwin croisèrent les siens, il aurait fallu être un magicien puissant pour lui fermer son esprit et lui cacher ce qu'il voulait voir. D'ailleurs, la jeune fille ne cherchait visiblement pas à cacher son refus.

Un instant... une seconde à peine. Puis les paupières de l'ange se refermèrent doucement. Il se contenta de répondre d'un signe de tête à la salutation, sans ouvrir la bouche. Etendant la main, il saisit à nouveau le Chantepierre abandonné. Pensivement, ses doigts glissèrent sur les cordes de cristal au rythme de ses réflexions.

"Ainsi, tu n'as rien promis..." murmura-t-il pour lui-même.

Une vibration douce se propagea à travers la salle, comme guidée par les mains invisibles d'un dieu musicien. La musique minérale reprit entre les murs de pierre, tandis que l'Ange rouvrait ses yeux sans âge pour contempler le soleil du matin. Un sourire apparut sur son visage tandis qu'il se remémorait les très vieux vers que chantaient jadis les poètes d'Otulin. Des vers qui parlaient d'enfants insouciants, qui couraient sur les rochers sans voir le gouffre qui les guettait, juste à côté. Les mots enchantés contaient aussi l'adulte qui les voyait, qui levait la main pour les retenir, mais la laissait retomber, émerveillé. Car inconscients de ce qui les menaçait, les petits enfants étaient les seuls à pouvoir sans jamais tomber, voir et cueullir les plus belles fleurs au bord du précipice.

** Les enfants... hein? **

Aylwin n'était plus une enfant, mais aux yeux millénaires qui la voyaient, elle en gardait quelque part l'innocence. Point n'était besoin de brider les enfants par des serments. Cependant, il faudrait rester vigilant. Son sourire se fit indulgent en considérant la Trace invisible, mais sûre, qui reliait le Chantepierre à celle qui en avait joué. Les Traces-Esprit étaient presque impossibles à briser, et loin d'essayer, il conserverait celle-ci au coeur de la magie du l'instrument enchanté. Si sa propriétaire commettait une imprudence, la fausse note courrait aussi loin qu'l le faudrait, traversant l'espace pour porter son message de danger. Aylwin n'avait pas besoin de le savoir, mais quelque part, deux yeux redevenus doux veillaient. Ils attendraient jusqu'à ce qu'ils soient complètement rassurés, prêts à intervenir.

Tranquillement, le jeune homme aux cheveux blancs se laissa aller sur le bord de la fenêtre, laissant la chaleur du soleil l'inonder. Pas de cours aujourd'hui, il avait le temps pour la rêverie et la musique. Et scintillante entre ses doigts, la harpe de cristal continua de chanter...

*** TOPIC CLOS ***

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