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 Le Destin ou le Hasard (Privé - Suite)

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Tyrol
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Tyrol
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyDim 13 Avr 2008 - 20:58

[Suite de Ceci]

Evidemment, il s'en serait douté, la "maison" se limitait à un strict minimum ! Mais maison tout de même ! S'il savait… Lén avait vu pire entre-temps. Il avait dormi partout, y compris dans les endroits les plus indésirables : la pierre froide et sale des prisons, l'herbe mouillée, les branches d'arbres trop minces, les grottes gelées à vingt mètres sous terre… Lui qui avait l'habitude des lit moelleux et des draps de soie et de flanelle… Eh bien savez-vous quoi ? On s'y fait très bien ! Ayant accepté la clé, l'elfe acceptait donc de dormir entre les quatre murs et le toit d'Eal, peu importait ce qu'il y avait entre ! Il s'était toujours accommodé de tout, et sachant que là il serait avec l'oréade, pff ! Rien ne le dérangeait ! Il y aurait pu y avoir de l'eau jusqu'au cou et des cadavres de rats, tout lui passait bien au-dessus ! (On exagère avec les cadavres de rats quand même…)

Un peu rêveur, l'elfe laissa Eal lui poser un baiser dans le cou en souriant, sans savoir qu'on les regardait et s'en fichant comme des cadavres de rats flottants (… quoi ?), d'un sourire extrêmement béat qui fut loin de disparaître lorsque l'oréade le poussa à la fugue : Ainsi donc, il n'était pas si occupé que cela ? Ou alors son "travail" était fini, ou alors il importait peu ! Hé, n'est-ce pas normal après tout ? Il avait choisi entre Lén et les poissons. Flatté, l'elfe ? Et pas qu'un peu. Avait-il le droit de dire que c'était tout de même normal ? On ne sait pas mais on va le dire quand même, après tout ça fait un an, zut !

Alors il avait opté pour la fugue, et avec quel enthousiasme… Direction les collines ?


"Tout de suite, chef…" murmura-t-il les yeux fermés, ses lèvres à peine décollées du baiser d'Eal.

Il serra ses mains, qu'il tenait encore dans les siennes, et hop, ni vu ni connu ou presque : dans un vif rai de lumière, l'elfe et l'oréade avaient disparu. Là où ils étaient, à côté des caisses, il ne restait plus rien. Une seconde plus tard, tous deux se retrouvaient loin de l'agitation des ruelles, hors de la Cité, au beau milieu d'une petite plaine. A une dizaine de mètres à peine s'élevaient les portes d'Elament. Tyrol émit un rire discret et s'écarta un peu d'Eal, dont il avait profité du baiser pour le garder en contact contre lui et donc faire fonctionner le sort comme si de rien n'était. Autour d'eux, la magie se dissipait en volutes de vent invisible et parfumé, ce vent, le Vent de Lén qui, libéré, prit toute sa place dans l'espace qui lui était enfin offert en tintant joyeusement.

Les collines n'étaient plus très loin à partir de là. L'elfe porta la main à sa cape dont il défit la broche, et retira le long et épais tissu noir de sur ses épaules. Et là, avec plus ou moins de surprise selon certains, on découvrait sous la triste cape noire une magnifique tunique blanche, longue comme il les aimait. Seules les bordures étaient décorées de fils d'or entremêlés formant de complexes motifs elfiques. Les manches quant elles, finissaient aux coudes, retenues contre la peau par du fil noir, et le reste n'était qu'un léger voile vert qui ne couvrait qu'à peine le restant du bras, préférant voler dans le vent avec les autres rubans. C'était une belle tunique, plus pratique qu'il n'y paraissait, mais qui découvrait tout de même sagement un début d'épaule et le haut du torse.

Il pouvait enfin retirer la cape noire. Evidemment, il la remettrait s'il avait froid, s'il pleuvait, mais… Elle venait en ce jour de perdre, elle et son damné capuchon, toute sa symbolique : le deuil. Alors, comme il faisait beau et que l'on n'avait plus besoin d'elle, il la retirait et montrait ce qu'il cachait toujours : une tunique blanche. Comme l'avait fait remarquer un jour Tina dans l'un de ses moments d'élans poétiques, "sous l'ombre se cache la lumière.. Si la Lune voulait bien se casser de d'vant l'Soleil y aurait plus cette p*tain d'éclipse qui m'fout l'cafard !"

Coinçant la cape entre ses jambes un instant, Tyrol défit la chaîne qui pendait à son coup et à laquelle était suspendue son étoile de cristal, petite chose de bleu et d'argent qui brillait discrètement, et y glissa à son côté la clé en bronze. Ce n'était pas éminemment joli mais il n'en avait pas vraiment grand chose à faire, pour parler poliment ! Puis il rattrapa sa cape d'une main et de l'autre reprit celle d'Eal, lui montrant d'un signe de tête et d'un sourire qu'ils pouvaient repartir.

Laissant donc la cape flotter distraitement dans le vent, à son côté, Tyrol se mit à marcher vers les collines, non loin de là et déjà en vue. Il baissa la tête et regarda l'herbe un instant, paraissant réfléchir… Puis il releva la tête avec un grand sourire, ses longs cheveux se soulevant comme sa cape au gré des caprices de son vent.


"Alors, que veux-tu savoir exactement ?" interrogea-t-il avec tranquillité, toujours souriant.

Il tourna la tête vers Eal tout en continuant à marcher, peu pressé. Il relançait le sujet au hasard, un quasi-certain que l'oréade dirait vouloir TOUT savoir… Ce qui ne l'aiderait pas pour savoir par où commencer ! Par le début sans doute ? Dommage, c'était la partie la moins drôle… Au moins en serait-on débarrassé plus vite. Il espéra tout de même pouvoir répondre à un point précis qui l'amènerait tout naturellement à parler d'autres choses, sans en avoir l'air… Les monologues lui plaisaient beaucoup moins qu'avant et il se prêtait avec peu de plaisir à cet exercice.

Enfin, comme toujours... "s'il le faut, il le faut" !
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Eal
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyDim 27 Avr 2008 - 20:08

Ce qu’il se passe, le jeune oréade n’aurait su le dire, une bourrasque plus forte que les précédentes ? Toujours était-il qu’il lui sembla un instant qu’ils s’envolèrent dans le ciel. Une lumière plus forte, ce tournoiement, ce parfum bien présent. Les yeux fermés, le jeune brun les rouvrit et jeta un rapide coup d’œil à ce qui les entourait. A ce qui les entourait et aux collines qu’on pouvait deviner, et où il n’avait plus jamais remis les pieds, ces collines semblaient prendre une autre allure maintenant que le solan était à ses côtés. Le vent qui habitait cet endroit n’était pas sans familiarité pour l’elfe et un sourire en coin éclaira les lèvres d’Eal. Les cheveux en bataille, l’oréade posa ses yeux sur ledit elfe.

La cape fut enlevée, cette cape bien trop sombre laissa place à une lumière bien plus Lénesque. Blanche, teintée de vert et parcouru de fils noirs, la tenue de l’elfe était tellement à son image. Lumineuse, discrète et horriblement envoûtante... Croisant les bras un instant, le jeune brun laissa ses yeux parcourir de haut en bas son compagnon. Chaque geste, chaque respiration semblait être vu pour la première fois. Les yeux d’Eal remontèrent vers les bras, puis se faufilèrent sous le tissu léger des manches avant de frôler la peau du cou jusqu’au visage et aux mèches délicates. La clé qui fut accrochée au pendentif de Lén ne donnait pas le meilleur effet, ce n’était qu’une modeste clé, qui en avait vécu des aventures et non une clé sculptée en argent ornée dont ne sait quelles pierrailles. Elle était robuste, n’était-ce pas déjà assez ?

C’est le sourire de Lén qui le sortit de son observation, un sourire et une main. Hochant simplement de la tête, Eal prit la même direction que son compagnon, sa main dans la sienne et bien décidé à ne pas le lâcher en cet instant précis. Les bottes dans l’herbe ne faisaient presque pas de bruit et ce vent qui agitait les cheveux du solan se frayait un chemin dans ses mèches ébènes. Son regard braisé voyageait dans les arbres et les herbes hautes qu’on pouvait apercevoir. Un voyage dans cette nature qui lui montrait toute les facettes de leur univers. Et si la guerre avait changé quelque peu leurs décors, à un moment donné, toujours, le temps semblait reprendre son cours et les choses s’arrangeaient.

Que voulait-il savoir ? Tout ! N’était-ce pas normal ? Un an, un an sans lui, un an obscur dans son esprit, alors oui, il voulait tout savoir ! Les moindres détails, tout ce qui pourraient le rapprocher de Lén. Et ça était-ce normal ? Oui, sans aucun doute, cela était normal de vouloir savoir ce qui s’était passé dans la vie de la personne aimée, savoir sa vie, connaître ses doutes, ce qui faisait de la personne aimée, un être unique. Mais avait-il le droit réel de le faire ? Ne devait-il pas laissé comme le disait si bien d’autres personnes une part secrète ? Une part secrète… n’était-ce pas cela qui créait des barrières au contraire ? Sourire en coin, Eal baissa son regard pour croiser celui de l’elfe. Ne se doutait-il pas de la réponse ?

-« Commençons par ton habitation, tu vis avec Tina? »

Hé oui, parce que les « s’il le faut », n’avaient jamais été la tasse de thé de l’oréade. Si son compagnon n’abordait pas la question, s’il se sentait obligé de passer par ce chemin-là, le chemin du « racontage » de vie, alors, non, Eal ne le forcerait pas à l’emprunter. S’il se portait mieux sans rien dire, libre à lui, et l’orgueil et la curiosité d’Eal n’auraient qu’à la fermer. Point.

Le sourire en coin, sans nul doute que cette jolie déviation de conversation allait étonner le solan, mais c’était ça qui était drôle ! Bouffant une mèche de cheveu à cause du vent, d’un geste Eal retira la mèche suicidaire et reposa ses yeux sur Lén. Vivait-il avec Tina ? Etait-elle encore ici cette sœur ? Etait-ce elle qui s’était occupée de l’elfe quand il avait disparu ? Ou alors l’elfe avait pris soin de lui sans l’aide de personne ? Oui, ce n’était pas les questions qui manquaient, mais pas un mot ne se permit de prendre des libertés en s’articulant à l’air libre.

-« Ah ! Et tu as fini par manger ta créature ? »

Sous-entendez le chien, cette espèce d’affreuse chose qui collait Lén sans arrêt quand ils étaient encore ensemble avant la guerre. Bien qu’il ne devait rien y avoir en dessous de la couche de poil. Le genre, chien-rat aussi gros qu’un chat. De simples questions, presque trop superficielles, mais après tout ce qu’il s’était passé, cette attitude n’était-t-elle pas aussi bonne qu’une autre ?

-« J’espère que le lieu a été épargné… »

Murmura t’il sans réellement prendre conscience de ses paroles.
Après tout qu’est-ce que les démons pouvaient faire brûler sur les collines ? Aucune maison, aucun champ, juste une nature présente. Eal doutait que ce genre de créatures y trouve du coup un intérêt quelconque. Si les démons agissaient un peu intelligemment ça se saurait…
L’oréade aurait bien approfondi ses pensées de tactique, mais ce n’était pas réellement le lieu pour se remémorer que lui aussi avait brûlé des maisons, tuer des gens, et divisé des familles. Après tout, en quoi était-il différent des démons ? Et bien simplement que lui, pour affaiblir les populations, aurait rendu la terre fertile. Simple et efficace, et trop simple pour susciter l’intérêt des guerriers.

Sans Lén, Eal était réellement perdu en fait…
C’était en gros, l’excuse que son esprit se donnait pour justifier cette soif de carnage qui s’était réveillée pendant les combats. Les autres avaient juste dis que c’était sa nature d’oréade qui s’était enfin éveillée …
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Tyrol
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyMar 29 Avr 2008 - 15:01

Pas de bruit ou presque, à peine le bruissement de l'herbe foulée du pied au fur et à mesure de leur marche et, partout ailleurs, couchée par le vent qui balayait doucement cet immense océan de verdure, créant des vagues à sa surface. Le vent de Tyrol, lui, se taisait, devinant qu'un silence religieux était de rigueur en cet instant. Il se contentait de suivre, comme d'habitude, tandis que l'elfe, à l'avant, guidait Eal vers un lieu qu'il n'était pas sûr de reconnaître mais qu'il voulait au moins approximativement revoir, approcher. Après quelques pas à peines, Eal engageait enfin la voie sur les questions de… routine. En tout cas, celle qu'il venait de poser en était une. Soulagé pour un temps, Tyrol répondit aussitôt :

"Non, pas avec elle. Nous sommes partis ensemble de la Cité, avant la bataille, et elle n'y est pas revenue avec moi. Malgré tous les chemins que nous avons pu fouler ensemble, elle continue de courir ! Alors elle m'a laissé sous l'aile de Tranlthanas, je partage son antre dans les Monts Décharnés."

L'elfe partit d'un rire dont lui seul pouvait comprendre la signification.

"Je te l'accorde, ce n'est pas très drôle ! Le lieu n'est pas des plus charmants mais au moins, je ne dors pas à la merci d'un temps capricieux."

Peu charmant pour l'elfe qu'il était, ce fameux lieu qui méritait bien son nom… Certes, mais la compagnie du sauvageon n'était pas non plus des plus chaleureuses ; Non pas qu'il détestât Tyrol, loin de là, toutefois et ce malgré les changements chez lui aussi, il ne possédait pas plus de tact ni plus de délicatesse qu'avant hormis celle, naturellement féline, qui accompagnait chacun de ses mouvements. Ainsi l'accueil était chaque soir toujours aussi froid et formel, et les veillées toujours occupées par d'interminables débats. Cependant, comme Eal ne devait pas connaître Tranlthanas, Tyrol tut ce détail. Il se contenta pourtant de préciser avec un drôle de sourire, répondant ainsi à la seconde question dans une transition parfaite :

"Je ne mange pas de ça, pauvre bête ! Mais Tranlthanas a essayé de la rôtir, une fois ; il essaye toujours. C'est incroyable comme une si petite bête court vite devant le danger."

Il échappa un bref et très léger rire puis marqua une pause étrange, ses yeux légèrement écarquillés fixant le vide. Il ne se rendit pas compte qu'il venait par la même occasion de s'arrêter. Quelques secondes, il parut réfléchir, plissant alors les yeux sans porter d'attention à Eal. Réfléchissait-il réellement ou rêvait-il ? Difficile à dire. Peut-être les deux, cela était assez courant chez lui.

"En revanche," reprit-il d'un ton très serein, le regard toujours ailleurs, "j'ai mangé une limace vivante. C'était au mariage de ma sœur. J'étais ivre mort."

Et, dans une exclamation joliment étouffée par un sourire joyeux, il reprit la marche, la main d'Eal toujours dans la sienne, en guise de guide. Il mena donc son oréade un peu plus loin, là où il pensait se souvenir d'être venu. Toutes les collines du monde se ressemblent, les vagues et les creux qu'elles forment n'ont jamais rien d'exceptionnel à proprement parler ; mais il avait mémoire de l'un de ces creux verdoyants où ils avaient passé un après-midi. Il y avait des herbes hautes et quelques fleurs… Oui, comme dans n'importe quel creux verdoyant, en fait. Sans savoir s'il avait raison ou non, Tyrol se dirigea donc vers celui qui se présentait à eux derrière la pente d'une colline.

"Tout a repoussé," dit-il alors. "Si la terre a été maltraitée, elle s'en est bien remise."

Et d'un geste large il montra le lieu qu'il estimait être "celui-là", le "bon". Etait-on à quelques mètres près ? Ils étaient, après la plaine, dans les Collines. Globalement, c'était cela : quelle importance de retrouver exactement "le" creux qu'ils avaient occupé l'espace de quelques heures à peine ? Aucune. Là, il y avait de l'herbe haute et des fleurs, alors cela ferait office de mémorial pour aujourd'hui ; et surtout de lieu de discussion à l'écart de l'agitation et des gens. Cela serait amplement suffisant. L'elfe traîna donc encore Eal à sa suite, jusqu'au fond du creux là où l'herbe lui arrivait à mi-cuisses. Il lâcha sa cape et lorsqu'elle fut au sol, il se laissa choir dessus.

"J'ai fais beaucoup de progrès," reprit-il aussitôt, ne tenant pas à laisser traîner les nouvelles plus longtemps. "Tu peux être fier de moi. Je pourrais te montrer si tu le souhaites : désormais, tu peux m'emmener où tu veux, je n'ai plus peur. Même plus du sang."

On lançait le sujet sur ce que l'on pouvait, mais Tyrol énonçait ce qu'il estimait être le plus important à dire, le plus flagrant : il était plus fort. Oh, pas physiquement, non ; Il lui semblait même d'être affaibli quelque peu, même si cela ne se voyait pas de l'extérieur ; sans doute un effet de son imagination, ou un certain manque qu'il ressentait face à son changement de comportement : sa sensibilité exacerbée qu'il manifestait jadis par de grands gestes, de grands éclats de rire ou de sanglots – par conséquent, une expansivité immanquable -, avait été remplacée par une sérénité toute candide. Sans doute que, comme il s'agitait moins, il avait l'impression de faiblir. Magiquement, on ne peut pas en dire autant ; et, bien qu'incapable de tuer un ennemi de sa propre main, même pour sa survie, il y aidait désormais grandement.

Il s'était rendu compte, et ce depuis le début de son apprentissage dans la Cité-même, que malgré un semblant de pacifisme et l'air de ne pas y toucher, son silence était pire qu'une action : Il laissait les autres tuer à sa place, par plaisir pur ou pour se défendre, et voilà ce qui, pendant longtemps, l'avait laissé paralysé par la peur à la vue des combats. Qui ne dit mot consent, dit-on.


"Je peux me défendre, te défendre et défendre tous ceux pour qui j'ai travaillé si dur. Je soigne, même. Je téléporte, je dissimule les auras, je peux augmenter la vitesse. Je ne doute plus de moi. Je suis… utile."

Bien que le ton de sa voix restait parfaitement calme et mesuré, le dernier mot tomba comme un mauvais souvenir que l'on balaie avec cynisme : l'inutilité, frayeur d'antan, avait disparu. Définitivement. Envolée avec le Vent. L'elfe esquissa un sourire très doux, tout autant que son regard, et s'empressa d'ajouter :

"Tu vas sans doute me réprimander, comme les deux autres ; Oui, vous m'aimez, alors je vous suis utile rien qu'en vivant et en vous aimant. Mais passé un certain stade, cela ne suffit plus..."

Car il se souvenait s'être fait, pour la énième fois, enguirlander pour cette histoire. Contente-toi de vivre, cela nous suffit pour être bien, disaient-ils encore au début… Puis ils avaient avoué que l'autonomie prise par Lén les avait déchargé d'un certain poids, et que l'on n'hésiterait plus à lui confier des missions plus dangereuses en sachant que l'on pouvait totalement lui faire confiance… Tout ce qu'il avait souhaité. C'était un but atteint qui l'avait aidé à s'épanouir et à se reprendre en main après une longue traversée du désert : et le voir épanoui, n'était-ce pas là ce qu'ils souhaitaient ? La boucle était bouclée, alors ceci était une bonne chose.
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Eal
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyLun 19 Mai 2008 - 0:20

Sa sœur, cette elfe qui était passée un jour au Dysco, n’était pas revenue dans la citée, laissant ainsi Lén seul. Seul ? Pas réellement en vérité, il avait trouvé refuge chez Trantl-machin-chose, le nom prononcé trop vite n’avait pas marqué la conscience de l’oréade. Ce n’était pas très grave, après tout le plus important c’était de constater que Lén s’était retrouvé sous la coupe de quelqu’un, et avait un abris pour la nuit. Le principal en somme. Et suite aux paroles de son compagnon, le jeune brun en vint même à plaindre l’hôte du solan. Héberger un tel chien était un calvaire réel, surtout quand on constatait le peu de viande que la créature avait sur les os… Même pas rentable la bestiole. Le premier sourire discret s’afficha quand Lén évoqua le lieu où il vivait. Un lieu non charmant, il est vrai que pour l’oréade, l’elfe ne pouvait loger que dans du satin, avec des manières délicates et un peu aseptisés. Alors, oui, il y avait eu du changement durant son absence si l’elfe avait vécu dans un taudis. Le deuxième sourire fut pour ce Trantl-truc qui avait essayé de rôtir la créature. Il devait vraiment avoir faim pour vouloir manger cette saleté.

Son regard déposé droit devant lui, ne le resta pas longtemps, il bifurqua doucement sur le visage de Lén. Un mariage ? Une de ses sœurs s’était donc mariée, malgré la guerre ? Et le petit prince s’était même enivré. Son moment d’arrêt, Eal ne l’avait pas réellement remarqué, lui aussi étant plongé dans ses pensées, n’avançait que suivant la pression de la main de Lén sur la sienne. Quelques instants plus tard, ils arrivèrent aux collines, presque à l’endroit de la première fois. Lâchant la main de l’elfe, Eal mit ses mains dans ses poches et s’avança à la suite du solan, regardant à droite et à gauche le destin des collines. Décidemment… non, rien absolument rien. S’arrêtant un instant, il laissa son regard parcourir cet endroit, son corps sentir la pression du vent, sa peau sentir les rayons de soleil que l’on devinait par moments, mais non, décidément rien…

Durant tout ce temps, loin de la citée, il n’avait fait que se ressasser ce qu’il avait vécu, ses moments en ville, chez Lén, ou dans cet endroit. Et pour lui les retrouvailles avec ce lieu ne pouvaient que bien se passer. Un retour dans un lieu familier, rempli d’émotions et de conneries du genre, mais non, rien, Eal ne ressentait rien. Les collines ne lui avaient manqué d’au début, et maintenant elles pouvaient même brûler qu’il s’en moquerait royalement.
Reposant son attention sur Lén, il le suivit vers « le » lieu. Etait-ce le bon ? Quelle importance ? Ce n’était que de la terre et des herbes non ? Eal prit place à côté de Lén, avec ce sourire calme et un peu de circonstance. Cependant le sourire ne resta pas longtemps et fit place à un fou rire franc. Même plus peur le petit elfe ? Eal pouvait l’amener où il le désirait ? Quoi monsieur n’était plus une loque dans les combats ? Voilà qui était intéressant ! Durant leur séparation, le solan était devenu un homme… enfin! Le regard se fit plus clair, écoutant attentivement l’elfe énoncer ce qu’il s’avait faire à la manière des enfants content de ce qu’il avait appris à l’école. En somme son compagnon savait enfin vivre par ses propres moyens. Et sans nul doute que le jeune elfe avait parcouru les champs de bataille, ce qui était assez positif !

-« …utile… »

Un murmure fin, presque inexistant, utile… En voilà un point qui était souvent revenu avant. Lén voulait être utile, utile à ceux qui comptaient pour lui. Si ce n’était pas mignon tout cela. Souriant doucement, Eal s‘affaissa dans l’herbe, un bras sous sa nuque, les yeux rivés vers le ciel. Utile…
Les paroles de Lén lui firent déposer ses yeux sur ce visage qui lui avait bien trop manqué.
Le réprimander…

-« Tout à fait d’accord avec ton point de vue jeune prince ! »

Être en vie et l’aimer ne suffisait pas ! Loin de là ! Et pour une bonne raison ! Lén était un homme, et lui, Eal, n’était pas son père. Face à certains dangers le jeune solan devait donc se débrouiller tout seul, et avant la guerre, il fallait bien se faire une raison : le jeune elfe n’aurait jamais tenu plus de deux secondes face à des démons. Il n’était alors pas question de le « laisser en vie », mais plutôt de ne pas désavantager ceux qui étaient dans la même équipe. C’est un peu comme avec des gosses dans une troupe, c’est mignon et on les aime plus que tout, mais dans une bataille c’est un fardeau de première catégorie ! Sans oublier le facteur faille, le point faible que les ennemis attaquent en premier.

-« Je ne t’ai jamais emmené dans mes sorties nocturnes avant la guerre, pas pour te préserver, mais bien pour ma propre sécurité. C’est une bonne chose que tu saches te défendre avec force maintenant ! »

Se relevant doucement, Eal passa une main dans ses mèches ébènes avant de sourire à Lén.

-« Tu pourrais même avec les mains pleine de sang, et posséder cette odeur particulière des charniers sur ton corps, que cela me serait égale ! Du moment que maintenant on reste ensemble, ce que tu es devenu, psychopathe sanguinaire ou grand guerrier de la justice je m’en fous ! »

Du moment que cela convenait à Lén, le reste n’était que superficiel. Lui-même n’était pas parfait, loin de là. Très très loin de là. Et ce n’était pas comme si dans ses compagnons et compagnes d’avant il avait trié ceux qui étaient fréquentables et les autres. N’avait-il pas été amoureux d’une vampire oréade à un moment ? Alors bon… Le solan de sa vie, devenu tueur en série, cela ne le dérangeait pas. Cela pourrait même être amusant à vrai dire !

-« C’est maintenant que l’on constate le temps qui s’est écoulé depuis notre séparation, tu as bien changé, même physiquement, pourtant, je sais que Lén, celui dont je suis tombé amoureux est toujours là… dans tes prunelles couleur vert éteint… »

Le regardant un instant, il parcouru pour la énième fois le contour de ce visage connu, ses mèches blanches, son regard moins vivant qu’avant. Oui, il ne pouvait le nier, Lén avait changé, il avait pris plusieurs années en une seule. Un peu comme tous les habitants, la guerre avait fait ses ravages, et cela se voyait…

-« J’imagine que la guerre et ton désir de devenir plus fort ont eu des répercussions sur ton organisme… »

Ne terminant pas sa phrase, l’oréade se recoucha dans l’herbe, dans la même position, les yeux rivés vers ce ciel qui ne l’intéressait plus autant qu’avant. Ce n’était que de l’air après tout, pas de quoi fouetter un chat.

-« Évite de tomber malade en voulant absolument devenir fort…c’est tout… »

Vouloir devenir fort était une bonne chose, mais quand la santé en prenait un coup. Plusieurs raisons pour vouloir devenir fort, Lén le voulait pour être utile, une raison aussi valable qu’une autre et Eal respecterait cela, seulement si Lén ne s’en rendait pas malade. Nombres de gens avaient perdu l’esprit à vouloir devenir le big boss de la terre. Nombres s’étaient plantés suite à cela, une descente aux enfers… Cela, il fallait l'épargner à Lén!
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyLun 19 Mai 2008 - 20:54

"Vraiment ?", "Mais… Avec force ?…" et "Je suis… Ravi de l'entendre", voilà ce que "répondit" l'elfe dans l'ordre aux premières tirades, son enthousiasme allant clairement décrescendo, jusqu'à la vexation même bien qu'il la dissimula avec brio. Pourquoi Eal ne lui avait-il pas dit plus tôt ? Tyrol imagina alors qu'il se serait réveillé à temps, qu'il aurait grandi avant que son oréade ne parte, ainsi l'aurait-il vu et en aurait-il été fier. Mais non, comme toujours, on avait promis de le défendre, et on lui avait demandé de se contenter d'être comme il l'était ; et, comme les deux autres, Eal avouait enfin – pas forcément à lui-même mais bien à l'elfe – que finalement, grandir était mieux pour tout le monde. Oui, il fallait surtout penser aux autres, aux compagnons. Pourquoi ne disaient-ils jamais "tu es un véritable boulet" ? Sans doute pour ne pas faire de peine, sachant que Lén en aurait pleuré pendant des jours ; mais au moins cela avait le mérite de remettre les choses à leur place, et ce à temps. Parfois, Tranlthanas en avait échappé, mais avait été contraint de s'excuser, de prétendre avoir été emporté par l'énervement, de ne pas avoir pensé ses paroles ; alors, inconsciemment, petit elfe l'avait cru et n'avait pas osé se remettre en question seul.

Mais était-ce sa faute si l'on avait prétendu qu'il ne serait jamais un boulet, même si cela était faux ? Etait-ce sa faute si l'on avait voulu le consoler de sa faiblesse – euphémisme, pire ! sa passivité, son incapacité à faire quoi que ce soit ! – en lui octroyant d'autres qualités plus stupides les unes que les autres ? Qui se contente d'un sourire au beau milieu du plus horrible et intense des combats ? Personne, absolument personne. Etait-ce aussi sa faute d'être né de façon si pitoyable ? C'est Tina qui l'avait sauvé alors que le bébé, au moment-même de sa naissance, était déjà promis à la mort ; depuis, c'était une dépendance complète qui s'était établie entre le petit et sa nourrice. Elle avait compris que l'enfant souffrirait pour le restant de sa vie de ses faiblesses physiques et n'entrevoyait pas d'autre solution que de le protéger de tout.

Il avait donc toujours été enfermé, endormi même, dans l'idée qu'il ne saurait jamais rien faire car le fait-même de lever le petit doigt suffirait à le lui fouler… et puis il y avait eu la découverte du don, une bénédiction, une renaissance. Il avait pris confiance en lui !… mais pas assez, pas assez pour résister aux ah ! combien bénis professeurs d'Elament ! Si petit Lén est incapable de créer une tornade, qu'il aille donc mourir dans un coin, il ne saura jamais rien faire de son don, en plus de ne savoir rien faire de son corps.

En vérité, sa seule véritable faute était d'avoir été trop naïf, sur tous les plans. Et c'était déjà une faute de trop.

Les trois dernières phrases achevèrent d'attrister Tyrol, qui appréciait peu de se remémorer tout cela. Et qui dépréciait encore plus qu'on lui parle de ses yeux. Eteints, fades, tristes, voilà tout ce qu'on en disait ? L'elfe avait-il donc perdu à ce point de son âme pour qu'on ne trouve pas à dire qu'ils brillaient, de joie de vivre, de douceur, qu'importe ! Ne souriait-il plus assez ? Il en avait pourtant mal aux zygomatiques, lui qui riait et souriait tant malgré tous les mauvais tours que la vie lui jouait… Il ne savait quoi faire, ne savait pas ce qu'il fallait, à la fin. Il avait abandonné la lutte à l'image. En attendant, afin de couvrir sa honte, Tyrol détourna immédiatement la tête et baissa les yeux pour ne plus avoir à les montrer. Las de ces tiraillements stupides et incessants entre le passé et le présent, il voulut se laisser tomber contre Eal, se blottir dans ses bras pour se consoler ; mais l'oréade se laissait déjà retomber en arrière. L'elfe resta bêtement au-dessus de lui, appuyé sur ses mains, disposées de chaque côté des épaules d'Eal. Il ne bougea plus un instant, le temps qu'on finisse de lui parler, en fait.

Allons bon. L'oréade faisait à présent une fixette sur cette force. Que voyait-il dans ce mot ? Le-psychopathe-tueur-en-série qu'il évoquait plus tôt ? Voilà qui avait une nouvelle fois le don de vexer et de chagriner l'elfe en même temps. Cela était égal à Eal qu'il le soit devenu, merveilleux, mais quelle belle insulte il trouvait là à faire à "son" elfe ! C'était ce qui se disait immédiatement, par raccourci facile et peu pertinent : Lén plus fort = Tyrol psychopathe. Comme s'il avait pris goût au combat, comme s'il les cautionnait, à présent, comme s'il avait déjà tué un ennemi de sa propre main – ce qui n'était toujours pas arrivé - et avait pris goût au sang. Il n'en avait plus peur, point. De là à aimer tout cela, la marge était si grande qu'elle se faisait fossé… Eviter le combat était encore son activité favorite. Il n'était donc ni un tueur sanguinaire, ni un justicier ; oui, il était un lâche, c'était globalement cela. Cela ne changeait donc pas d'avant !

Pour tout reflet de ces discours intérieurs, Tyrol posa simplement sur l'oréade un regard tranquille et plein de douceur en se redressant pour se rasseoir à son côté. Une nouvelle fois, comme la dernière fois qu'ils s'étaient vu, d'ailleurs, l'elfe décida de battre en retraite avec le sourire.


"D'accord", répondit-il tout d'abord à la dernière phrase d'Eal, marquant ensuite une pause pour ajouter finalement : "Si tout cela est ce que tu penses, alors c'est bien. Je suis content que cela te convienne !"

Ce qu'il pensait réellement. Finalement, le fond y était, l'essentiel aussi… Cela allait à Eal. Ils étaient d'accord tous les deux, parfait.

Sur ces mots, il se leva car être assis ne lui plaisait plus, ne lui était pas plus confortable que de rester debout, au final. Il respirait mieux ainsi, son Vent s'affairant autour de lui pour l'aider à prendre l'air au mieux. Les mains croisées dans son dos, il s'étira, puis resta à contempler le ciel, réfléchissant à cette dernière phrase à laquelle il venait de répondre. Il fallait comprendre malade dans le sens de l'obsession, peut-être ; Tyrol ne put s'empêcher de penser aux vraies maladies qui le prenaient dès que l'occasion se présentait. Aux douleurs étranges qu'il ressentait parfois et qui disparaissaient aussi vite qu'elles étaient apparues, mais qui le laissaient inquiet quant à leur signification. Et surtout de penser à quel point il s'était rendu malade pour Eal lui-même. Il avait été malade, mais loin de l'être pour une triviale question de force ! Et à présent, il ne l'était plus car il avait (re)trouvé le remède à sa maladie, qui n'était autre que l'objet-même de celle-ci.

Il se mit à marcher un peu au hasard, les yeux fermés, pensif et rêveur, souriant doucement. Il retira négligemment ses bottes, las de leur présence, et les laissa sur place là où il les avait retirées alors qu'il reprenait sa marche, un petit détour histoire de sentir l'herbe sous ses pieds avant de revenir devant Eal, qu'il avait laissé allongé. S'ennuyait-il ? Etait-il fatigué ? Tyrol n'en savait rien et ne tentait pas de le savoir. Lui respirait à pleins poumons l'atmosphère un peu nostalgique de cet endroit et laissait transparaître dans son sourire tout le bonheur qu'il avait à revenir ici. Toutefois, ce sourire finit par disparaître lentement devant le silence pesant qui s'installait.


"Mes yeux," dit-il alors d'une voix à la fois douce et brisée, dans une esquisse de sourire, "se sont délavés à cause des larmes que j'ai versées pour toi. Et mes cheveux sont devenus blancs à cause de l'immense angoisse que j'ai eue de te perdre à jamais, de perdre ceux que j'aime, de me perdre aussi. J'ai failli mourir. J'ai honte de moi, mais tout ceci est passé. Depuis j'ai changé, certes, mes yeux, mes cheveux, ah ! que c'est stupide ! Mais changé, cela veut tout et rien dire, tu sais…"

Il souriait toujours et aucune larme n'était visible. Il exposait encore, comme un constat, ce qui s'était passé et qui ne changerait plus, et qu'il fallait assumer de toute évidence. Non, cela ne l'attristait plus trop... Cela lui faisait peur parfois, plutôt. Mais il fallait prendre ceci comme le début d'une prise de conscience cruciale pour la suite, bénéfique, essentielle. Donc fallait-il y prendre... Avec philosophie !

"Maintenant, tu es là et je revis complètement, même si quand nous parlons j'ai toujours l'impression de jouer à un jeu dangereux et cruel. Ne me parle plus ni de cette stupide bataille d'Elament, ni de désir de force ; je n'ai pas connu la première et je ne cours pas après la seconde. Et à bien y penser, je me fiche éperdument des deux !"

Il se laissa tomber à genoux sur sa cape toujours au sol, l'air boudeur. Il tendit les bras vers Eal, l'appelant à se redresser pour le rejoindre, implorant plus d'attention. Il consentit à lui donner quelques indices sur la prise de parole, car "ne me parle pas de", d'accord, mais de quoi parlons-nous alors ?

"Rassure-moi à ton propos, prends-moi dans tes bras, dis-moi que tu m'aimes ou traite-moi d'idiot et repousse-moi, qu'en sais-je ! Je ne sais plus quoi te dire et j'ai peur de mon silence."
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Eal
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyMar 20 Mai 2008 - 0:49

Pourquoi ne le lui avait-il pas dis ? Parce qu’il n’y avait pas vu d’intérêt. A ce moment-là, ils n’étaient pas en guerre, et les sorties du soir n’avaient pour but que de permettre un défoulement à l’oréade. Un simple appétit de violence et ce genre de loisir ne valait pas la peine de faire pleurer l’elfe. Voilà pourquoi il ne lui avait rien dis. Il n’avait rien de spéciale à avouer, d’ailleurs si le solan le lui avait demandé, il le lui aurait dis. Seulement Lén n’avait pas posé de questions, il s’était contenté de dire que c’était le bonheur d’Eal qui primait, que son avis n’avait pas d’importance… et bien voilà ! Maintenant Lén avait vu ce que ça donnait d’être trop « soumis ». Eal ne s’excusait que rarement et les évènements qui s’étaient déroulés, n’avaient pas arrangé son caractère.

Les yeux perdus entre deux nuages, son attention retomba pourtant sur son compagnon. Et la tristesse habitait ce corps si souvent aimé de loin. Pourquoi ? En quoi ces paroles le rendait-il triste ? Il l’acceptait comme il était, n’était-ce pas déjà assez ? Il acceptait tout, ce vert qui était bien moins vif que celui qui habitait les yeux de Lén, mais qu’est-ce que ça pouvait faire ? Ils étaient tous les deux réunis maintenant ! Au diable ce Lén aux yeux couleur de prairie! Celui qui existait, celui qui avait survécu, qui était devenu fort, c’était lui là cet elfe aux cheveux de neige ! Cet elfe ! Alors pourquoi était-il triste ?

Content que cela te convienne…

Une rage, une haine, un énervement naquit en lui. Comment ça, si ça lui convenait ? Voilà qu’il recommençait ! Fermant les yeux, Eal serra les poings un instant. À quoi cela aurait-il servi qu’il crie ? Qu’il secoue Lén pour lui dire que s’il y avait bien une chose qu’il ne supporte pas c’était ça ! Tout le corps du solan disait que non, justement il n’était pas d’accord, mais ses lèvres avaient osé prononcer pareille soumission. Horreur et damnation !
La présence de Lén se fit moins forte… Se redressant un peu l’oréade constata que l’elfe partait, un instant son cœur s’arrêta, l’avait-il vexé ? L’avait-il fâché? Mais pourquoi les actions de cet homme étaient-ils si différents de ce qu’il disait ? Pourquoi…
Levant la main pour le rattraper, les mots ne sortirent pas et fatigué, Eal se recoucha finalement. Depuis quand n’avait-il plus envie de lutter réellement ? Lutter pour être vivant ? Depuis quand ? Depuis… Sa main se déposa sur son torse où il devinait plusieurs blessures,… ça ? Ou alors, ce que ses mains avaient fait ? Tous les meurtres, qui tard le soir lui donnaient la nausée et l’empêchaient de dormir ? La main arqua un geste jusqu’à ses lèvres mais s’arrêta bien vite et se redéposa dans l’herbe.

Les yeux fermés, c’est la voix de Lén qui le sortit de ses pensées, rouvrant doucement ses mirettes, c’est un vague sourire qui l’accueillit.
Une explication ? Mais il n’en voulait pas ! Il ne le jugeait pas, il l’acceptait point ! Les lèvres closes, l’oréade écouta attentivement ce que l’elfe prononça, le pourquoi de son état…
Bien avant la guerre, la discussion avait été lancée sur cette tristesse qui pouvait tuer les solans au départ de l’être aimé, et c’est cette même tristesse qui avait failli tué Lén et l’avait laissé ainsi. Décoloré de toute la vie qui transperçait sa peau il y avait de ça plus d’un an.
La deuxième partie des paroles lui tira un sourire léger, voilà ! Lén prononçait enfin ce qu’il voulait réellement ! Pas trop tôt ! On ne parle plus de bataille ? Très bien ! Plus de force ? Si tu veux !

Se redressant, l’oréade observa Lén qui se trouvait maintenant à genoux, près de lui et lui demandait encore plus clairement ce qu’il désirait. De la vie, cette vie qu’Eal avait aussi perdu lors de cette guerre, lors de cet éloignement. Car, en voilà une autre de vérité, Eal était mort à sa manière loin de Lén, et maintenant, le brun ne savait plus comment se comporter. Il n’en avait plus la force. Il se moquait de tout et plus rien n’avait de l’importance à part l’elfe. Mais cela l’avait usé, et reprendre des bonnes habitudes en tant que vivant était une tâche difficile. Un acte, un agissement, autre chose que cette passivité, baissant le regard un moment, Eal laissa Lén un instant sans réponse. Que lui répondre ? Une preuve du fait qu’il était en vie, oui mais quoi ? Les yeux braiser du jeune oréade restèrent un moment dans le vague, et ne bougeaient même pas comme preuve de la recherche de son esprit . Un calme étrange habitait maintenant Eal…

-« Je ne voulais pas te vexer tout à l’heure, juste te dire que le Lén que tu es devenu est tout aussi aimé de ma part, je m’en fous de ce que tu deviens, du moment que tu te sente bien. Je te l’ai déjà dis, je n’aime que toi, à jamais… seulement… »

Le regard dans le vide, il le détourna carrément, loin, très loin, se perdant dans les arbres, devait-il le lui dire ? Cette faiblesse qui le touchait aussi, cette peine qui l’avait affectée plus qu’il ne l’aurait cru, devait-il enfin se rendre compte qu’il…

-« Je ne sais plus comment faire… »

…pour montrer de l’amour.
Trop longtemps, trop loin, le chemin parcouru à son arrivé avait été perdu, Eal était bien plus perturbé et renfermé qu’à son arrivé à Elament. Et l’oréade ne luttait même pas contre ça, il se laissait simplement couler dans des souvenirs qui lui avaient enfermé l’esprit pour que son corps survive. Pourtant, en cet instant s’était la réalité, il devait enfin se réveiller, la volonté y était, mais le brun n’y arrivait pas. Il restait là, passif, les yeux dans le vague la plupart du temps, agissant machinalement. Relevant doucement le regard, il le déposa dans celui vert de l’elfe.

-«… J’ai les mains recouvertes de sang, elles sont tellement sales que je ne veux pas… te salir… »

Un sourire s’esquissa légèrement. Bien sûr qu’il n’avait pas les mains couvertes de sang au propre, mais bien au figuré ! Ce qu’il avait fait là-bas était loin de ce qu’il avait déjà commis avant,ce fut pire, et la guerre ensuite n’avait rien arrangé. Eal connaissait la sensibilité de Lén, il savait qu’il ne supportait pas les récits de « combats », ou plutôt de carnage mais là, ce fut trop, il ne pouvait pas laisser « son » elfe dans le floue, Eal ne voulait pas qu’il pense que l’amour avait disparu, parce que s’il y avait bien une chose de sûr, c’était que l’oréade était fou de Lén. Point.

-« … ce don, ce pouvoir sur les éléments, je l’ai utilisé pour tuer, Lén, tuer, des familles entières, des enfants, des parents, … je… torturer des gens, brûler des maisons,… je… »

Un petit rire discret se fit sur les lèvres du jeune homme, mais plus un rire mélancolique, fataliste, et faussement amusé tandis que son regard se baissa à nouveau.

-« Le pire, c’est que je ne regrette pas, loin de là, mais je ne veux pas que toi tu sois touché par cette crasse qui s’est incrustée dans ma peau, je… Je ne sais pas comment t’aimer en évitant cela, comment passer ma main sur ta peau, quand elle a tué tant de gens… je… »

Calmement, l’oréade déposa précautionneusement son front contre l’épaule de Lén, évitant de se montrer trop lourd, et ainsi empêchant ses yeux de croiser les siens. Le jeune brun avait bien trop peur de ce qu’il pourrait y lire. Lén n’avait pas à s’en faire, Eal resterait avec lui désormais, après tout l’oréade n’avait besoin que du solan au monde, les autres n’étaient que des choses sans attrait. Mais sans le solan à ses côtés, les pires aspects de sa personnalité s’étaient réveillés, laissant ainsi un oréade pur et libre faire des carnages monstrueux. Ainsi, tous les deux avaient besoin l’un de l’autre, ce n’était à ne plus douter, mais même maintenant ?
Après ces aveux communs Lén voudrait-il encore de lui ?
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MessageLe Destin ou le Hasard (Privé - Suite) EmptyMar 20 Mai 2008 - 21:25

Ils avaient été deux à "mourir", cela était clair. Ce n'était pas facile de repartir et pour l'avoir tenté, Tyrol en connaissait la difficulté ; le travail n'était d'ailleurs pas fini. Alors il comprenait un peu l'attitude d'Eal. Se rendre compte de leur situation à eux deux, celle deux esprits en veille qui avaient tant de mal à se connecter de nouveau, lui faisait tout de même du mal.

Il savait pertinemment qu'il ne réagissait jamais vraiment "bien", de par son trop-plein d'hésitation. En parlant déjà, souvent il regrettait d'avance ce qu'il disait. C'était ainsi, et il ne luttait plus ; cela était fatiguant de se contenir ! Mais il ne s'excusait plus ensuite, sauf si le besoin s'en faisait lourdement sentir. Il s'était trop longtemps excusé pour tout et rien et à force il ne savait plus exactement pourquoi ; il attendait désormais d'être sûr. Il prenait certaines choses trop au sérieux, ou inutilement dans un sens de reproche ; c'était de sa faute, mais cela était tout. Empathique comme toujours, il sentit l'énervement qui prenait Eal. Cela aussi était une constante : L'oréade était blessant, l'elfe énervant. C'était une sorte de complémentarité, en fait.

Tyrol n'avait jamais su si leurs accroches avaient pu être constructives sur un plan ou un autre, et, bien franchement, cela ne lui importait plus. Surtout pas dans un moment pareil, qu'il aurait imaginé autre sans doute, mais un moment de retrouvailles tout de même. Voilà pourquoi finalement réclamait-il autre chose que des paroles, au moins différentes des siennes qu'il estimait d'ores et déjà mal placées. Mais trop tard et tant pis !

Oui… C'est compliqué. C'était un jeu de tourne-en-rond-et-en-bourrique ; chacun essayait de faire au mieux, chacun semblait penser la même chose soit qu'être ensemble était le plus important, mais tout était plus tordu, plus complexe. Ils étaient tordus, ils étaient complexes, et ils étaient différent. Peut-être trop. Et surtout toujours plus ou moins insatisfaits. Un couple absolument parfait… Sans ironie aucune (non, vraiment).

Eal ne sembla pas vouloir répondre aux bras que Tyrol lui tendait. Après l'énervement venait autre chose, des paroles, que l'elfe ne tenta aucunement de décrypter comme des "explications"ou des "excuses" similaires aux siennes. Pour l'instant, l'elfe replia les bras, sans cesser de regarder l'oréade, qui, lui, préféra détourner les yeux. Il le laissa parler, tentant de capter son regard lorsqu'il le pouvait, en vain, se rapprochant lentement mais sûrement, centimètre par centimètre… Il paraissait seulement inquiet. Inquiet pour beaucoup de choses mélangées, mais en premier lieu, au milieu d'elles toutes, celles de voir Eal… Démuni. Cela semblait être le mot… A chacun son grand vide, se dit-il avec résignation. A chacun d'y laisser des plumes, dans cette histoire… "L'histoire" de Tyrol était peut-être loin d'être la plus triste – en fait les deux étaient égales – mais elle se manifestait physiquement à cause d'une sensibilité exacerbée toujours traduite aux extrêmes par un corps qui était étranger et incontrôlable pour l'elfe lui-même. Gênant.

Plus gênant encore, les réactions d'Eal face à ses propres paroles, ses sourires, son rire faux, ses hésitations. Etranges réactions peut-être, venant de lui, mais tout à fait compréhensibles. L'elfe laissa faire sans se départir de son air attristé et compatissant, puis, sentant un front se poser contre son épaule, il sourit avec tendresse et entoura de ses bras blancs les épaules de l'oréade. D'une main qu'il ramena dans les cheveux de ce dernier, il pressa un peu plus sa tête contre son cou, sans mot dire pour l'instant. Le contact lui suffisait amplement… Il profitait un peu de la détresse de son compagnon pour obtenir le câlin qu'il souhaitait, mais cela n'avait évidemment rien de cruel, on le devinait. Son cœur, un peu moins tourmenté, trouva dans cette attitude la satisfaction qu'il avait à consoler, à serrer contre lui, à protéger. Car, loin des boucliers, la chose avec laquelle il protégeait encore le mieux était bien le creux de ses bras.

Que dire ? Il avait l'impression d'avoir déjà entendu ce discours, mais pas de la même personne. Un semblant de même signification ; mais l'elfe ne se souvenait plus de ce qu'il avait dit alors, peut-être car justement, la chose était différente, la relation surtout. Que répondre à Eal ? Tyrol posa d'abord un baiser sur ses mèches d'ébène.


"Comment faire ? C'est plutôt simple, il me semble", dit-il ensuite avec douceur.

Il libéra ses mains un temps, le temps en fait de saisir l'oréade par les poignets et de le forcer, fermement, à poser ses mains sur ses hanches (à Tyrol). Et s'il osait les retirer, l'elfe les y poserait autant de fois qu'il le faudrait pour qu'elles y restent, dans un premier temps, même si les hanches étaient séparées des mains par un tissu, et que cela ne comptait pas pour "toucher sa peau". L'elfe saisit délicatement le visage de l'oréade, avec la force tranquille de celui qui ne veut rien brusquer, et le regarda droit dans les yeux, si autoritaire et si doux à la fois.


"Tu m'as touché sans cesse alors que tu avais déjà tué. Tu m'as même fais l'amour ; Que tu ais décimé une ville entière avant ou après cela ne changera rien à ce moment ! J'ai été élevé dans les bras ensanglantés de deux assassins, deux fous dangereux, et pourtant cela m'est égal : Alors… Si tu penses toujours que tuer t'empêches de me toucher, j'irai me salir moi-même dans tes bras, tant pis."

Et Tyrol ne laissa pas d'autre choix à Eal que de se laisser embrasser avec passion. Puis l'une de ses mains se saisit à nouveau d'une de celles de l'oréade, l'amena au haut de son torse, la où sa tunique découvrait sa peau, l'y appuya.

"Ah ! Je suis touché !"

Il éclata de rire et attira tranquillement Eal en arrière, avec lui dans sa chute, comme s'il avait effectivement été touché par une arme terrible, pour l'obliger à se recoucher, le laissant tomber avec lui, à demi-allongé sur son corps mince. Il resta longuement ainsi à regarder l'oréade sans rien dire, simplement souriant avec cette même tendresse – un peu folle sans doute – qui animait ses gestes depuis plusieurs minutes. Soudain calmé, l'elfe repris finalement à mi-voix :

"Ma foi… Je ne suis pas mort." (il soupira d'aise) "En tout cas, ce que tu me dis ne me rassure pas quant à ce qui t'es arrivé. Je te demandais tout à l'heure si l'on t'avais fait du mal… Je crois que j'aurais pu deviner seul, en fait. Eal, le temps nous guérira tous les deux, mais il faudra rester ensemble. D'accord ?"

Le "d'accord" n'était pas réellement une question ouverte, sinon bel et bien une affirmation anticipée. Et rester ensemble incluait le meilleur et le pire, le meilleur du pire et vice-versa ; et si pour cela il fallait apprendre plus, Tyrol le ferait. Il était de toute évidence prêt à tout, il n'était plus à un changement près ! Cela pourrait être amusant. Pour appuyer ses paroles il se contenta de se redresser légèrement sur un coude, juste le temps d'offrir un nouveau baiser à Eal, un baiser si loin et si proche en même temps des premiers qu'il osait à peine donner parfois, partagés entre la réserve et la flamme passionnelle. Le tout en mélange qu'il espérait tout de même agréable.

Et il se laissa sa tête se poser une nouvelle fois dans l'herbe, les yeux fermés.
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