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 Renaissance

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Lysias
Lysias
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MessageRenaissance EmptyMer 26 Mai 2010 - 14:36

[pv]

Spoiler:


Si, quelque mois plus tôt, on avait dit à Lysias qu’Elament avait déménagé sur une île paradisiaque, il aurait probablement ricané, d’un vieux rire âpre. Dans ses jours passés sous silence comme un muet, il se serait vraiment moqué. Paroles en l’air, foutaises. Les habitants de l’Ancienne Cité sont morts, et la ville avec. Des vieux ont péri, résistants, esclaves et jeunes y sont aussi passés. Les démons ont assiégé les ruelles et les ont parsemés de leurs ténèbres, magie ô combien incompatible avec les leurs. Oui, le nymphe en avait éprouvé un certain remord. Se voir privé d’un chez-soi habituel n’est pas vraiment source de plaisir. Et assurément, ni un égoïste, ni un égocentrique n’apprécie se faire piquer son dû sous le nez. Les jours passées à Elament la Ténébreuse, c’était comme être chez soi, mais ne plus l’être en même temps. Et puis au-delà de son chez-lui, il y avait eu Caliel, le séraphin de la renaissance. Tellana. Les résistants dont le sang avait aspergé l’estrade de l’arène. Thalis. La violence sans précédent de la Faux. Les marquages de propriété à même les corps. Et les images des autres jours. Ternes. Sombre mais parfois plus clair, pour prendre un teint grisâtre… ses souvenirs se mélangent dans la tête du nymphe qui parcourt un lopin de paradis. Oui, il avait changé pendant ses mois de captivité.

Si la haine entre deux clans avait emporté tant d’individus sur son passage, pourquoi lui, devait-il vivre à la place de Cal’. Questions philosophiques, questions d’un nymphe qui se donne l’impression d’un vieillard aigri. Sentiment de ne pas avoir fait les choses comme il le fallait. Comme il aurait fallu. Mais s’il avait dû changer quoi que ce soit à ses journées, il ne savait pas plus quel autre choix il aurait pu faire. Le chant des oiseaux résonne dans cette forêt claire et dense à la fois. Pendant un instant, le nymphe se demande si c’est une photographie de ce que pourrait être le paradis. Mais les paradis pourraient être enfer, et enfer le paradis. Tout cela n’a pas de sens, pas plus que ses pensées hasardeuses. Vaporeuses.

Avisant alors le ciel, Lysias fixe d’un regard noir, ces oiseaux aux plumages les plus célestes. Il a l’impression que ces volatiles-là sont en train de se moquer de lui. De se moquer de ses pensées indécises comme s’il avait atterri ici au hasard. Enfin… C’était un peu le cas. Il avait suivi les pas de Ruby, professeur de l’eau à l’ancien Elament. Brusquement, le fait de penser à la Cité en tant que chose révolue l’agace. De toute façon, depuis qu’il est arrivé sur ce monceau de terre –il y a quelques jours-, il a l’impression que c’est un paradis qui se moque de sa personne. Qu’il se réveillera dans une ambiance lourde de ténèbres, comme ce qu’il avait fait la veille d’il y a 3 jours, l’avant-veille et l’avant-avant-veille. Au moins, ce qui ne changeait pas, c’est qu’il était toujours aussi attentif envers sa propre petite personne. Tiens et pour en rajouter une couche, il avait tellement bien choisi son hasard que ce n’était même plus le professeur de l’eau qu’il avait talonné, -si ce n’était que ça. Non, lui, il avait suivi les traces d’une fille –d’une femme-, qui n’était autre que celle qui semblait désormais être à la tête d’une bande de rescapés, de réfugiés, de résistants, enfin, de toute un peuple. La Matriarche. La Dame.

Mais bien sûr Lysias. Fonce toujours tête baissée et pose-toi des questions après. Fais ta tête de mule et vise les conséquences plus tard. Quelles conséquences ? S’il pouvait le savoir, tiens. Alors au final, se trimballait-il lamentablement des regrets, en se plaignant dessus ? Pas tant que ça…

-…Je n’ai aucun regrets, marmonne-t-il d'une voix inaudible, cueillant une jeune pousse, machinalement. Vraiment aucun… puisque je ne regrette rien.

Il avait fait ce qui était en son pouvoir.
Du moins, fait ce qu’il était en mesure de faire, de son possible, à défaut de pouvoir. Et il n’avait pas envie de penser à quoique ce soit d’autre, pas envie de s’y ressasser dessus. Même si au final c’est ce qu’il faisait. En ne regrettant rien, avait-il bien fait les choses. Le bien et le mal… ce sont des sujets pour les grands sages, ça.

Mâchonnant la brindille cueillie, il finit par s’asseoir, là d’un coup, comme s’il venait de trébucher sur un obstacle. Sans raison. On se serait moqué de lui en le voyant. Depuis son arrivée, il lui prenait l’envie d’aller entreprendre tout et n’importe quoi à la fois, puis en cours de route, c’était une motivation fugace qui le désertait subitement. Lui faisant jusqu’à lâcher ce qu’il aurait bien pu porter dans ses mains, que ce soit affaire ou autre breloque. Qu’il paraissait gourd et maladroit au final, ce nymphe venu de nulle part ! Cette fois encore, Lysias en a juste assez de marcher, et il s’affale là, se laissant engloutir par la végétation chatoyante.

Le ciel est clair entre les branches des plus hauts arbres. Lysias ne regrette pas d’être venu sur cette île, Ruby elle-même lui a montré ce qui pourrait être son nouveau refuge. Même temporaire, avait-elle dit. Seulement… cette tranquillité brutale semble être complètement décalée par rapport à ses perceptions. Et il ne s’en sent que plus déboussolé. Depuis quand est ce qu'il a oublié ce que valait une tranquillité sereine? Savourant le gout sucré-acide de la feuille qu’il mordille depuis tout à l’heure, le nymphe observe le ciel légèrement cotonneux.

Il est libre.
Libre.

Lysias ferme les yeux momentanément, repoussant toutes les autres sensations qui lui font l’effet d’une chute interminable. Il se dit que s’il tombait dans ce gouffre, il n’en atteindrait jamais le fond. Alors il s’en détourne. Il devrait d’en éloigner… En rouvrant les yeux, le ciel le nargue, là bas, très haut. Trop haut. Ce sont des nuages qui ne lui ont paru jamais aussi si lointain.

Etrange Liberté.


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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyMer 26 Mai 2010 - 19:44

Le ciel est bleu, les oiseaux chantent, le vent caresse doucement les passants... Ah... un rêve paradisiaque semble avoir remplacé cette réalité. Nul doute qu'ici, les sculpteurs trouveraient leur Galatée, les peintres leur Muse et les poètes leur Inspiration. Le soleil, filant à travers le feuillage touffu de cette forêt, dessinait sur l'herbe molle de bien singuliers dessins, des formes divines ou cauchemardesques, mais ici, qu'importe, toutes étaient des œuvres d'art. Les animaux jouaient dans les branchages et les feuillages, goûtant la vie et croquant les fruits. Sans doute, quelques prédateurs avisent leur proie. Mais qu'importe ici, le cycle de la Nature est beau et pur. Pur, l'eau qui coule dans le ruisseau. Les rayons lumineux qui se reflètent à l'infini dans les gouttelettes et les perles de rosée. Un Jardin des Dieux. Rayonnant de liberté et d'innocence sans aucun doute. Ce lieu semble encore dater de l'époque divine où Terra, Igna, Aqua et Aera n'avaient pas encore créer et modeler les races de nos jours.

... Mais s'il y avait bien un être en ce monde qui n'en avait fichtrement rien à foutre de toute cette poésie, si un être était capable d'ignorer tout ce blabla d'aède, si une créature dans ce monde était bien totalement hermétique à cette peinture de Mère Nature, c'était bien Svada Nir. Rien à foutre, des oiseaux qui chantent. Rien à faire, de l'eau qui ruisselle. Inutile, le soleil qui danse avec les feuilles. Tout ça ne la concernait pas. Pour une bonne raison. Une excellente raison même. Je dirais même plus, l'unique raison. ... Avec tout ça, je n'ai même pas dit de quoi il s'agissait. Eh bien, il semblerait qu'en ce jour béni, du quatorzième jour de la deuxième lunaison de cet été, un jour à marquer d'une pierre blanche... aujourd'hui, oui, chers lecteurs... aujourd'hui c'est...


" Aaah... Enfin un jour de repos. C'était pas trop tôt, nom d'un lézard sans pattes. "

... Oui bon. Elle m'a gâchée mon suspens, Svada, mais en gros oui, c'est cela dont il s'agit. C'était son premier jour de repos. Le jour où on la laisserait tranquille. Sur l'île. Le jour où elle n'aurait pas de passager bipède qui essayerait de lui soutirer une parole. Alors elle s'était décidé à sortir des camps et de la Cité de Nirotitlàn. Non par recherche d'une quelconque liberté, d'espace ou de tout autre chose. Juste... parce qu'elle ne voulait pas rester dans la Cité. Les gens là-haut, ceux qu'elle amenait surtout, ne pouvaient pas s'empêcher. De quoi ? Eh bien de lui sourire pardi ! Une horreur. Totale. Un cauchemar. Tous, ils lui lançaient des "merci" des "bien le bonjour" des "heureux de vous revoir"... Elle n'en demandait pas tant. Non, en fait, elle ne demandait rien. Que dalle. Elle voulait juste qu'on lui foute la paix. Au moins, quand elle était Gardienne à Elament, on la laissait fichtrement tranquille. Maintenant, elle était toujours appelée quelque part. La contrepartie était tout de même intéressante : pouvoir quitter cette île quand elle le souhaitait. Retourner souvent sur le continent... Et puis, on ne lui demandait pas de nouer des relations avec les passagers. En outre, son laconisme était une qualité indéniable ici-bas.

L'araignée passe entre les arbres, et cherche. Quoi ? Trois fois rien. Déjà, un casse-croûte. Un vrai. Un animal frais... Pas les proies qu'elle ramassait dans ses pièges deux jours après. Elle voulait quelque chose de vivant. Vivant. Ses quatre longues paires de pattes avançaient, chacune à leur tour, entre les buissons, se posant là où elles le pouvaient. Ses bras humanoïdes pendaient le long de son buste qu'elle maintenait droit en général. Parce que sinon, ça lui tirait dans le bas du dos. Normal, vu sa physionomie. Ses cheveux noirs corbeau, qu'elle avait finalement coupé un peu depuis le temps, étaient ramenés en arrière et tombaient, cordes sombres juste sur ses épaules. Le trait mince dessinant sa bouche restait aussi plat que l'horizon. Ses cinq yeux - deux paires et le dernier solitaire en haut à gauche - étaient bien entendu toujours aussi noirs. Des globes complètement opaques.

Elle n'avait pas pris son bâton qui lui servait d'arme. Aucune utilité. Danger, ici ? Les dresseurs de nuages avaient fait leur office. Et elle voulait juste manger un petit quelque chose, et faire une sieste à l'ombre d'un arbre, dans un cocon de sa soie. Mais il était temps déjà, de se trouver un repas. Svada repéra deux arbres particulièrement bien placés. Que le hasard faisait bien les choses... Ils étaient presque parfaitement l'un en face de l'autre, une branche tendant vers son opposé. Merci, Nature. L'hybride en fit son affaire : elle grimpa sur l'un des deux arbre jumeau, et commença le processus lui permettant de tisser sa toile : un filament blanc et visqueux, sauf entre ses doigts, s'échappa de l'arrière de son abdomen insectoïde. Elle l'attrapa et le fixa à l'arbre sur lequel elle était. Puis elle entreprit de réaliser le complexe maillage, l'œuvre magistrale que toute araignée faisait par instinct. Cette toile parfaite, dont le secret lui était connu. Elle était grande, mais un oiseau ne pourrait pas la franchir. Et un petit oiseau serait sûrement un succulent repas. L'endroit était dégagée, des volatiles ne devraient pas tarder à passer par là...

Fière de son travail, la Passeuse se plaça derrière un buisson. Et elle attendit. Stoïque, les pattes repliées, son abdomen sur l'herbe douce. Croisant les bras, elle resta parfaitement immobile. ... ... C'était long. Mais au bout d'un certain, le fil très fin encore relié à son abdomen trembla, sonnant l'heure de manger. Prédatrice dans l'âme, elle se jeta sur ce qu'elle venait d'attraper. C'était bien un oiseau. Bien gras, les ailes d'un bleu clair et les plumes blanches, il était sûrement très beau. Un oiseau des dieux, digne d'être dessiné. Digne d'être avalé aussi donc. Calmement, Svada enferma l'animal dans un petit cocon de soie, afin de l'asphyxier. Manquerait plus qu'il se débatte pendant qu'elle le gobe... Tenant son "paquet" bien emballé entre les mains, elle chercha à présent l'endroit idéal pour manger et s'endormir. Elle regardait au loin. Scrutant à travers les feuillages. Le sol était partout pareil ici. Mais soudain, sous une de ses pattes, la terre sembla basculer.

C'était moue et dur, mais ce n'était pas de l'herbe.
C'était chaud, et non pas frais.
ça bougeait.
...
.... ....

L'hybride baisse les yeux et regarde par terre. Elle vit... une tête. Belle sûrement, si elle avait eu le sens de la beauté. Fine, des yeux verts et des cheveux flamboyants. Sa patte droite avant était juste au-dessus de sa tête, tandis que sa deuxième patte droite était posée sur son ventre. Alors c'était donc ça, le truc mou. De fait, juste au-dessus de la tête du truc allongé dans l'herbe, il avait ses pattes atrophiées, remuant spontanément à la jonction de son abdomen d'insecte et de son buste d'humanoïde. L'araignée ne bougea pas immédiatement, pas forcément surprise, surtout ... ennuyée. Pourquoi.

Pourquoi avait-il fallu qu'elle tombe sur quelqu'un ici ? Ici ? Dans la forêt, perdue ? Quel était le pourcentage de chance pour que cela arrive ? Quelque chose dans le monde devait lui en vouloir. A mort. Bon, techniquement, elle avait plutôt marché plutôt qu'était tombée sur quelqu'un. Mais passons. Après un moment de flottement surréaliste - imaginez simplement la scène, et vous pourrez renvoyer Max Ernst au placard ! - la Passeuse se décida finalement à bouger, lentement, du machin. Bon, il était qu'elle donne un nom à ce truc. Un corps. De quoi ? Rien à faire. Elle allait se trouver un arbre, et déguster son oiseau qu'elle sentait inerte dans ses mains. Et soudain, l'arbre idéal surgit. Juste là. Il faisait l'ombre parfaite. Et une branche imposante pendait au-dessus. Le hasard vraiment. Sans mot dire, elle obliqua sur l'arbre, s'installa entre ses racines, l'abdomen par terre, et déballa son paquet. L'oiseau était intacte, il respirait encore, mais il était comateux. Toujours sans rien dire, sans chercher à regarder celui qu'elle venait proprement d'écraser, elle ouvrit sa bouche en grand, laissant ses deux crochets sortirent entièrement, et... goba sa proie. Le spectacle était répugnant. Elle força avec ses mandibules pour faire entrer son repas, on pouvait voir la forme de l'oiseau passer dans sa gorge... Mais heureusement pour elle, un puissant acide dissolvait rapidement ses repas. Elle n'en savait rien en fait, elle avait toujours mangé de cette manière, comme... une araignée.

Elle retira quelques plumes collées à ses mandibules buccales luisantes, et replaça les crochets dans ses joues. Dieux, ce que c'était bon... Et elle ne bougea plus. Ah si, au bout d'un moment, elle daigna jeter un coup d'œil à l'énergumène sur lequel elle avait marché. Quoi ? Il voulait sa photo aussi ? Il n'avait qu'à partir si ça le dérangeait. L'hybride, elle, elle ne bougerait d'un millimètre. Non messieurs. Pas d'un nanomètre. Même pas d'un picomètre. Elle resterait là. Parce que c'était son jour de repos. Amère et voulant pouvoir profiter seule de cette journée, elle parla enfin, ou plutôt croassa presque, quelques plumes encore perdues dans sa gorge :


" Bon qui que tu sois, tu serais gentil de me laisser là. Et puis, on a pas idée de s'allonger comme ça au milieu du chemin... "
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyVen 28 Mai 2010 - 9:38

Et soudain, le paradis s’écroula.
Pas la peine de poser deux fois la question, puisque Lysias sentit bel et bien ce paradis lui écraser l’estomac, d’un coup. Groumph. Il grogna, sous la pression inattendue. Et quand il tente de voir où est ce qu’il est tombé en enfer, un truc sombre lui passe par-dessus la tête. Et là, c’est le bug.




Oui, le bug.
Le bug de la tête, en fait. En même temps… il y a comme des sortes de pattes raccourcies qui gigotent juste au dessus de son nez, et Lysias jure encore que c’est la vision la plus atroce qu’il n’a jamais vu de sa vie. Mais il n’était pas au bout de ses peines. Parce que l’enfer qui venait de l’écraser comme un sale insecte, oui, cet enfer là, ne daignait pas non plus bouger. Allons quoi. Puis, enfin, la chose poursuivit sa route après s’être penchée sur lui. Non mais parce qu’en fait, fallait aussi voir autre chose, au-delà des pattes coupées : un visage. Et pardi, quel visage. A force de voir du démon partout, la vision de Lysias devait avoir envie de quelque fantaisie, comme rajouter quelques paires d’yeux supplémentaire. Mais bien sûr… et si on se réveillait, maintenant ?

Au moins, le seul mérite du passage de la chose, c’était que Lysias n’a assurément plus envie de rester étalé là, et voilà qu’il s’assoit pour suivre d’un regard hébété de merlan-frit, cette espèce de femme-araignée qui venait de l’écrabouiller. Des hybrides, oui il en avait croisé, mais des hybrides insectes, pas vraiment. Et quel choc, tudieu. Désespérément, l’esprit du nymphe tente d’assembler quelque part le buste de la fille, partout autre part que cet abdomen arachnéen dont il a eu la charmante vue en contre-plongée. Il aurait eu une bipède, il aurait rien dit –presque rien dit-, mais là…

Le pire restait à venir : la vision d’un oiseau de paradis bouffé cru par une araignée géante, avec des mandibules et tout et tout, arracha une grimace dégoutée du nymphe. Le spectacle est quelque peu… cru. Violent à voir. Et l’oiseau passa rond à travers son gosier. Non pas que le spectateur improvisé est terrifié, mais il faut avouer que lorsqu’on ne s’attend pas à une telle rencontre, ça… surprend. Pour le moins qu’on puisse dire. Oh oui, il voulait sa photo, bien entendu.

Et l’Araignée se mit à parler.
Faisant sursauter un idiot de nymphe captivé.

-C’est pas comme si j’étais en train de t’accompagner, non plus. Eurk, bon appétit… trouve-t-il le moyen de répondre, déglutissant à la vue des plumes restée collées sur ses mandibules. Il se ressaisit, retirant de son côté, des brindilles emmêlées dans sa chevelure pourpre, sans toutefois quitter la créature du regard. Ce n’est pas non plus comme s’il retirait des plumes comme sa congénère, hein.

-C’est vrai, j’aurais pu aller m’allonger ailleurs, mais… je n’avais plus envie d’aller plus loin. Ce n’est pas de ma faute non plus, hein.

La faute à l’araignée peut être.
Ce n’est assurément jamais de la faute à Lysias, qui, même lorsqu’il a tord, a expressément raison. C’est inscrit dans ses gènes; c'est bien pour ça qu’il est idiot. Soudain, le violent souvenir des étuves où il avait lui-même écrasé une demi-portion lui revint en tête. Oui, mais lui, il n’était pas araignée, à cette époque là. Ni aujourd’hui, certes. Comment passer de nostalgie à hilarité.

Peut être qu’à force de se sentir nargué par les oiseaux célestes, l’hybride avait exhaussé quelque peu ses aspirations informulées… m’enfin, Lysias n’était pas allé jusqu’à songer à tuer ces volatiles non plus.

-Dis-moi. Je peux bien t’observer un petit moment ? C’est que tu es vraiment bizarre.

Non, Lysias, lui, il n’était pas bizarre.
Pas du tout.

-Après, je m’en vais, promis, déclare un nymphe qui n’est justement pas prêt de s’en aller.

Restait à savoir combien durerait ce « après ».

-Et tu fais de la toile aussi ?

Prêt pour un sitting près d’une Araignée ? Parce que Lysias, il est prêt, lui.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyVen 28 Mai 2010 - 18:01

Et c'est qu'il reste là en plus. Planté, ou plutôt enraciné, bûche têtu qui ne veut pas bouger. Et c'est pas de sa faute en plus. Bon certes, Svada pouvait aussi regarder où elle mettait les pattes. Certes. Mais franchement, baisser la tête, devoir vérifier où l'on posait ses pieds... c'était d'un chiant. Alors elle regardait toujours au-dessus, droit devant elle. En l'occurrence, ça n'avait peut-être pas été une bonne idée. Mais qu'importe ? Elle ne lui avait pas perforé le sternum, à première vue. Enfin, avec des bipèdes au corps si frêle, rien n'était moins sûr.

Bon appétit.
Si un jour on lui avait dit que quelqu'un lui souhaiterait "bon appétit", elle se serait sûrement étouffée. De rire peut-être. Ou choquée. Enfin. Le monde était vaste, à ce qu'il paraissait, et dans ce monde, il devait bien avoir des créatures suffisamment... surprenantes - pour ne pas dire bizarres - pour souhaiter un bon appétit à une Araignée gobant un pauvre oiseau innocent. Pourquoi pas. Elle se mit dans la posture qui s'assimiler à une position assise chez elle : le buste penché en arrière - juste un peu -, le bas de son corps - insecte - calé sur le sol, les pattes repliées et remontées, elle croisa les bras, et jeta un regard qui se voulait perplexe à cet individu. Bon, ne nous voilons pas la face, c'était indiscernable. Malgré ses maigres efforts, les expressions faciales n'étaient décidément pas son fort. Mais avec un petit sourire, mince étirement d'un trait horizontal, elle ajouta, moqueuse :


" C'est sûrement la faute au vent alors. "

Elle leva la tête et regarda les feuilles dansantes, remuantes, agitées par une brise douce. Elle pensait qu'il partirait, tout de même. Qui voudrait rester avec Svada ? Franchement, il n'avait rien de mieux à faire ? Cueillir des pissenlits, ramasser des noisettes, jouer de la lyre... N'importe quoi, mais... l'observer ? Etait-elle donc un spécimen de recherche ? Un objet d'étude peut-être ? Elle n'eut même pas le temps de répondre tiens. Pourtant, elle l'aurait bien renvoyer sur les roses. Bizarre ? Elle ? Il s'était vu, lui, avec ses deux espèces de pattes toutes fines, ses sortes de brindilles ridiculement... peu nombreuses ? Et ses yeux blancs et verts ? Ses dents blanches ? Dans le genre étrange, il arrivait à égalité avec tout les humanoïdes. Elle darda ses yeux sur lui, voulut ouvrir sa bouche, mais il recommença à parler. Et qu'il allait partir... Et qu'il voulait savoir si...

... si elle savait tisser ? ... Vague souvenir lointain, de longtemps, si longtemps. Avant la Perte. Avant. D'une jeune fille. Si jeune. Qui voulait être grande. Qui voulait se battre. Qui était morte en se battant. Coralline. Cette enfant impétueuse et curieuse, qui lui avait demandée, elle aussi, si elle savait faire de la toile. Une toile de rêve. Cette pauvre nymphe aqua, tuée par cette démone que les démons nomment Faux. On en entendait parler, encore, de cette démone. Ils l'appelaient Général aujourd'hui. On disait qu'elle était sur le front, au combat contre les résistants de la Forteresse. Elle était bien placée pour le savoir, puisqu'elle avait amené cette nouvelle - certes un peu tard - au Chef. Mais rien que de penser à cet elfe, ça lui faisait remuer ses pattes. Nom d'un... Quel goujat tout de même. Et dire qu'il prenait un malin plaisir à la faire attendre, à la faire poireauter pendant des heures. Le... Rah, ce drow de malheur. Mais aujourd'hui, c'était son jour de repos. Elle n'aurait pas à citer de noms de disparus, d'arrivés, de démons, des chiffres, des remerciements, des demandes et tout le tralala habituel. Re-pos.


" Bizarre ? Moi, bizarre ? Pff de la part d'un bipède aussi maigrichon, ce doit être une farce. " Elle continua à marmonner : " Bizarre ... On aura tout entendu ! " Elle secoua la tête, et resta muette encore un peu. Elle était censée répondre à sa question. Mais, comment dire ? ça l'ennuyait terriblement. C'était une question qu'elle espérait ne plus recevoir. Les êtres curieux s'étaient raréfiés avec la Perte. Pourquoi avait-il fallu qu'elle tombe sur le dernier représentant de cette espèce ? Elle finit par tourner à nouveau sa tête dans sa direction, décidée tout de même, à répondre. " J'ai l'air de quoi, dis moi ? ... Une Araignée, non ? Tu connais beaucoup d'araignée qui ne savent pas faire de toile, toi ? Bien sûr que je peux. "

Au final, elle ne pourrait peut-être pas dormir aujourd'hui. Cette idée commençait à s'imposer à son esprit, puisque le jeune homme semblait décider à rester là. Il était sûrement plus têtu qu'elle en fait. Jamais elle ne l'avait vu, lui semblait-il. Jamais, elle ne l'avait amené. Même si sa mémoire lui jouait souvent des tours, et qu'elle ne faisait pas vraiment attention à ce genre de "détails", sa tête ne lui revenait pas. Vraiment, non. Et aujourd'hui, elle n'était pas d'humeur à faire une belle connaissance dans une franche camaraderie. Elle se sentait irritée, simplement à cause de ces allers et retours incessants. Elle avait juré de le faire. Et elle le ferait. Mais elle le ferait de mauvais poil. Non pas qu'elle ne veuille pas être Passeuse, juste qu'elle serait une Passeuse susceptible et laconique. Et ça, elle ne le cachait pas.

Avant qu'il ne puisse ajouter quoi que ce soit, elle continua, sur un ton où perçait une pointe de sarcasme :


" Et avant que tu demandes : oui, j'ai un venin; non, je ne peux pas fermer mes yeux; et oui, j'arrive très bien à marcher, merci. "

C'étaient les questions banales qu'on lui posait. Bon. Il pouvait partir maintenant, non ? Si ça continuait, elle sentait qu'elle allait elle aussi se montrer curieuse. Mais c'était bien normal : quelque chose chez cet énergumène lui semblait... étrange. Son attitude, ses yeux peut-être ? son regard... Il n'avait pas l'air... comment expliquer ? Plus personne n'était vraiment heureux et joyeux au fond, après cette défaite amère. Mais lui, il avait ce quelque chose de dérangeant qui ne lui revenait pas. Elle sentait les poils de ses pattes se hérisser naturellement. C'était comme un phénomène de répulsion instinctif, qui n'avait aucun rapport avec les éléments ou quoi que ce soit de magique. Ni une aura ou des choses similaires. C'était... une vague sensation, un pressentiment. Une idée naissante, impossible un saisir. Svada n'essayait pas de saisir ce genre d'idées volatiles. Non, l'hybride se fiait à son instinct premier. Et en ce moment il lui disait quelque chose comme...

" Peuh, ça sent... comme la magie des démons ici. "

Rien de plus, rien de moins. Mais ça venait sûrement d'elle-même. A force de voyager sur le continent, elle avait croisé quelques démons - mineurs pour la plupart, heureusement pour elle - et dû se battre un peu. Pas de quoi en faire tout une histoire. Mais tout de même, que cette odeur la suive jusqu'ici. Bah. Plus rien ne l'étonnait dans ce monde étrange et bizarre. Et ça n'avait rien d'olfactif. C'était purement du domaine de la sensation. Donc totalement subjectif. Si ça trouve, c'était une illusion qu'elle se faisait à elle-même. Étrange et bizarre, oui, vraiment...

Étrange et bizarre, comme les deux élémentalistes assis dans l'herbe.
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyDim 30 Mai 2010 - 7:21

-Ah, ne me parle pas de vent, de toute façon, c’est toujours de sa faute, approuve Lysias, s’étirant les bras comme s’il venait de se réveiller. Un léger murmure s’élève quelque part en guise de moquerie, avant de disparaître comme il est apparu. Quant au nymphe, il n’en revient toujours pas de cette hybride. Alors qu’elle s’agace de sa présence, il continue à la détailler sans retenue, pour assouvir cette curiosité non feinte. Mince quoi.

-…Bipède maigrichon ?

Il avait répété la chose, sourcils haussés, jetant un coup d’œil sur sa constitution. Comme s’il ne s’était jamais vu en tant que tel puisque monsieur ne se remet pas en question. Soit.

-Et pourquoi pas ! Je suis bien un Aera qui ne fait pas d’air.

Evidemment, faut-il qu’il ramène l’exemple à son cas, - qui, au passage, est singulièrement tordu. Ah, mes des questions les plus banales que tout le monde pose, oui, Lysias en a encore plein le stock. D’ailleurs, si tout le monde les posait, il pouvait bien le faire aussi, non ? Borné et sans le souci de déranger autrui, il est sur le point de demander si elle est venimeuse, si elle s’en sort avec ses pattes, et si elle ferme aussi les yeux. Mais c’est une hybride qui anticipe déjà cette rafale de questions, frustrant presque le nymphe piqué de curiosité. Au moins l’Araignée avait le mérite de lui faire oublier momentanément ses instants de vieux sage aguerri, torturé par ses pensées les plus métaphysiques.

-Non, mais j’ai une autre question ! Les mini-pattes que t’as, tu sais, sous... sous ton abdomen, enfin. A quoi elles servent puisque t’en a déjà des plus longues ?

Et toi Lysias, on t’en pose des questions ?
Et toi alors, pourquoi t’as les cheveux pourpre couleur sang ? Pourquoi tes bras, ils sont plus haut que tes jambes ! Nom d’un chien. C’est qu’il est vraiment borné ce nymphe. Alors qu’il en attend la réponse, l’hybride lâche une phrase, ou un mot qui le fait réagir au quart de tour. D’emblée, Lysias fait volte face, debout sur ses qui-vive, s’attendant à faire face à un démon. Réflexe.
Immobile, il fait le tour de lui-même, vérifiant ce que son périmètre lui permet de détecter, c'est-à-dire pas grand-chose de potentiellement dangereux après elle et… lui. Pourtant, son instinct de survie l’empêche de se reposer sur ses lauriers et son corps persiste à rester aussi tendu qu’en situation de face à face à un être de l’obscurité. Pas vraiment poussé par la peur, mais si c’était vraiment le cas, il ne souhaitait pas mourir allongé, une tige de feuille à la lèvre. Pendant un instant, le nymphe oublie l’araignée, scrutant encore tous les recoins possibles, tentant de percevoir comme une odeur ou un bruit quelconque. Le cœur battant, prêt à pousser son corps à réagir à tout moment.



Mais le mal ne vient pas.

-Il n’y a pas de magie de l’obscurité, du moins, pas ici, fait enfin Lysias du bout des lèvres. Il se tourne enfin vers l’hybride, le regard noir.

L’odeur des Ténèbres, il la connait et il la reconnaîtrait entre mille autres odeurs. Non, il ne s’y tromperait pas. Il ne le pourrait. La tension mobilisée à son summum, l’aera s’assied, contre un tronc d’arbre, non loin de là. Poussant un soupir de soulagement intérieurement. Levant le regard au ciel, d’autres volatiles s’amusent, paisiblement. La hauteur lui paraît être une échappatoire. S’il avait des ailes, Lysias resterait probablement dans les airs, sur des hauteurs les plus inaccessibles. Au moins le temps de reconstruire son chemin.

Ruby était là. Elle l’était encore, du moins.
Mais il n’y avait qu’elle qu’il pouvait prétendre connaître dans ce dédalle d’esprits marqués par l’Assaut. Ou lui-même ne pouvait se montrer d’un réconfort quelconque, pour être aujourd’hui encore, incapable de s’en démarquer. Même s’il est encore là, en vie. Même s’il n’a pipé mot sur ses jours antérieurs. Même si tout un tas de choses que Lysias garde pour lui, à défaut de ne jamais avoir pris l’habitude de partager, d’échanger. C’est un égoïste jusqu’au bout des orteils, oui. Un idiot d’égoïste. Au fond, c’est avec incertitude qu’il s’est lancé sur les pas de La Dame. Un jour, tôt ou tard, que ce soit demain ou dans un an, elle l’abandonnerait. Et il serait alors prêt ou non, à faire face à ses propres perspectives. Lysias reste persuadé que la vie n’est faite que d’infidélités, avec des clans étranges qui se renient les uns des autres. Avec des géniteurs qui laissent leurs progénitures à la dérive du hasard. Des proches, des prétendus amis qui finissent par vous poignarder le dos. Thanis. Les démons contre les élémentalistes, les élémentalistes contre les démons. Trahison, haine. Finalement, Lysias est bel et bien un nymphe dans l’âme ; de toute façon, il ne pourrait être autre chose. Il ricane, revenant sur l’Araignée.

-Tu es un peu folle aussi, toi. J’ai failli y croire, lâche-t-il, calmement.

Lui aussi, doit être un tantinet déraisonné, pour réagir ainsi. Bah, juste un tantinet, pourrait-il concéder.

-C’est moi qui doit te donner une vague impression de ténèbres, continue-t-il, l’air plus sombre. –Haha, si je suis un démon refoulé ? Non. Je viens de parmi l’Obscurité.

Je viens de là où la Cité a été détruite. Et ce n’est ni une odeur, ni une couleur.
Mais bel et bien une sensation, un vieux rappel de Ténèbres. Tout simplement parce que Lysias en est imprégné.

[b]–Si des êtres de Là-bas il y a, tu pourras bien me montrer comment tu tisses ta toile,/b] rajoute-t-il, l’air pas plus amusé.

Les démons ne le font plus rire.
Ni à personne d’autre.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyDim 30 Mai 2010 - 18:52

" A faire parler les bipèdes maigrichons trop curieux pardi ! "

C'est-à-dire à rien. Oui vraiment. C'était comme ses yeux là. Ils ne servaient strictement à rien. Éventuellement, à décorer. Point barre. Mais elle était encore en train de méditer sa phrase. Un aera... sans air ? ... Dans un sens, c'était surprenant bien sûr. Ne pas pouvoir utiliser son "don". Mais en même temps, Svada n'en avait cure, elle-même utilisant si peu son pouvoir sur la terre et les plantes qu'il fallait en général qu'elle précise bien qu'elle était une terra. Mais elle n'eut guère le temps d'ailleurs, d'approfondir la question, car sa petite réflexion sur la magie démoniaque avait suffi à le faire se lever, à le mettre en éveil. Tendu, il sondait les bois de ses yeux, guettant une présence. Perplexe et à la fois amusée, l'hybride pencha sa tête sur le côté, avec un petit sourire. Qu'avait-il donc ? Elle s'amusa de sa méfiance. Il était sur l'île, pourquoi s'inquiéter ? Ici, pas de démons. Au pire, on risque de se faire tuer par la magie trop importante, mais les dresseurs de Nuage ont bien travaillé. L'endroit est devenu sauf. Et lui, il semblait terrorisé à l'idée d'une menace imminente. Sous son regard noir et la conclusion de son tour de garde, l'araignée ne put résister : elle éclata de rire. Un brin grinçant, mais cela faisait longtemps qu'elle n'avait ri.

" Ohlala... Mais il n'y a aucun démon ici. S'il y en avait, je serais au courant tout de même ! "

Oui, parce qu'à force de faire l'ambassadrice avec la Forteresse, elle était mise au courant, au même titre qu'un père de la Résistance, de toute nouvelle importante. Là, elle s'en amusait. Aucun démon ne pouvait venir ici. Que ce soit les courants ou la magie qui circulait sur cette terre, aucun démon ne pouvait s'y aventurer... Mais ce discours tenu par monsieur tout le monde lui semblait un brin... comment dire ? Il avait un air de déjà-vu. Ne disait-on pas qu'Elament était le dernier vrai refuge des élémentalistes ? Un refuge qu'ils avaient dû fuir en courant ? ...

Et il la traite de folle, en plus ? C'est l'hôpital qui se fout de la charité ici ou quoi ? Elle ne lui avait pas demander de la croire. Ni de l'écouter. Ni de rester. Non mais. Et puis... "failli" y croire. C'était un peu fort tout de même. Enfin, elle aurait bien aimé lui dire quelque chose dans le genre, à ce bipède tout frêle. Mais sa phrase suivante la laissa encore plus perplexe. Lui, des ténèbres ? Venir de l'obscurité ? ... Laissez moi vous dire un truc : les métaphores et autre machin stylistique dégénéré, Svada n'y comprenait goutte. Elle ne comprit le sens de sa phrase qu'avec la suivante. Las-bas ... Les démons ? Pourquoi parler avec tant de ... de... détournement ?! C'était à n'y rien comprendre. Des démons, c'étaient des démons. Point barre. Enfin, Svada était tellement habituée à délivrer des messages d'une originalité digne d'un nain ivre que les sens cachés, l'implicite, tout ça, ça lui passait au-dessus de la tête. Mais alors très loin au-dessus.

Il est si sérieux soudain. En même temps elle s'en fiche. En même temps, c'est triste de dire ça. Il était donc un prisonnier ? Un captif ? Et il s'est enfui ? Elle essaie de prendre un sourire plus doux. Vaguement apaisant. Si si, elle a fait des efforts.


" Tu as donc pu quitter Elament la Sombre... J'imagine que je devrais te féliciter, ou quelque chose dans le genre alors... "
Elle retira les mèches de ses cheveux noirs qui tombaient sur ses yeux, et enleva une dernière plume restée collée à une mandibule. " Mais en fait, ça ne m'étonne pas. Tu as sûrement pu profiter de l'agitation de ces derniers temps dans leur "Palais", non ? ... J'imagine que ça te fera plaisir d'entendre ça, et tu m'as exceptionnellement mise d'humeur joyeuse. "

C'était vrai ça. Il l'avait bien amusée, et Svada, malgré son laconisme envers les inconnus, avait toujours eu cette humour décalée, ce cynisme étrange, ces sarcasmes sortis d'on ne savaient où. Elle voyait bien que ce personnage assis non loin d'elle avait l'air... mal. Disons le franchement, il avait l'air carrément à côté de ses pompes. Très loin même. Très très loin. Elle prit son ton monocorde qui lui servait pour réciter les informations, un ton neutre, d'ailleurs, elle ne faisait jamais de commentaire dans ses rapports.


" Les démons ont lancé une offensive sur les refuges du continent. Ils sont dirigés par trois Généraux : Rizeï, Kaomael et Sappho. " Cependant, sa neutralité disparut, et un sourire mesquin prit sa place. La suite était vraiment une bonne nouvelle pour les élémentalistes. " D'après les premiers rapports des combattants, il semblerait que leur Général Faux soit blessée ou malade... Enfin, c'est une rumeur. Mais tout ce qui peut faire pencher la balance du côté des élémentaliste est parait-il, bon à prendre. "

Elle haussa les épaules. Bien sûr, retrouver la Cité serait bien. Mais enfin, son statut de Passeuse lui plaisait bien tout de même. Même si c'était fatiguant, d'un ennui mortel... Elle se déplaçait. Et une araignée, ça avait besoin de se dégourdir les pattes.


" En tout cas, d'après ce qu'on dit, cette démone mérite bien la mort. Comme tous d'ailleurs. Mais récemment, elle a été la cible de nombreuses missions... Vu la haine de certains, je ne pense pas que ce Général fasse long feu. "

N'importe quel élémentaliste trouvait matière à se sentir heureux de ce genre de nouvelle. Au fond, Svada s'en fichait un peu, comme de tout. Il n'y a pas si longtemps, elle ressentait une véritable haine envers les démons qui lui avaient retirée ses frères. Mais au final, elle s'était rendue compte que la barbarie n'était pas exclusive aux êtres du sous-sol. Mais peut-être était-il temps de revenir à un sujet plus simple ? Peut-être était-il temps de se présenter. Après tout ce qu'elle venait de dire, ça faisait un peu tache, mais bon.


" Mais je m'égare. Je suis Svada, Passeuse de cette Île. Et je te tisserai la toile de tes rêves un de ces jours. Peut-être. Si je veux. "
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyDim 30 Mai 2010 - 23:08

Lysias ne peut s’empêcher de s’amuser de la rigidité de cette hybride. Sarcastique. Terre à terre. Il l’avait entendu rire de sa réaction, mais qu’elle le fasse ou non, il aurait agi de même. Dans un autre contexte, il aurait regardé l’Araignée rire, pour pouvoir prétendre un jour, haut et fort, avoir vu une araignée rire. Et quel rire ! Mais à cet instant là, son attention s’acharne plus à trouver du Démon plutôt qu’autre chose. Dommage.

Il finit néanmoins par se détendre. L’air plus sobre que ce qu’il a l’impression de donner. Il ne sait pas ; il ne s’est jamais vraiment vu agir, d’un regard extérieur. Et le nymphe se fiche d’être compris ou non. Sur le coup, il ne verra même pas le ton plus adouci de l’hybride.

-Me féliciter ? Peuh ! Je ne vois pas en quel honneur, vraiment.

Il a adopté une expression dédaigneuse, sans en rajouter davantage. Dédaigneux, comme si, ni l’un ni l’autre ne parlait de la même chose. Haussant des épaules, il la regarde retirer une plume de sa mandibule. Tiraillé entre l’envie de repousser le sujet qui blesse et celle de continuer son observation promise. (Haha je suis aussi ravi que toi d’être passé sous tes pattes. On se la refait ?) C’est qu’il devait avoir, quelque part, un sarcasme proche de celui de Svada. Bien que celui de cette dernière est quand même plus marqué que le sien. Au moins, elle le fascine, par sa façon d’être.
Et c’est déjà bien.

L’écoutant à moitié raconter des informations qui ne le concerne pas, Lysias maltraite une brindille, les yeux rivés sur cette dernière. L’Araignée lui parle d’un ton aussi plat que possible, et à l’en voir, son interlocuteur a l’air aussi intéressé qu’elle. C’est, -en partie-, des bruits qu’il sait déjà. Ainsi donc Sappho n’est pas encore guérie des coups. Des coups qu’elle a reçu pour lui. Il finit par s’allonger à plat ventre, jouant encore avec le bourgeon de fleur tranquille. Il n’a pas réussi à voir la guérison de toutes ses plaies avant de partir. Sappho avait été stupide de former sa porte, soi-disant inoffensive ; parce qu’au final, Lysias se sentait bel et bien offensé d’avoir été forcé de passer au travers sans retour possible. Sans avoir son mot à dire. Il s’accoude au sol, et observe par-dessus l’herbe folle, l’Hybride prétendre qu’elle mérite la mort.

-Et toi, tu crois à tout ce qu’on dit ?

Revenant ensuite à la fleur non close, il continue à lui donner des coups, du bout de l’index. Pensif.
Il se fiche de la réponse qu’il peut obtenir. Probablement qu’elle n’en n’a elle non plus, rien à cirer.
La seule chose qui le travaille à ce moment, c’est le désagréable sentiment d’avoir fait les choses à demi, en pensant à la Faux. Et lorsqu’il y pense, il n’aime pas non plus réaliser que ces mois durant, il s’est retrouvé dans un état aphone, passif de tout évènement. Incapable de coordonner réalité et son lui-même. Comme si la vie après Caliel avait subi un décalage, le temps de revenir à la normale. En somme, comme deux cordes d’un instrument mal accordé.

-En tout cas, je ne crois pas qu’elle mérite la mort, badine-t-il, aussi simplement que s’il parlait du ciel et du beau temps. Alors que nombre d’élémentalistes n’auraient qu’ardemment souhaité sa mort. Devrait-il cueillir ce jeune bourgeon devant lui ? Ne pas lui permettre de voir un lendemain ? Haha. C’est Tyrol qui disait ça. Tyrol… est-il là. Lysias soupire.

Il laisse la brindille tranquille, suivant du regard une minuscule araignée entre deux herbes, qui tisse sa toile. Elle ressemble un peu à Svada en miniature. Sauf que Svada n’a pas encore tissé.

Quelle insouciance.

-Moi j’aime bien Sappho.

Lysias ne se rend compte de rien, ni de la rancœur que cette dernière pourrait placer envers lui, à cet instant. De toute façon, il l’aime bien quand même. A force… depuis cette période d’avant guerre jusqu’à aujourd’hui, il ne pouvait quand même pas la considérer comme une inconnue. A son arrivée sur cette ile, la première chose qu’il a fait, c’est d’enterrer quelque part, la cape et tout ce qu’il portait sur lui, sous terre. Comme pour oublier. Comme pour conserver. Les seules choses qu’il lui reste à défaut d’avoir bêtement trébuché sur une perle. Lysias laisse finalement tomber la petite araignée, pour s’assoir en tailleur. C’est qu’il n’est plus d’humeur à rester vraiment en place. Son regard vient se poser sur l’hybride, accompagné d’un grand sourire paisible.

-Haha ! Je ne pense pas qu’elle ne clamsera pas de sitôt, …ne serait ce que pour l’avoir vu de mes deux yeux !

Quelle bonne blague.
La faux mourir ? Lysias n’y pense même pas, tellement que cette vérité probable lui semble lointaine. Il ne l’envisage simplement pas. D’un air espiègle, il se relève, s’approchant de la Passeuse, pour lui enserrer une patte. Il aurait pu certes serrer la main de cette dernière, mais la patte, ça en jette.
Quel comique spectacle.

-Content de m’être fait écrasé par une Passeuse.

En gros, enchanté.
Et puis non mais franchement, Passeuse, quel étrange statut.

-C’est quoi que t’appelles la toile de mes rêves ? Parce que bon, si c’est pour m’emprisonner dedans et te concocter un nouveau repas comme le piaf… M’enfin. Tu peux m’appeler Lysias, et hm… moi je suis sans statut, se présente-t-il, pensif. Jusqu’à présent, j’ai été déclaré comme l’esclave de Sappho… chose qu’il ne dira pas. A quoi bon le dire.

Lysias, esclave.
On pourrait en rire, en pleurer de rire, mais il jamais elle ne traita comme tel, et jamais il eu l’impression d’être le même esclave qu’un autre. Et c’était vrai. Captif aura été le mot le plus approprié. Comme un oiseau en cage, qui ne manque de rien. Et les autres détenus dans les palais, tueraient pour pouvoir mériter son sort, ô combien préférable.

Et de son côté.
Que peut-être elle en train de faire.
Probablement en train de bien se débrouiller. Comme elle a toujours su le faire. Ou se laisser emporter par ses instincts. Comme de par la nature même de ce qu’elle est. Lysias l’ignore.

-Dis. Tu me parles de cette Nuit ? Tu sais, celle où Elament est tombée. Tu y étais ?
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyLun 31 Mai 2010 - 20:43

" Je ne crois qu'à ce que je vois... Et je dois bien avouer que j'y vois de moins en moins bien. "

N'y voyez rien de philosophique. C'était purement terre à terre. Sa vue baissait assez vite, et le monde autour d'elle, qui ne lui avait jamais paru vraiment clair, lui semblait de plus en plus sombre. Comme une ancienne peinture dont les bords étaient grignotés par des insectes jour après jour. Jour après jour, son champ de vision se rétrécissait. Elle ne savait pas pourquoi. Ni quelle était l'origine de ce phénomène. Ce serait tout de même drôle, dans un sens. Elle terminerait aveugle, avec cinq yeux ? Ah, si ce n'était pas de l'ironie cruelle, ça...

Mais quelle étrange réflexion il lui faisait après. Elle ne mérite pas la mort ? C'était bien la première fois qu'elle entendait ça. Il y avait sûrement des démons ici-bas qui ne méritaient pas la mort, peut-être certains, oui peut-être, certains n'étaient-ils pas moins... démoniaques ? Mais cette Sappho n'était pas n'importe quelle démone. C'était un Général, qui avait commis autant de crimes que leur Haut-Roi de pacotille. C'étaient des monstres, aux yeux rouges et aux dents pointues... Bah, qui croyait vraiment à ces sornettes ? Les enfants apeurés au fond de leur lit ? Les élémentalistes pleins de rages qui se voilaient la face ? Svada n'était pas née de la dernière pluie. Et malgré sa vie courte proportionnellement à toutes races traversant les siècles, elle ne croyait pas au mythe du "tout blanc" et du "tout noir". La vie était grise. Il y avait plusieurs nuances, certes, mais personne n'était totalement pur ou corrompu, si l'on pouvait dire.

Alors malgré ce qu'elle avait pu entendre, tout les rapports qu'elle avait fait, même si cette succube lui avait retirée l'une des rares connaissances qu'elle avait eu, Svada ne pouvait plus détester personne. Il y avait suffisamment de malheurs dans la vie, assez de bonheur aussi, pour ne pas tout gâcher en se morfondant dans une haine sans but aucun. Mais enfin, il y avait une limite. Ce qu'elle entendit ensuite, elle eut du mal à le comprendre. Elle n'était pas sûre d'avoir bien compris. Qu'il ne veuille pas la mort des démons, c'était compréhensible dans une certaine mesure. Mais... qu'il aime bien Sappho. Et puis... non, c'était étrange, la façon il parlait de ça. C'était bien étrange pour elle. Elle eut un petit rire mi amusé mi triste. Il y avait une limite à l'ouverture d'esprit d'une hybride.


" J'aurais bien du mal à bien l'aimer comme tu dis. Vois-tu, elle a fait disparaitre de cette terre une jeune amie à moi. "


Nul reproche dans sa voix, nul amertume. Juste du cynisme. Elle était peinée de la mort de Coralline, mais elle n'avait jamais versé une larme, pour personne d'ailleurs, puisqu'elle en était bien incapable. Elle n'aimait pas se morfondre en tout cas. Et il s'assied lui, avec un beau sourire sur son beau visage. Alors que ce qu'il dit signe l'arrêt de morts de certains combattants du continent. Mais elle ne put que sourire en réponse à son sourire. Car elle ne savait pas quoi répondre à ça. Il avait vu qu'il disait. Il avait vu Sappho. Mais enfin, il se lève et... lui attrape une patte. Peut-être cela vous étonnera-t-il, ou pas, mais c'est bien la première fois de toute sa vie d'araignée que quelqu'un touche ses pattes atrophiées. Si elle avait pu écarquiller les yeux, elle l'aurait fait. Au lieu de cela, elle commença à ouvrir la bouche, peut-être pour dire quelque chose, mais à la place de paroles, ce furent ses mandibules qui sortirent, réflexe malheureux à cette étrange sensation sur ses pattes.

Elle reprit cependant le contrôle de son instinct, et rentra ses mandibules en secouant doucement la tête. Elle ajouta, malicieuse :


" Contente d'avoir écrasé un ami de Sappho. "

Ahah
Très drôle.


" Lysias le sans statut ? Eh bien sache que tu es juste un petit peu trop maigrichon pour que je te mange. "
Elle leva la main et délimita un petit espace entre son pouce et son index. " Mais juste un peu. " Elle continua sur sa lancer, en posant une main sur sa hanche : " Et la toile de tes rêves elle est juste... " Elle pointa du doigt le front de l'Aera. " là. "

Elle retira sa main avec ce même sourire vague, amusé tout en étant un peu moqueur. Il était difficile d'exprimer d'autres choses avec son visage figé, mais c'était tout de même un pari pour elle que de se forcer à user de ses muscles faciaux. Elle soupira en pensant à cette Nuit. Elle n'avait pas fait grand chose, cette nuit-là. La Nuit de la Perte. Non, elle avait protégé quelques personnes pour s'enfuir, elle avait fait son travail en somme, mais elle avait bien vu que l'espoir était inexistant à ce moment. Elle sembla ainsi perdue dans ses pensées, à la recherche de bribes de souvenirs pour raconter cette Nuit là. Elle chercha la phrase exacte. Les mots justes dans son vocabulaire cynique. Quand elle parla, son ton était apaisé. Pourquoi se montrerait-elle colérique pour parler de cette défaite ? Après tout... regretter une victoire, c'était sûrement la pire mélancolie qui soit.

" Oui... Oui j'étais là. " Elle s'arrêta encore, comme si sa réponse était déjà faite, puis elle le regarda dans les yeux. Globes noirs plongés dans deux océans verts. " A l'époque, j'étais Gardienne. " Elle fit une nouvelle pause, rassemblant ses souvenirs. " Il me semble qu'on avait repéré des feux dans la forêt et qu'un Gardien y avait été envoyé. Ce fut la nuit suivante que les démons prirent la Cité. Je n'ai pas vu le début des combats, je dormais. Une fois réveillée, j'ai juste battu en retraite avec les autres, en ... protégeant les arrières des fuyards. " Ça sonnait noble comme ça. " Je n'ai pas fait grand chose au final et j'ai juste fui en suivant le groupe qui devint plus tard celui de la Matriarche, Ruby. "

Elle essaya de trouver des détails sur cette Nuit, comme il disait.

" Hum... Franchement, si je devais décrire cette Nuit au final.. c'était vraiment ... brumeux. " Elle sourit encore. " J'étais à moitié endormi quand des démons ont brûlé mon cocon, et encore ensommeillée en fuyant, alors je ne me souviens pas de grand chose au final. "

Elle inclina la tête sur le côté, et croisa les bras, point d'interrogation vivant :

" J'en déduis que tu as été fait prisonnier cette nuit là alors... Tu es resté aussi longtemps là haut ? C'est incroyable que tu ais survécu ainsi. "
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MessageRenaissance EmptyLun 31 Mai 2010 - 22:53

Je vois,
je crois.

Je ne crois que ce que je vois.
Les pensées de Lysias se mêlent aux paroles de Svada. Terre à terre, réalistes, peut être un peu trop sur les bords.

-Si tu deviens aveugle, tes autres sens devraient s’affiner, badine Lysias, qui prend le premier sens venu. Pas très philosophe, le nymphe non plus. Toute chose étant égale par ailleurs, -crédo peut être scientifique mais davantage rabâché par le vieux sage du village elfique où a grandi un nymphe- la vue en moins, et c’est l’ouïe, l’odorat et le toucher qui viendrait en compenser l’absence d’un des sens. Où est l’empathie dans tout ça ? Nulle part. Lysias ne connaît pas vraiment le sens de ce sentiment, trop occupé par son bien-être. Il ne s’aurait s’apitoyer sur un sort trop longtemps. Et un Lysias qui s’inquiète si facilement, ce ne serait plus la même marque de fabrique. Etrangement, il ne peut s’imaginer cette hybride devenir inapte à se débrouiller toute seule, ne serait ce pour son tempérament. Un tempérament bien trempé, ça oui.
A cet instant, il jure avoir vu Dame Araignée sourire. Enfin un étrange tiraillement des lèvres qui font ressortir ses mandibules mais un truc qui y ressemble. Autant le prendre comme tel. Mais le sujet dont elle parle attire davantage son attention. Ainsi, tous deux connaissent La Faux.

-… Sappho a arraché beaucoup de vies, confirme-t-il, d’une voix atone. -…Ils sont morts, torturés. Déchiquetés. Ecartelés, et démembrés. Ils sont morts dans le bain de leur propre sang.

Le regard de Lysias se perd quelque part là bas, dans un point indéfinissable alors qu’il vient prendre place à côté de la Passeuse. Tous deux pourraient regarder dans la même direction qu’ils ne verraient jamais la même chose. Ni l’un, ni l’autre. A ce moment, le nymphe sent que ses yeux sont secs, -trop secs-, à tels point que le fait de les garder ouvert le piquent. Là bas, plus loin, plus loin que le lointain, la danse de la Faux virevolte, se déchaîne et ravage tout ce qui se trouve sur son passage. La violence qui chez elle est devenue, l’art du cultiver la mort jusqu’à ses derniers retranchements. Rouge la faux, Pourpre ses robes, Noire son âme.
Il cille.

-Ce n’était pas beau à voir… souffle-t-il, repoussant d’un coup ces visions du passé. Le passé, il ne compte plus. Il ne devrait plus compter. Nul ne peut souhaiter pareille fin.
Il faut se reprendre.

Pendant un instant, il a l’impression qu’il pourrait voir cette Nuit-là, vue de Svada. D’un geste machinal, il se passe la main sur le poignet. Là où pas plus tôt que quelques jours auparavant, il portait encore la Chaîne. Et il revoit les habitants d’Elament, massacrés à vif sur place ou traînés sur les ruelles pour un avenir bien plus sombre, entre ceux qui connaîtront un lendemain en fuyant, et ceux qui jamais ne le connaitront. Hurlements, pleurs misérables. Cœurs labourés à nu. Eclats d’images, de fragrances et de souvenirs qui tournent encore et encore dans tous les esprits. Ce sont dans ces moments que Lysias a l’impression qu’il va se noyer. Etranglé non par l’eau, mais par une simple goulée d’air supplémentaire. Il se relève d’un bond, comme réveillé en sursaut d’un sommeil agité. Sauf que là, c’était un sommeil éveillé.

-Ah…

Svada est encore là, paisible, tout comme la forêt tranquille à ses oiseaux de paradis.

-Ah. répète-t-il encore, perplexe. -Pardon. En fait… s’il n’y avait pas eu de fuite, les élémentiens n’auraient plus de raison d’être.

Là bas, il y en a encore qui croient qu’on viendra les secourir.
Qui veulent croire à l’existence d’autres résistants, qui veulent croire qu’ils ne se sont pas battus pour un avenir déjà prédéfini. Et qui même, sans espérer leur liberté, veulent qu’une vie continue après la Chute. Entre ceux qui ont réussi à se sauver, pour croire qu’ils bâtiront un futur nouveau. Et que les Elémentiens nés et désignés d’un pouvoir élémentaire, trouvent toujours une terre de refuge et un chez soi comme l’ancienne Cité. En chacun des fuyards, est placé un espoir. Svada ne semble le réaliser.
Lysias, de son côté, sait pourtant qu’il a lui aussi a refusé d’accepter une telle fin pour son sort. Celui d’Elémentaliste, tel qu’il est formé depuis son entrée à Elament. Il se souvient aussi de Lya et sa présence apaisante au moment où ni ciel ni terre n’avait de sens aux yeux du nymphe. La pensée de cette Fée… il aimerait bien la recroiser.

-Je veux dire… il en reste encore qui veulent croire qu’il existe un endroit meilleur que là où ils sont en ce moment.

Il se rassied, plus tranquillement.
Il devrait cesser de s’agiter ainsi. Il devrait.

-Je suis resté prisonnier à la cité, oui, acquiesce Lysias, pensif. Combien de temps ? Il ne se rappelle plus vraiment. -La notion du temps perd sa valeur, là bas. Je crois que j’y suis resté presque un an. Je crois.

Vague est le souvenir de toutes ses journées.
Lysias non plus ne connaît ni le blanc, ni le noir, mais bel et bien le gris nuancé. Dans ses moments d’absences les plus plongés, il ne se souvient que d’une teinte grise, si grise et dépourvue de variation qu’il s’y est égaré à corps perdu.

-En fait… j’ai été le prisonnier de Sappho, lâche Lysias, fatigué de devoir trier entre ce qu’il faut oui ou non dire. -Et au final, peu importe ce qu’on croit, mais… je n’ai jamais survécu. C’est elle qui a fait le nécessaire. Alors je ne peux pas lui en vouloir.

Parce qu’elle a usé plus que son possible pour rendre la vie de son captif, le plus lumineux que possible. Et elle a réussi. En y repensant, c’est un prix qui adoucit et qui estompe un tantinet la violence de ses souvenirs. Lysias passe la main sur le haut de son dos, comme pour sentir l’infime cicatrice laissée par la Pierre. Il en voulait, sans lui en vouloir. Etrange confusion intérieure.

Mais pour l’heure, il était libre.
Une liberté qui lui tend la main sans que Lysias la voie réellement, maintenant qu’il l’a sous son nez.
Un silence calme passe alors, laissant une brise traverser les branchages. Un demi-sourire revient se jucher sur les lèvres du nymphe.

-Haha, quand tu dis que tout est brumeux, je crois que ça l’était vraiment. En tout cas, pour ce qui de la toile de mes rêves, commence-t-il, incapable de se ressasser plus longtemps dans le trop de cynisme et de sérieux. - Je n’ai pas de statut et pas de rêve, c’est vraiment glorieux tout ça… j’ai bien envie d’en rire. Mais je reviens te serrer la patte quand j’aurais trouvé !

(Obligé, je veux revoir tes mandibules !)
Ahem. Déjà dans ses projets, si on peut appeler ça des projets-, Lysias se dit qu’il compte bien revenir se frotter à son caractère de marbre.

-Moi je veux savoir autre chose.

Haha comme s’il en avait terminé là.
Si on savait le nombre de « choses » que la curiosité d’un nymphe voulait satisfaire.

-Pourquoi Ruby, c’est la matriarche ?




Je ne crois que ce que je vois.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyMer 2 Juin 2010 - 11:15

Les autres sens... Pff
L'ouïe digne d'un paresseux,
L'odorat semblable à celui d'un cafard,
Le goût inexistant...
Ne restait que le toucher, qui était son dernier refuge sensationnel.

Mais elle acquiesce, parce qu'elle ne va pas se plaindre non plus. Certains sont aveugles, sourds et muets. Elle, elle peut encore entendre un peu, voir un peu, et parler... un peu. C'est mieux que rien, un peu. Mais ce n'était pas beaucoup, un peu. Svada ne dit rien de plus encore, quand il fit le constat malheureux des actes d'une démone. C'était triste et répugnant bien sûr. Mourir dans d'atroces souffrances n'était pas une situation qu'elle voulait subir. Mais il ne fallait pas imaginer ce genre de choses. Son cerveau n'avait de toute façon, pas l'imagination nécessaire pour cerner la folie et la perversité de certains démons... comme de certains élémentalistes ! Les traitres n'existaient pas pour rien. Mais elle ne commenta pas, parce qu'il n'y avait rien à dire. Ce n'était pas beau à voir. Non. Et ce n'était pas beau à dire non plus.

Quand elle eut fini de raconter son épopée, il se leva brusquement, la faisant sursauter quelque peu. Qu'avait-il à présent ? Ah... ah bah oui, mais il avait tout même fait sursauter l'hybride nom d'un millepattes. Dubitative, elle écouta ce qu'il dit. Fuir... débouche sur raison d'être ? Pour qui ? ... Elle médite ses paroles. Oui, encore fallait-il qu'ils le sachent. Encore fallait-il que leur espoir subsiste. Encore fallait-il résister. Mais au final, ils mourraient, à moins d'avoir la même chance que ce Lysias. Elle ajouta alors :


" Je pense que ceux-là ont d'autres choses auxquelles penser. Même la lueur de l'espoir peut disparaitre dans les ténèbres. "


C'était très fataliste, mais Svada n'avait jamais été optimiste dans l'âme. Le monde était à la fois cruel et bon, mais en général, il penchait plutôt du côté sombre de la Force de la Balance des Temps Anciens. Les morts, il y en avait tout les jours. Des naissances aussi. Mais des vies sauvées ? Il y en avait, mais moins. Si peu ces derniers temps... Oui, si peu d'élémentalistes novices étaient trouvés et ramenés dans un refuge. Ce n'était pas ce qui devrait arriver. Mais jamais il n'arrive ce qui doit arriver.

Un an... Une année entière qu'il est resté, qu'il dit. C'est beaucoup. Pour un esclave parmi les démons, c'est énorme même. Mais elle écoute, et elle comprend... pas. Il a été l'esclave de cette Sappho dont on parlait, celle qui tue, celle qui massacre à volonté. Mais le plus surprenant vient après. Elle, cette démone, lui a permis de vivre ? Svada se laisse aller dans la perplexité la plus totale. Son esprit eut du mal à faire le tri, et à entendre ce qu'il voulait dire. Mais son instinct lui dicta quoi répondre. Une femelle, ça sent ce genre de truc. Oui, ça sent les liens entre deux personnes.


" ... Ma mandibule me dit que tu aimes plus que bien cette Sappho. "
Un sourire malicieux étire ses lèvres, mais ce fut son unique commentaire. Que rajouter ? Qu'elle voulait l'emmener pour l'interroger et l'inculper pour traitrise ? Bah, Svada n'en a strictement rien à faire de ça. Les sentiments ne regardent qu'eux-mêmes.

Alors elle oublie, aussi vite qu'elle entraperçut la vérité. Elle n'en savait rien. Ce n'était qu'une intuition d'araignée qui campait là. C'était vraiment sa mandibule qui le lui avait dit, si ça se trouvait. Alors elle oublie ça, et regarde un autre Lysias. Étonnant vraiment, comme les bipèdes pouvaient changer du tout au tout en quelques secondes à peine. Brumeux, c'était le mot. C'était comme un rêve. Sauf que c'était un cauchemar. Elle ria bien avec lui sur le coup. Pas de statut, pas de rêve. Il était bien loti, lui dites donc. Une vraie perle rare. Inconsciemment, ou très consciemment, ses pattes atrophiées remuèrent avec entrain. De joie ? De crainte ? Bah, c'étaient que des pattes après tout.


" Pff je ne suis pas à un jour de repos avorté près... Enfin, en espérant que j'ai un autre jour de repos. "

C'était à la fois dit légèrement et lourdement. Au fond, maintenant, elle s'en fichait. C'était parti pour une discussion avec un Lysias, ça ne se refusait pas, tout de même. Lourd aussi, parce que vraiment, elle aurait voulu faire une sieste. Quand même. Elle prit son coude dans sa main droite, et sa main gauche vint se poser sur son visage monstrueux. Mais c'était sans horreur qu'elle regardait cet aera. C'était doux. Assez. Un minimum. Mais dieux, s'il savait lui, à quel point la curiosité l'énervait.

" Quoi encore ? ... "

Ruby... Pourquoi est-elle la Matriarche ? Y a-t-il une raison en fait ? N'est-ce-pas un hasard ? Svada commence à ouvrir son bec pour parler, puis le referme, perplexe. Que dire là-dessus ? Elle-même n'était pas vraiment à sa botte, elle n'était là que parce qu'on le lui avait demandé. Et parce qu'elle ne voyait pas ce qu'elle pourrait faire d'autres pour protéger ce nouveau nid. A tout nid il faut une reine, et Ruby est celle qui s'en rapproche le plus pour elle. Même si vraiment, elle est toute fragile et toute ... blanche. L'araignée souffla avant de reprendre, confuse de paroles qui venaient à son esprit :

" Eh bien... Sûrement que ça a un rapport avec le fait qu'elle ait tué une traitresse là... Une reine... Cette ancienne Gardienne là, tu sais. " Elle tapota son front. " Mais oui ! Tarna, Aï Deïs Tarna. Bref, en plus, il y a une chance pour que son ... héroïsme durant la Perte, à savoir, elle a affronté le Haut-Roi des Enfers, y soit pour quelque chose. " Elle hocha fermement la tête. " Oui, c'est possible. Mais je crois aussi que c'est parce que des gens lui font confiances. Ou croient en elle. Enfin, quelque chose du genre... "

Quel commentaire intéressant... L'hybride haussa les épaules. Au fond, elle n'en savait rien, et elle s'en moquait un peu. La curiosité n'était pas une de ses grandes particularités. Moins elle en savait, mieux c'était. Mais en faut, la Passeuse ne croyait pas que la confiance, ou que les victoires suffisaient à faire de soi un chef, un vrai. Il y avait autre chose. Il y avait ... une aisance, une assurance. Même dans les moments les plus durs, les personnes qui dirigeaient se devaient d'être des figures de stoïcisme. Et Ruby en était, elle avait cette fibre du dirigeant, quoi qu'on en pense. Après, cela ne voulait pas dire qu'elle le méritait. Cela voulait dire... qu'elle le pouvait. Et c'était déjà pas mal. Prenez Svada, elle, elle ne le pourrait pas. Simplement parce qu'elle n'avait aucun talent pour parler à une foule.


" Si tu l'as rencontrée, tu dois savoir de quoi je parle : elle galvanise les gens autour d'elle. Elle fait une bonne dirigeante pour des élémentalistes en manque de repères. " Et comme le cerveau de l'araignée marchait un peu au ralenti, elle ajouta, alors qu'il avait dit cela plusieurs minutes auparavant, passant du coq à l'âne : " Mais... tu disais être un aera sans air ? Tu veux dire... que tu ne peux pas utiliser ton élément ? "

Un peu lente à la détente Svada.
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Lysias
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MessageRenaissance EmptySam 5 Juin 2010 - 16:28

–Si ta mandibule te souffle tant de choses, j’aimerais bien avoir la même, lance Lysias, haussant des épaules. Aimer plus que bien ? Pourquoi faire, n’a-t-il pu s’empêcher de se demander, sans réfléchir davantage. Tiens d’ailleurs. Qu’aime-t-il plus que bien ? Son confort. Pour son bien-être. Ah ça oui, il devrait les retrouver, c’était bien indispensable, à son cher avis. Alors la Faux ; devait-il l’aimer plus que bien ? Comme si c’était une question de devoir. Ola… que de questions métaphysiques. –Je pense que je lui suis redevable.

Qu’il est fermé d’esprit ce nymphe. C’est beau le terre à terre.

-Quoiqu’il en soit, j’espère que l’espoir ne disparaîtra pas, même à Elament. Sans ça, je crois que je n’aurais pas tenu, malgré tout.

L’espoir existe même du côté des démons, quelque soit sa forme.
Sur ce, il a haussé de nouveau des épaules, passant à un sujet moins noirci que leur ancienne cité. S’y repentir trop longtemps dessus donne au nymphe, cette envie de s’enfuir en courant. Pour avoir vu le malheur des autres esclaves et détenus. Pour avoir vu le sort des résistants. Il y a des choses auxquelles il ne peut rien. Son enthousiasme parait alors décalé face à une Araignée presque blasée de voir ses heures de repos s’effriter. Si elle savait comment un Lysias curieux c’est dangereux en question, probablement qu’elle l’aurait ligoté de sa toile, pour le pendre sur une branche d’arbre par les pieds.

Quant à Ruby… Héroïque, qui inspire la confiance. Lysias fronce les sourcils. Le Haut Roi des enfers… il se demande à quoi il peut bien ressembler. Si craint, si respecté, selon des les personnalités qu’il a rencontrées. Son cerveau peine à traiter tout ce qu’il entend, ne cessant de soulever toujours plus d’interrogation. Des questions qui pourtant, restent propres au silence de cette tête brulée. Pourtant, une chose reste sure : c’est sur son chemin brouillé que la Matriarche l’a trouvé. Elle, et son tempérament posé et froid à la fois. Alors coup de chance ou de hasard, Lysias ne saurait que dire. Et soudain, en entendant Svada parler de son air, un grand sourire apparait sur son visage.

-Un aéra sans air… répète Lysias. Un aéra sans air, ce serait quand même le comble. Bien que c’est ce qu’il a longtemps cru, sous l’égide d’Elament d’avant les temps obscures… Haussant des épaules, il enchaîne : Non, en fait, c’est pas comme tu le crois. Mon air à moi se manifeste… comme du son.

Un élément en cours d’évolution. Un élément qui refuse de se manifester comme souffle le vent, comme tonne la tempête, comme attise le feu. Lysias est encore incapable de mesurer l’ampleur de l’air qui vit en lui ; mais au moins, sait-il que c’est un pouvoir qui réside bel et bien dans ses gênes. C’est un concept étrange qu’il a fini par accepter ces derniers mois.

-Est-ce que tu l’entends ?

Certains perçoivent les murmures inaudibles lorsque Lysias est dans les parages. D’autres, non. Si bien qu’il arrive à l’aéra lui-même de ne pas en entendre le son de son élément. Tendant l’oreille, il tente d’attraper une bribe de conversation éternelle dans laquelle semble s’être lancé son Air. Pourtant, aujourd’hui, c’est un don qui se fait totalement silencieux ; voire absent. Balayant l’air d’un geste de la main, Lysias reporte son attention sur l’Hybride.

–Enfin bon, j’étais persuadé que mon pouvoir était visible, avant. Mais ce n’est pas le cas.

Sans préciser, que quelques années auparavant, ce nymphe aurait bien aimé être un Terra ou un Igni. Surement pas un Aera ; encore moins un Aqua. A ce souvenir, un mince sourire amusé étire les lèves de l’aera. C’est aussi beau de souhaiter tout ce qu’on ne possède pas. Se laissant tomber au sol, Lysias s’étale de tout son long aux côtés de l’hybride, comme épuisé de sa séance de question. Un moment de repos, ça se partage -pour une fois qu’on parle de partage.

-Jour de repos, jour de repos… c’est fatiguant ce que tu fais en tant que Passeuse ? demande encore Lysias. Là haut, à la cime des arbres, encore des oiseaux.

Un moment de silence flotte, un silence paisible, dans cette forêt paradisiaque où nul ennemi ne guette. Moment paisible où Lysias finit par fermer les yeux. C’est agréable.

-Hé Svada. Puisque tu perds ta vue. Moi je peux bien être tes yeux ou mieux encore, ton odorat, a chaque fois qu’on se verra.

On en n’a pas fini les tourments, semblerait-il.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyLun 7 Juin 2010 - 14:12

Espoir ? Qui parle d'espoir ? Svada n'a jamais été une optimiste, mais plutôt fataliste dans l'âme. S'il fallait théoriser sur sa vie pour trouver l'origine de ce pessimisme naturel, on dirait sans doute que c'est le rejet de ses parents, même si elle ne le sait pas, qui est resté collé à sa peau. Ou alors, la perte de ses frères. Ou encore, ce pouvoir qu'elle trouvait ... de trop. Mais l'espoir, l'espérance d'un lendemain heureux, le rêve d'un avenir radieux, elle n'y pense plus depuis longtemps. Le monde était gris, est gris et sera gris. Qu'importe les nuances au fond, finalement, ce n'est jamais pur, ce n'est jamais beau, la vie. Il y a toujours du noir, de l'obscurité et des ténèbres. Elle ne pense pas que ce soit de l'espoir que d'espérer sa délivrance prochaine : c'est plutôt une illusion, qui peut devenir vraie ou disparaitre aussitôt.

Non, décidément.
Non, elle ne croit pas en l'Espoir.

La mélodie de l'espérance ? Non plus. Et Svada n'a pas franchement l'oreille musicale. Son pouvoir à lui, se manifeste... comme un son ? Ah oui, il lui semblait bien qu'il s'agissait d'une ramification du don de l'Air. Son, lumière, foudre... C'étaient des domaines avancés. Mais il était peut-être possible de n'en maitriser qu'un seul, à l'origine. L'hybride n'en savait rien. Ses années d'étude ne l'ont pas plus marquée que cela. Mis à part ses propres difficultés sur la roche en général, elle avait une maitrise certaine dans le domaine des plantes. Allez comprendre, elle qui n'avait pour la nature, pas plus de respect que pour la vie.


" Un son ? ... " Svada se concentra comme elle le put, mais n'entendit rien. Son ouïe était banale, un peu basse, mais normale. Sûrement pas assez fine pour ça. Elle secoua la tête, sans conviction : " Non, je n'entends rien. Mais de ma part, ce n'est pas très étonnant. " Un pouvoir visible ? Pour quoi faire ? Elle n'aimait pas utiliser son pouvoir à tout vent. " Qu'il soit visible ou non, qu'on l'entende ou non, il est là. Pas besoin d'aimer ou d'être en harmonie avec son élément. L'important pour moi, c'est de savoir l'appeler. Ou le renvoyer. "

Si elle avait eu le choix, Svada aurait préféré se laisser mourir avec ses frères, plutôt que de survivre en lâche. Au final, elle s'était juste sauvée elle-même avec des ronces sauvages. Rien de glorieux, juste du sang, des épines et de la poussière. Jamais elle n'avait retrouvé de frère ou de sœur. De famille, elle ne connait que quelques étés. Pas d'enfance heureuse entourée d'un amour maternel ou paternel. Même pas tiens. D'ailleurs, elle ne sait même pas de quelle race elle est issue. Elfe ? Nymphe ? Ange ? Autre ? Allez savoir. Et elle s'en contre fiche. Alors son élément, elle ne l'aime pas plus que ça. Il est un plus dans son hybridation. L'exception de l'exception. Un hybride élémentaliste. La minorité dans la minorité.

Alors si elle avait eu le choix... elle serait morte ? Bah, ce n'est pas comme si la vie avait une valeur si forte à ses yeux. Un insecte, ça vit au jour le jour, et ça vit pas longtemps. Elle ne veut pas de vie morne et triste jusqu'à sa centième année. Elle préfère encore mourir demain ! Pense-t-elle à une vie après la mort ? Pas assez d'imagination. Ou alors, c'est la même chose. Elle ne sait pas. Elle s'en fiche. Elle est comme ça, Svada. L'indifférence incarnée.


" Fatiguant à un point que tu n'imagines même pas. " Un sourire apparut sur sa face : " Je passe mon temps à faire des allers retours entre ici et les camps du continent, transportant messages, informations et novices... C'est long, répétitif, ennuyeux au possible, mais au moins... c'est toujours plus calme que de rester ici. " Elle resta pensive un moment, puis ajouta, négligemment : " Enfin... si ce maudit Chef de la Forteresse pouvait arrêter de me surnommer "petite araignée", ce serait encore mieux. Mais c'est pas demain le veille ! "

Svada leva la tête : des oiseaux jaillissent de la cime d'un arbre, battent des ailes et puis s'en vont. Ils montent, montent, montent, jusqu'à n'être plus que des formes vagues à l'horizon. Et ce silence léger qui s'installe. Ce n'est pas un de ceux qui alourdissent la conscience, mais plutôt, ces blancs volontaires au milieu d'une conversation, qui arrivent ça et là et qui libèrent les esprits. L'esprit de l'hybride ne vole pas bien haut, pas autant que les créatures à plumes au loin, mais elle comprend cela.

L'araignée ne ferme pas les yeux, elle ne le peut pas. Mais elle laisse cette fine membrane translucide recouvrir ses globes oculaires noirs. Cette fine couche gluante qui lui bouche complétement la vue lui donne toujours une sensation étrange : froid, liquide et solide en même temps, doux et piquant aussi... C'était pas forcément pratique. mais ça avait le mérite d'être discret : avouez que c'est tout de même super de pouvoir dormir sans que personne ne remarque rien ! Mais elle ne dormait pas, en l'occurrence, non, elle ne faisait que... nettoyer ses yeux. Oui oui, vous là, avec vos petits yeux blancs, vous fermez vos paupières et puis voilà, mais elle, qui ne peut pas les fermer, il faut bien qu'elle puisse enlever toutes les saletés qui se posent dessus. Le liquide stagna sur la surface opaque de ses yeux, et lorsqu'elle eut attendu un certain temps, elle passa sa main droite sur lesdits yeux, les touchant franchement, sans craindre de les crever. Elle attrapa du bout des doigts la surface transparente, quoiqu'un peu grisâtre à présent, puis l'essuya sur des feuilles à côté.

Lentement, alors qu'elle retirait ceci, sa vue revenait. A chaque, elle trouvait qu'elle voyait un peu mieux au début, puis les bords s'assombrissaient un peu, l'horizon devenait quelque peu flou. Rien qui ne la gênait encore beaucoup, cela dit.


" Tu serais bien incapable de me supporter, Lysias. " Puis, elle ria légèrement, une pensée traversant sa tête : " Mais si un jour tu veux m'accompagner pour un voyage sur les terres, alors tu es le bienvenu... "

Diantre, c'était la première fois qu'elle disait une chose pareille. Elle ajouta, comme pour se justifier :

" Tu retrouveras peut-être des personnes que tu avais perdu de vue : tous les élémentalistes qui ont survécu ne vivent pas ici. " Elle se mordit la lèvre en recoupant d'autres pensées. Hum, ce n'était peut-être pas une si bonne idée en fait. " Hum mais avec les assauts des Généraux sur les refuges en ce moment, ce n'est pas franchement une partie de plaisir de se promener près d'Elament la Sombre. "

Quel euphémisme.
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyMer 9 Juin 2010 - 22:16

Dans ce cas, une cohabitation disharmonieuse ? Avec son élément ? L’important, c’est de l’appeler et de le renvoyer… pour autant, combien de fois avait-il fait face à un mur de silence et de vide à chaque fois qu’il s’y était essayé ? De toute façon, chaque porteur de pouvoir utilise son don à sa manière. En concevant que l’hybride en ait une différente de la sienne, Lysias laisse ses pensées vagabonder, tentant de concilier deux choses qui ne lui semblent pas conciliables : lui non plus ne se pavane pas haut et fier vantant les mérites de son pouvoir. Haussant des épaules, il écoutera Svada et son côté laconique derrière ses attitudes impassibles. Ou peut être qu’elle l’était totalement après tout. Leurs points communs résident en de nombreux éléments infimes tout comme ceux qui les rendent bien distincts l’un de l’autre. Tiens la curiosité par exemple. Le plaisir de poser des questions qui ne turlupinent pas forcément l’esprit, et celles qui seraient futiles de poser puisqu’elles ne concernent pas le demandeur.

-Ah parce qu’il y a d’autres chefs à part Ruby ?

En même temps, avec une si jolie perche tendue, comment céder à la tentation d’en savoir plus sur tout et rien. Quant à « petite araignée » … Lysias en fait les gros yeux. Et tiens d’ailleurs, la Forteresse, c’est l’île ? Fronçant les sourcils, il cogite un instant ce qui a été dit, mâchonnant une autre brindille, pensif. La Forteresse. Avisant l’hybride du coin de l’œil, il la regarde, distrait, retirer de curieuses choses de ses propres yeux, et quand il réalise qu’elle s’en débarrasse vraiment, le nymphe grimace comme s’il avait gobé un fruit de saveur trop acidulé. Après la scène des pattes atrophiées, des plumes sur les mandibules, -la mandibule intuitive-, les choses visqueuses des yeux. Que diantre… un nouveau symbole de l’esthétisme ?

-…Tu es vraiment un sacrée araignée.

Sacrée = originale, tordu, bizarre, qui sort de l’ordinaire –extraordinaire ?- … fascinante. Indescriptible. Très amusé tout seul par cette pensée, Lysias laisse un sourire s’attarder sur ses lèvres, les yeux clos. Peu habitué à affectionner les nouveautés dès les premiers égards, le nymphe se dit pourtant qu’il apprécie bien cette araignée. Et il valait mieux qu’il cesse de la regarder faire, parce qu’il ne lui trouverait plus assez de qualificatifs à toutes ses scènes. Lui, incapable de supporter Svada ? Ouvrant un œil, il l’observe longuement avant de le refermer. N’est-ce pas plutôt l’inverse qui devrait arriver ? L’hybride incapable de se coltiner ce nymphe curieux ? Tout en riant de cette perspective, Lysias se tourne vers elle.

-On verra bien. Et un jour…

Quand.
Que sera-t-il ce jour-là.
Que sera-t-elle, elle la Faux, ce jour-là.
Nostalgie. Appréhension.

-…un jour, tu seras ma Passeuse, hésite Lysias, pensif, avant de se reprendre, les yeux moqueurs, -et tu pourras donc me montrer ton travail tellement harassant! Mais… les survivants, j’y crois pas trop.

Un peu.
Rien qu’un tout petit peu, une croyance, une supposition bien trop faible pour avoir vu la réalité de face. Lysias aimerait bien ne pas être le seul survivant, parce que d’autres élémentalistes sont plus méritants que lui. Mais il sait également que s’il retourne sur les Terres, ce ne sera non pour aller crier gloire et victoire, mais pour retrouver les traces d’un être cher. D’une faux.
Mince. Il a encore promis. Les promesses, c’est vraiment le mal.

-M’enfin, c’est pas pour tomber au hasard sur les Généraux que je m’y promènerai n’importe où non plus, claironne le nymphe, tentant de repousser le jour de sa mort à plus loin. Et si la prochaine fois il retourne à Elament La Sombre… y restera-t-il encore prisonnier ? Secouant vigoureusement la tête à cette idée, Lysias est pourtant déjà persuadé que non. Non, parce que son chez-lui ne réside plus là bas. Pour autant… trop d’enjeux se brouillent déjà dans sa tête confuse. Non Lysias, il ne faut pas y penser, ce n’est pas l’heure. Pas encore.

-Dis Svada. Si il y a des nouvelles du côté des Généraux… est ce qu’on a le droit d’être au courant, où faudra que je fouine pour trouver l’information ?

Pas de tact, pas de fioritures. Lysias a posé sa question spontanément.
C’est qu’il a, et aura besoin de savoir. Savoir pour revoir, et revoir… est-ce forcément synonyme de trahison. En paierait-il les représailles. Lysias n’a pourtant aucun intérêt à trahir, puisqu’il n’a pas grand-chose à dire sur les élémentalistes. A part l’île. A part ses journées passées sous l’égide de la Dame. A part la reconstruction d’une nouvelle Elament. A part… la forteresse ? Or, plus il avance, plus il en sait. Le savoir, c’est aussi le mal. Mais il a besoin du savoir pour apprendre, progresser, évoluer. Sans avoir envie de trahir, de blesser ceux qui le sont déjà, est-il possible de concilier l’inconciliable. Et pourquoi, oui pourquoi, a -t-il l'impression que la trahison se trouve dans le fait d'aller tremper le pied dans le territoire de l'Autre? Non vraiment, Lysias ne sait pas. Il ne sait plus. Cette fois... où se trouve la voie du "faire de son mieux" sans que cette dernière ne penche ni vers le bien, ni vers le mal.

-Mouais. J’aimerais bien une leçon pour qui m’apprenne à arrêter de me poser des questions… marmonne-t-il, en déglutissant, d’un air âpre. Et ça arrangerait peut-être aussi, une certaine hybride qui voudrait bien avoir sa journée de repos. Mais rien que pour avoir le plaisir de papotasser avec cette sacrée Svada, Lysias en poserait peut être quelques autres. Oui, peut-être.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyVen 11 Juin 2010 - 9:54

" Oui, il existe sur les terres, des refuges de résistants dirigés par quelques Chefs. La Forteresse est l'un d'entre eux. "

Sacrée ? Pourquoi pas. Mais elle était juste une araignée. C'étaient ses mœurs, ses habitudes, sa philosophie. Elle était un insecte, plus qu'un humanoïde, cela était certain. Svada était un exemple d'une hybridation presque totale, morale et physique. L'araignée qu'elle était gobait des rongeurs crûment, ne prenait pas garde à retenir ses mots, et n'attendait pas pour faire ce qu'elle voulait. Même si c'était franchement peu ragoûtant, même si elle apparaissait comme une créature froide et asociale... Elle était une araignée. Une solitaire. Une prédatrice passive, qui attend sa proie dans sa toile. Une Passeuse, nomade et seule.

Le temps où son côté plus humain était le plus exprimé était révolu depuis un certain temps déjà. Une araignée, c'était plus simple. Les réactions étaient instinctives. On ne cherchait pas ses mots pendant des heures. On avait pas besoin de se tenir bien ou de faire semblant de respecter ceux qu'elle ne supporte pas. Oui, plus simple. Une fois qu'elle eut fini la toilette de ses yeux, elle rajouta à ses propos :


" Tss c'est bien la première fois que j'entends ça ! "

Sa vue est revenue au même point que tout-à-l'heure. Elle le voit se tourner vers elle. Que veut-il ? Elle n'a jamais été douée pour deviner les pensées des gens rien qu'en les regardant. Ayant elle-même un visage peu expressif, elle ne sait pas lire les expressions des autres. C'est un handicap dans un sens, et en même temps, une garanti de toujours se faire surprendre. Au moins pouvait-elle profiter de quelques surprises. Parfois. Là, par exemple.

Tu seras ma Passeuse.
Il veut vraiment ça ?
Il veut donc y retourner là haut ?

Pour elle, la nostalgie n'a pas vraiment de sens, puisqu'elle peut s'accommoder de n'importe quel chez soi. Ou même, elle ne regrette rien. Ni les lieux perdus, ni les gens abandonnés. Peut-être qu'ils auraient mérité de vivre à leur place, à eux deux. Mais voilà, pour rien au monde, Svada ne voulait mourir avant son heure. Alors elle n'échangerait sa place avec personne. Et elle vivrait, point. Si elle devait mourir, elle le saurait. Mais parfois, lorsqu'elle emmenait de très jeunes gens, tout juste élémentalistes, encore novices, elle se demandait si ce n'était pas malsain. Certains étaient si jeunes... C'était bien là, la seule et unique chose qui pouvait la faire hésiter.

" Si tel est ton désir, tu pourras profiter d'un voyage d'un ennui encore plus mortel qu'un démon adepte de la Corruption. "

Quelle métaphore, mais dites donc, c'est qu'elle devient poète en plus ?
Sûrement l'influence de ce gringalet tiens.

" Tu fais bien de ne pas trop y croire. "

Tout le monde le savait, même si personne ne le disait plus. Les survivants n'étaient qu'une poignée. Des milliers sont morts ou asservis. Les quelques centaines de rescapés sont bien peu face à la nouvelle puissance démoniaque. Alors sûrement qu'il vaut mieux ne pas trop espérer. Ou juste un peu. Il fallait dire aussi qu'il n'y avait pas eu beaucoup de larmes. On n'avait pas eu le temps de pleurer. Juste de constater. Un constat amer.

Et on en revenait aux Généraux. Secret ? Non, rien. Il y avait des rapports hauts comme ces arbres qui en parlaient. C'était les démons qui étaient les plus souvent mentionnés dans les réunions pour de bonnes raisons : ce sont eux qui sont envoyés au Front, leur Roi se déplace peu. Ce sont eux qui causent le plus de perte en général. Ce sont les plus crains. Et donc, ce sont ceux sur lesquels on cherche le plus d'informations. Tout le monde doit être au courant de ça. Au cas où. Ainsi, leurs noms, leurs magies sont souvent connus. Parfois leurs armes, voir leur force et leur faiblesse grâce à ceux qui en sont revenus vivants.

Svada se gratte la tête. Qu'est-ce-qu'elle en savait, elle ? Savait-elle des choses ? Oui bien sûr qu'elle en savait. Elle y était bien obligée. Quant aux dernières nouvelles... En général, elles sont transmises sur l'île assez vite. Mais certaines sont gardées secrètes par les refuges des continents. Enfin, ça dépend. Par exemple, l'Elfe noir de la Forteresse avait parait-il, séquestré un démon nécromant. Mais il n'en avait rien dit avant plusieurs lunes ! Depuis, il semblerait que tout cela soit plus... transparent. Enfin, ça filtrait selon le bon vouloir du triumvirat.


" Eh bien... ça dépend. Il est rare que l'on retienne ce genre d'information mais... concernant les Généraux, ils sont prudents. "
Elle inclina la tête. " Tu sais, on ne sait jamais, il y a encore des traitres. Alors oui, pour certaines choses, on ne le crie pas sur les toits. " Elle se rendit alors compte qu'il restait du truc gluant sur ses doigts... qu'elle avait utilisés pour se gratter la tête. Elle souffla et essuya ses mains sans entrain, avant de vérifier s'il en restait dans ses cheveux. Certes, son apparence était le cadet de ses soucis, mais c'était vraiment pas agréable ! Elle entreprit donc de lisser ses cheveux fins et noirs afin d'en retirer ce liquide collant. En même temps, elle ajouta, distraite : " Oh mais, tu peux toujours me demander si tu veux, les nouvelles passent souvent par moi. Tu n'as pas franchement l'allure d'un corrompu, alors on ne risque rien. "

Oui. Vraiment, les traitres, ils ne ressemblaient pas à ça. Enfin, Svada ne les voyait pas comme... de petites choses frêles et sans défense. En général, les corrompus étaient discrets, et questionnaient sans vergogne. Enfin, ils faisaient ce qu'ils voulaient, si ça les amusaient, de s'allier avec des meurtriers de sang froid. Certains étaient peut-être des démons dans l'âme, nés au mauvais moment, et pourvu des mauvais pouvoirs, qu'ils s'empressaient de corrompre.

Et qu'est-ce-qu'il dit, après ça ? Elle n'entend pas bien. Elle ne comprend pas ce qu'il a dit, trop occupé à retirer cette mélasse de ses cheveux corbeaux. Mais enfin, il lui semble qu'elle ne pourra faire mieux, alors elle laisse tomber ça. Elle commence à avoir quelques gênes dans ses pattes, alors elle les remue un peu, dans un geste apparemment bien peu naturel. C'était l'équivalent d'un petit étirement. Mais ça ressemblait chez elle à un frisson. Bref.

Sans un mot, elle se concentra un instant sur son don élémentaire. Elle laissa circuler cette puissance naturelle dont le premier souvenir était encore âpre et teinté de sang. Entre eux deux, commença à germer une plante, dont la graine reposait là sans grandir. Agissant sur elle, elle en fit une petite pousse, puis la tige s'allonge, s'allonge, avant que le bourgeon n'éclate, dans un rayonnement de pétales pourpres. Quelle est cette plante ? D'où vient-elle ? Aucune idée. Une fleur violette aux pétales larges et doux comme du velours, agitée par une brise moqueuse et jalouse de sa tige d'un vert chatoyant. Pourquoi avoir fait ça ? Que cherchait-elle à dire ? Elle n'était pas douée avec les mots, alors parfois, il valait peut-être mieux laisser parler les images. Parfois. Et ajouter un sous-titre aussi.


" Peut-être que ton Air n'a pas fini de grandir. Peut-être sera-t-il plus grand que les autres, qui sait ? "

Un mince sourire s'étala sur son visage blanc. Depuis quand se montrait-elle aussi pédagogue ? Pourquoi voudrait-elle le rassurer ? Sans trop savoir pourquoi, ce Lysias attirait sa sympathie, peut-être parce qu'il était comme elle sur un point au moins : on s'étonne d'un rien, mais on se fiche un peu des autres.
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Lysias
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Spoiler:

Lysias a grimacé à la mention de refuges et de résistants. Grimacé avec cette impression d’âpreté, ô souvenir déplaisant du sort qu’on réserva à celle qui maintint sa vie en l’état. La Forteresse… là bas, envoyait-on sans crier gare, des piques au premier venu s’apparentant à un démon. Où est parti ce qu’on appelle la parole, où est-elle partie, pour en recourir à la violence des actes. Lysias a du mal à accepter que cet infime espace là, cet intermédiaire n’existe pas entre eux. Eux, ceux de l’Ombre, et eux, ceux de la Surface. Cet aspect là lui déplait, et qui est-il pour vouloir en changer les termes ? Ravalant cette sensation désagréable, le nymphe se redresse, s’occupant à tracer des cercles aux sols. Distrait.
Nostalgie.

Lysias non plus ne veut pas mourir, mais il n’a jamais pu se contenter de s’accommoder n’importe où et quand. Trop peu adaptable, il ne se verrait pas accepter n’importe quelle condition tant qu’on le laisse tranquille. Non, cet être là, voudrait l’argent et l’argent du beurre, sa tranquillité, et là où il veut. Et s’il devait mourir… probablement qu’il ne le saurait jamais, à défaut de pouvoir l’accepter. Si on lui a donné vie, c’est bien pour en faire quelque chose jusqu’à la fin… mais la fin, pourrait-il se permettre de la repousser, sans avoir ce sentiment de perdre quelque chose ? Le pourrait-il.

-Et bien… c’est déjà plus joyeux de mourir d’ennui près d’une Hybride plutôt que quelqu’un de la corruption, j’y survivrai bien.

A moins que ce ne soit Svada qui se meurt d’ennui sous le poids des questions en vrac d’un agaçant nymphe trop curieux. Ce dernier, s’aperçoit alors qu’elle est en train d’étaler son espèce de membrane gluant des yeux dans les cheveux. Par toutes les divinités ! Lysias se demande pendant un instant si tous les insectes agissent comme tel. C’est peut être leur mode de vie. Après tout, Svada ne reproduit peut être que ce que font les petites araignées. Quelle mystère, celle là. Réalisant avec écœurement qu’elle en a encore sur le front, Lysias se lève, retire la substance, qu’il va essuyer contre le tronc le plus proche. Est-ce qu’elle mue des yeux.... ? Hm. C’est là une question qu’il penserait à lui poser. Un jour.

Et soudain, elle parle de corrompu. De traitrise.
Lysias en a froid au dos.

-Qui sont-ils …?

Et lui, en fait-il partie ?
Le silence appartient-il au monde de la traitrise. Le silence, sans jamais faire part d’un clan ou d’un autre. Lysias ne s’est jamais battu pour la cause des élémentalistes, ni pour ceux des démons. Alors lui, effronté de nymphe, où doit-il se positionner. Et est-il obligé de choisir. Tout à coup, Lysias craint de demander. Reprenant sa place assise, il scrute Svada, les yeux plissés. Est-on traitre quand on détient une information que l’autre ne connait pas. Un soupir las s’échappe de ses lèvres. Il envie la période où il ne se posait pas ce genre de question. Recentre toi-Lysias, cesse-donc d’appréhender.
De t’éparpiller pour des choses que tu n’as faites.

Lysias a de nouveau levé la tête vers le ciel.

-En fait, je me fiche des autres Généraux, de leur plan ou de ce qu’ils préparent. Je voudrais juste savoir ce qui se dit, ou ce qui se fait du côté de la Faux.

Du Générale Faux.
« Générale », telle que Lysias ne l’appellera jamais. Telle que Lysias ne la regarde pas.
Est-ce mal de savoir ce que devient une connaissance. Un ami. Un proche.
De savoir ce qu’elle devient.

Lysias est content d’avoir posé sa question. Sa demande. Ou une sorte de requête. Après tout, c’est vraiment la seule chose qui l’intéresse, parmi ce dédalle de violence, de noirceurs et de conflits. De tueries. D’un monde où il aimerait bien ne jamais prendre part.
Sursautant au frémissement général qui secoue momentanément le corps de l’araignée, Lysias la regarde, et finit par éclater d’un rire moqueur, qui finit par devenir simple éclat de rire général. Parti de rien et sans grande raison, voilà longtemps qu’il n’avait plus entendu le son de son propre rire, et c’est un moment appréciable. Au fond, il est convaincu que le trop de sérieux est préjudice à la santé. La sienne, en l’occurrence.

C’est alors, que médusé, il regarde la pousse devenir bourgeon puis fleur violette, comme si on l’avait entrainé au fil d’un temps qui ne s’arrête pas. Son regard allant de Svada à la plante, il observe la fleur s’épanouir, avec un sourire idiot au visage, comme si c’était la première fois qu’il faisait face à un tel pouvoir. Thanis avait le même, mais elle… c’est il y a tellement longtemps. Se reprenant, Lysias effleure la feuille de la plante délicate, pensif. En fait, il n’aurait pas imaginé Svada avec un pouvoir autre que la terre. Encore, aurait-il fallu qu’il tente de l’imaginer.

Quoiqu’il en soit, c’est un geste qui est passé, sans avoir à s’aider de mots inutiles supplémentaires.

-Plus grand que les autres, je sais pas. Mais à le faire grandir, oui.

Il a intérêt.

On s'étonne d'un rien,
On se fiche des autres.

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MessageRenaissance EmptyMer 16 Juin 2010 - 13:46

" Ceux dont l'élément est perverti... " Elle laissa cette phrase en suspens un instant, ne sachant trop quoi en dire. Ni qui, d'ailleurs. Qui sont-ils ? Elle ne sait pas vraiment, car elle ne retient pas vraiment les noms. " Ceux-là sont nombreux. " Merci Svada, c'est essentiel comme information. " Et sont à l'origine de nombreuses pertes évitables. "

On haïssait les traitres, parce que c'était plus facile. On détestait les corrompus, parce qu'on était pur. Oui, c'était plus facile de tout mettre sur le dos de quelques traitres à leur élément. Traitrise n'était pas un mot que l'on lançait à la légère. C'était douloureux, terrible accusation, impossible à défaire. On n'échappait pas au parjure, une fois lancé. Et la haine des traitres... venait en général de la douleur qu'ils infligeaient. La chair, l'âme et le cœur en étaient blessés. Au plus profond de soi, la traitrise laissa un vide béant, difficile à refermer, qui instillait le doute pour toute une vie.

Et Svada n'a jamais été trahie, parce qu'elle ne connait pas de traitre. Encore faut-il savoir où se situe la limite de la corruption. Elle-même trouvait que Shin était plus un démon qu'autre chose. Même si ... même s'il avait la confiance de tout ses soldats. Ses méthodes étaient plus brutales que la Dame, mais il s'en sortait aussi bien. Même si, la veille même, il semblait mijoter quelque chose de louche. Justement... en rapport avec les Généraux. Alors l'hybride resta silencieuse.

Lysias dans les nuages veut savoir ce qui touche au Général Faux. Peut-elle dire ce qu'elle sait ? Aucune idée. Il n'est pas un traitre, et... et il semble étrange. Joyeux mais égoïste, amusée mais triste. Mais ce n'est même pas ça qui est bizarre. Elle peut concevoir ça. Non, ce qui la turlupine et la dérange d'une drôle de façon, c'est cette espèce de mélancolie qui l'habite. Quand il regarde l'éther, quand il parle de la Faux. C'est étrange et dérangeant. Mais qui est-elle pour juger de cela ? Que peut-elle en dire ?


" ... " Elle soupire, embêtée. " Je pourrais te dire quelque chose. "

Quoi ? Ah mais... c'est sensé être encore une rumeur. Non, c'est plus qu'une rumeur. Mais ce n'est pas encore officiel. On le sait. On ne le dit pas, pas encore. Elle ne sait pas si elle peut lui dire en fait. Même, elle a son idée sur la question. Au moins deux. Mais pourrait-elle dire cela ? Son éclat de rire sur frémissement spontanée l'empêche de répondre immédiatement. Elle cherche ses mots, tout en prenant un air faussement vexé, petit sourire et mains sur les hanches.

Vint la fleur, violette d'une beauté douce à la manière de Lysias, à l'inverse de Svada. Oui, un pouvoir grandit. Un don se cultive, même s'il est offert. Se débrouiller par soi-même, réussir à le contrôler, c'est le but final de tout élémentaliste, non ? Ceux qui attendent que l'élément vienne à eux déjà sculpté sont voués à être détruits par les démons. Oui, rien n'est donné dans ce monde, mais ça, on le sait déjà. Il faut aussi savoir qu'on obtient rien sans rien donner. Les bases d'une vie sociale bien sûr. Qu'on veut toujours outre passer. Qu'on veut toujours violer. Mais on ne le fait pas, du moins, ceux qui ont choisi de vivre dans une morale droite.

Svada se lève alors. Lentement, elle se dresse sur ses quatre paires de pattes, qui supportent son poids sans broncher. Elle avance quelque peu, s'éloigne de quelque pas, tournant le dos à Lysias. Elle regarde le ciel aussi et croise les bras. Elle s'apprête à lui dire sans doute une information importante, qui n'est pas encore rendue publique. Mais dans son esprit, lui dire cela, c'est ce qu'il faut faire aussi. Svada fait partie des gens qui essayent de faire ce qu'il faut faire, ou qu'il leur semble devoir être fait. Même si c'était contraire à leur éthique.


" Et tu auras besoin d'un grand pouvoir. " Ses cheveux noirs, si peu soignés, fouettent quelque peu son visage, sous un vent léger. Statue noire, statue d'ivoire noire, l'araignée n'use pas, telle une sibylle, de paroles mystérieuses. " La veille même, il a été question du Général Faux. "

La fleur à la fière tige plia sous un vent légèrement plus violent.

" Elle ne hante plus les champs de bataille et a disparu de la vue des résistants... comme des démons. "
Elle laissa tomber ses bras le long de son corps, et se retourna à demi vers lui. Sans se départir de son indifférence caractéristique, elle continua sur sa lancée : " Il n'y a ainsi, que trois explications qui ont été retenues. "

Le vent souffla peut-être, à peine plus fort. Et les pétales si doux et fins, commencèrent à se détacher du cœur de la fleur.


" On a déclaré la Faux, morte, disparue, ou captive... Ce qui, au final, revient au même. "


Les pétales s'envolèrent

Comment pouvait-on être aussi sûr ? Simple, quelques espions avaient révélé que les démons eux-mêmes ne savaient pas où elle était. Disparue, le Général. On ne la trouvait plus nulle part. Mais Svada avait bien vu l'air de Shin à ce moment. Que manigançait-il celui là ? Enfin, c'était pas son problème à elle. Passeuse de message. Passeuse de novices. Passeuse de vies. Passeuse de bonnes ou de mauvaises nouvelles. Mais Passeuse toujours. Elle se retourna totalement, la tête penchée, peu sûre de la réaction de Lysias. Elle ajouta encore, cruelle ou compatissante.


" Si tu veux en savoir plus à ce sujet, il te faudra aller à la Forteresse toi même. "


L'hybride remarqua alors que sa fleur n'avait plus aucun pétale. Sans s'émouvoir, elle n'y accorda que peu d'intérêt. Ce n'était qu'une fleur après tout. Rien... qu'une fleur...
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Eléments pervertis, Thanis.
Fait-elle ainsi partie des Corrompus. Lorsqu’il y pense, Lysias ne peut que se sentir toujours plus coupable de ce qu’elle est devenue. Pour autant, aurait-il pu faire autre chose, lui, du haut de son Air, à cette époque, incapable d’esquisser le signe de sa présence. Aurait-il pu faire quelque chose, à part celle de tenir compagnie en enfer à Thanis alors qu’elle y croupissait dedans. Et admettant cette hypothèse, quelle utilité aurait-il eu. Si ce n’est mourir sous la démence de son amie l’elfe.

Là bas… le ciel. Lysias aimerait bien penser que c’est une échappatoire de tout ce qui le traîne vers la nostalgie. Parler de Sappho comme s’il ne l’avait plus aperçu depuis un bail ne rend pas la solution plus joyeuse. Et Savada qui s’apprête à lui dire son quelque chose… il ne sait pas vraiment s’il devrait l’entendre. Pourquoi faut-il qu’un diable de Lysias l’oblige toujours à rendre son chemin plus tortueux qu’il aurait pu ne pas l’être. Pourtant prêt à écouter la suite, il la scrute un moment du coin de l’œil, elle et son air désappointé, comme s’il avait demandé une chose qu’il ne fallait pas. Ce qui, est à peut près la réalité.

Svada s’est alors levée, laissant voir sa silhouette affinée d’hybride, droite sur ses pattes, si bien que le nymphe a cru qu’elle s’en retournait sans lui donner la fin de l’histoire. Un grand pouvoir, dit-elle. Et pourquoi faire ? Parce qu’il doit la sauver ? Dame Araignée parle comme si c’était écrit dans les lignes. Et même sans se donner des airs de voyante, elle semble en être une, à mesure que Lysias sent ses lèvres ne former plus qu’un trait fin, comme irrité. Il pose alors les yeux sur la fleur qui si délicate, ploie sous un vent trop violent pour pouvoir y faire face seule, et si ce dernier continue, elle va disparaître…
…Disparaître des champs de batailles, de la vue des résistants. Et disparue de parmi les siens. Morte, disparue, captive. Lysias préfèrerait que ce soit la disparition. Peut être s’est-elle réfugiée quelque part… mais cette image colle si peu bien à la réalité que le nymphe sent une colère sourde le gagner. A force de resté figé sur la fleur d’où s’envolent les pétales, l’aera sent ses yeux le piquer, l’obligeant à ciller pour chasser cette impression de sècheresse, cette sècheresse qui rend le regard humide.

Mais Lysias est en colère, pour moult et moult raisons dont aucune valable pour s’expliquer clairement. Il n’a pas relevé les yeux vers Svada, et a maintenu ses mains en coupe autour de la fleur, faisant barrage à tout courant d’air qui s’acharne contre elle. Au final, elle est l’image de la Faux qui cherche toujours à se dresser toute seule, fière, pour prendre les devants. Et une Faux qui meurt, c’est impardonnable puisqu’elle a passé ses derniers mois à guerroyer pour le maintenir en vie, à lui, pauvre égoïste de nymphe à l’esprit trop étroit. Mais mince alors ! Si c’est pour entendre qu’elle a déjà rompu ses propres engagements, où va le monde ? A quoi bon tenir à des paroles si au final ce n’est même pas pour les mener jusqu’au bout. Quelle déloyauté. Déloyauté envers les autres, mais encore plus, envers soi-même. Bon, en acceptant qu’on ait une haute estime de soi comme Lysias le nymphe.
Il sent un agacement monter en lui, de voir cette fleur trop frêle pour résister seule, trop chétive pour tenir le coup, trop… trop à son image à cet instant. Gémit le vent dans une plainte d’agonie à en éveiller tous les frissons, son qui l’insupporte d’autant plus qu’il se sent mécontent et à qui il ordonne de se taire. Un calme plat s’abat alors sur la forêt, un calme où nul brise et caresse fraîche de l’Air ne se fait perceptible. Lysias ne veut pas que le vent fasse mourir la fleur. Ou la germe qui la fait tenir. Alors c’est simple, l’Air ne passera pas par ici. Ne passerait plus par ici. Enfin, « simple » s’il avait vraiment vu les conséquences de ce qu’il vient d’intimer.

-Où est la Forteresse ? demande-t-il d’un ton posé, trop posé pour un Lysias digne de ce nom.

Voilà, une question déclenche automatiquement d’autres questions, c’est bien connu.
Non, il ne demandera ni le pourquoi du comment parce qu’il n’y pense même pas.

-Etre captif, ce n’est pas mourir, bon sang ! s’exclame-t-il, plus pour lui-même que pour les oreilles susceptibles de l’écouter.

Et Lysias ne veut pas que se meurt une autre amie.
Drôle de termes pour qualifier une Faux ; mais Lysias a décidé de l’appeler comme tel pour faciliter ses méninges. Qu’il en a assez, des morts !

Comme si cette pensée réduite au simplissime le plus simple allait résoudre la chose. Brise froide, qui vient de loin, suit les pas de l’Aera, sans se répandre n’importe où. Murmures et murmures… Passant devant Svada pour repartir d'où il est venu, Lysias s'est enfin retourné, pour avoir un semblant de réponse, tel un gamin impétueux sans aucune notion de respect.

-Alors, où est-elle cette Forteresse !

Parce que dans sa tête, Lysias y va sur le champ.
A-t-on besoin d’un grand pouvoir quand parle la colère à la place. Une colère qui le promet à un chemin encore plus sinueux que tout à l’heure. Une colère qui enfin, justifie le motif d’une raison. Comme si à lui seul, un nymphe allait révolutionner le monde. Pensées éphémères.

Pour avoir été incapable de rester là, sans rien faire.

Sans avoir envie de penser à une Faux, il y pense. Sans avoir envie de replonger dans les temps d'avant-l'assaut, il y pense aussi. Et ce sont des pensées qui agacent les neurones d'un nymphe. Du plein à qui a envie de vide. Pensées brouillées, alors qu'il n'a qu'a peine eu le temps de réaliser que l'île sur laquelle il loge en ce moment est un morceau du paradis. Alors qu'il n'a pas songé à remettre ses pensées éparses en place et dans l'ordre pour prendre le temps de réfléchir. Confusion, totale confusion.

La Faux ne doit pas mourir.
Elle n'en n'a pas le droit. Ne le peut pas, parce que lui, Lysias, il a vécu et vit encore.

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MessageRenaissance EmptyJeu 24 Juin 2010 - 20:15

Une réaction, c'est imprévisible. Surtout quand on ne sait pas voir ce qui peut se cacher sous un calme trop apparent. Son ton la trompe, elle n'y voit rien. Rien de dangereux, rien d'inquiétant. Elle s'apprête alors à répondre de même, croyant sans doute, qu'il voulait juste des informations. Oui, elle n'est pas toujours perspicace Svada. Elle se goure comme tout le monde tiens ! Si on pouvait deviner les pensées des gens rien qu'en les regardant, ça se saurait aussi. Elle commence à ouvrir la bouche, inconsciente araignée, et lui, il s'exclame, violemment. Il rejette une vérité pourtant établie. Quel que soit son camp, un captif ne survit pas. A moins de trahir, à moins de s'enfuir, deux choix rares s'il en est.

Or, un démon ne ... trahit pas ? Cela est-il possible ? On dit qu'auparavant, durant les guerres qui opposèrent les dieux et les démons, ceux-ci n'avaient pas de libre arbitre, et qu'il n'existait pas de traitre ni même de "neutres". Tous se battaient. Pourtant aujourd'hui, certains habitants de l'obscurité ne se battaient pas ou si peu. La monde était bien fait de nuances aujourd'hui. Pourtant, on n'imaginait pas de démons se ranger avec les élémentalistes. Quant à s'enfuir... Si c'est de la Forteresse, alors c'est bien impossible. Svada est bien placée pour le savoir, les pièges mis en place sont trop sophistiqués et s'activeraient à la moindre présence démoniaque.

Alors ce qu'il dit n'a pas de sens logique. Ce qu'il dit est aberrant. Inimaginable. Parce que si, être captif, ça revenait à mourir, du moins, dans l'esprit rationaliste d'une araignée sans imagination. Il passe à côté d'elle et elle croit entendre quelque chose, elle ne sait pas trop, mais un frisson la prend sans qu'elle s'en rende compte. Quoi ? Elle ne sait pas, elle ne fait que le suivre du regard en se retournant de nouveau. Il lui redemande encore la même chose alors. Mais cette fois, il n'est pas calme. Pourquoi ? Elle ne cherche pas trop, la raison l'emportant, elle répond avec raison :


" Je ne peux te le dire. " Elle pencha la tête de côté, encore surprise. " L'emplacement des lieux de Résistance n'est pas connu de tous pour les mêmes raisons. "

Elle croisa les bras, et s'approcha de lui, avant qu'il ne parte. Car après tout, si vraiment il voulait y aller, il y avait toujours un moyen. Oui, il y avait toujours une possibilité pour qu'il s'y rende. Bien sûr. Après tout. vraiment... Elle soupira. Pourquoi tout ces gamins voulaient-ils aller sur le continent ? En général, c'était pour se battre et au final, pour mourir. C'était peut-être la raison pour laquelle elle ne se liait pas avec ceux qu'elle amenait. Mais elle vous répondrait simplement que ça l'ennuyait.

" Mais tu sais... si cette rumeur se révèle exacte, alors la Matriarche se rendra certainement à la Forteresse. Tu pourras alors faire une demande pour les accompagner. "


Oui, c'était en général, ce qui se faisait. Quand une nouvelle relativement importante du continent, d'une planque, arrivait sur l'île, la Matriarche se déplaçait. Certaines personnes la rejoignaient alors spontanément, soit pour simplement s'y rendre, soit pour savoir aussi. Bon, il ne fallait pas rêver, tout le monde ne pouvait accompagner Dame Ruby. Et pour une capture d'un démon de haut rang, on choisirait précisément ceux qui l'accompagneraient. Bien sûr.

Svada pensa soudain à la vision que représente un captif. Qu'il soit d'Elament la Sombre ou d'ici, un prisonnier n'espérait pas de traitement amical, et ça ne devait pas être beau à voir. Il ne fallait pas croire que seuls les démons avaient l'imagination fertile en ce domaine. Elle n'aimerait pour sa part, pas assister à ce genre de scène. Ce n'était pas très .... intéressant à son goût. En tout cas, ce n'était pas le genre de spectacle auquel elle voudrait assister : Svada est en fait, sans doute, trop gentille. Ne faites pas de gros yeux, c'est vrai. Elle n'en a pas l'air comme ça, mais au final, elle est bien comme une araignée : elle n'attaque que sa nourriture potentielle. Que des proies. Les démons, elle ne peut pas vivre avec, ce ne sont pas des proies, mais des colocataires nuisibles. Alors elle ne combat que pour survivre, c'est tout. Si elle n'avait pas été une élémentaliste, jamais il ne lui serait venue de se mettre des démons à dos - qu'elle a assez large, certes.

Alors elle dit un truc sans réfléchir, comme ça lui arrive souvent. Un truc en l'air, rien que pour elle.


" Qu'espères-tu trouver ? ... Bah en fait non, ne répond pas, je ne veux même pas savoir. " Des mèches de cheveux sombres lui tombaient sur les yeux, rayant le paysage, le zébrant de noir. Dans un geste machinal, elle les ramena en arrière... Mais dans son étonnement le plus total, les rayures ne disparurent pas de son champ de vision. Svada porta ses mains à ses yeux, vaguement affolée, mais gardant encore son calme. Que se passait-il ?

Elle essayait de retirer quelque chose de ses yeux... mais rien non, il n'y avait rien. Les griffes noires rayaient le monde verdoyant qui s'offrait à elle. Elles rayaient le visage de Lysias. Elles rayaient le ciel. Obstinée, elle secoua la tête, la tourna et chercha dans tout les coins, pour que les rayures disparaissent. Puis...


Noir

Un noir complet s'abattit. Comme un rideau qui se ferme tout autour d'elle. L'hybride relève la tête et la maintient droite, les yeux pointés au loin, sans savoir ce qui vient au devant d'elle. Rien. Non, elle ne voit... plus rien. Pourquoi ? Que se passait-il ? Elle sembla essayer de parler plusieurs fois, mais ne réussit qu'à ouvrir puis à fermer la bouche sans conviction. Enfin, la vérité implacable et tordue, froide et brûlante s'imposa à elle : aveuglée. Elle avait fini... par perdre la vue. Elle laissa ses mains devant ses yeux. Sans les voir. Pourtant, elle sait que ses mains sont devant ses yeux. Mais rien non, elle n'y voit rien. Noir. Le vent mordant souffle. Elle le sent. Elle sent autour d'elle, grâce aux poils sensoriels de ses pattes, les déplacements d'air. Mais rien d'aussi précis que ses yeux. Du moins, jamais elle ne s'était basée que sur ça. Pour le moment, elle n'a pas l'esprit à y penser.

Le noir lui semble effrayant. Elle croyait ne pas avoir peur du noir. Pourtant, en cet instant, se retrouver dans les ténèbres la terrorise au fond. Se retrouver plongée dans les noirceurs pour l'éternité la tétanise. Et tétanisée, elle n'ose pas bouger ses mains, qu'elle laisse pendre contre son buste. Ce sont ses pattes atrophiées, à la limite de son abdomen qui se tendent au devant d'elle. Les petites pattes effleurent quelque chose, la même chose qu'il lui sembla avoir touché tout à l'heure. Un corps. Vivant. Lysias ? Elle a du mal à organiser ses pensées. Car si, extérieurement, elle est restée aussi stoïque qu'une pierre, au fond, elle tremble de cette absence de lumière. Elle ne baisse pas le regard, embarrassée de ne savoir quoi regarder.


" Lysias ... Je ne vois plus. "

Les morts sortent, glacés, de sa gorge. Elle ramène ses bras à ses yeux, prêtes à les griffer jusqu'à l'os pour voir à nouveau. Pourquoi ? Pourquoi lui enlève-t-on ce qui lui permet de vivre jour après jour ? Perdre ses frères ne suffit-il pas ? Faut-il en plus perdre ses sens ? ... Un bruit survient quelque part. Effrayée, Svada se retourne prestement. Mais dans sa hâte, et sans regarder, elle emmêle ses pattes, confuse. Elle tombe. C'est bien la première fois.... Ses pattes droites se retrouvent sous son abdomen, les autres repliées, lui donnent un air bancale et gauche, ses bras cherchant désespérément le sol. Elle n'y arrive pas, elle s'affole enfin et ses mains cherchent autour d'elle, fébrile. Elle secoue la tête, comme prise de spasme. Rien, elle ne voit rien...

Elle ne pense même pas à user de son élément, dans sa confusion. Elle trouve un appui, est-ce le sol ? Elle ne cherche pas à comprendre, et l'utilise pour se redresser, usant de ses pattes gauches. Elle tremble un peu, ses pattes s'agitent et semblent ne jamais vouloir rester en place. Elle ne sait plus vraiment où elle est, si Lysias est toujours en face d'elle ou pas, de quoi elle a l'air... Elle s'en moque. Elle ne voit plus. Elle n'essaie pas de se calmer et d'user de ses autres sens. Elle n'en a pas idée. Si soudain. Se retrouver aveugle ainsi. Elle essaie encore de ne pas y croire. Elle ne veut pas...


" ... Lysias ? Où... pourquoi ... ? "

Le vent souffle encore. Se moque-t-il d'elle ? Elle sent, à l'aide de ses pattes, où se trouve approximativement l'Aera. Mais elle n'ose pas regarder. Elle garde la tête droite, les bras ballants, ne sachant trop que et quoi en faire.

Noir
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MessageRenaissance EmptyMar 29 Juin 2010 - 7:24

Bouger. Faire quelque chose mais ne pas rester la sans rien faire. Parce que c'est insupportable.
Machoires crispées, Lysias s'impatiente de ce laps de temps, instant de silence que Svada prend avant de lui répondre. Et quelle réponse! Elle ne peut lui en donner. C'est injuste. Le nymphe déglutit, ravalant cette fureur qui gronde en ses trippes.

Lysias se fiche des raisons, aussi différentes soient-elles, qui mènent a préserver en secret un tel lieu. Et finalement voila que l'hybride annonce que Ruby elle-meme prévoit de s'y rendre. A cette phrase, le jeune homme s'est figé, comme tentant d'assimiler ce qu'il vient d'entendre. Et puis qu'espère-t-il trouver au juste? Bonne question. Sujette a confusion.

Qu'espères-tu trouver.

Sappho.
Evidemment.

Une réponse qui coule de source alors que Lysias se trouve incapable de donner cette raison a Svada. Non. Il ne vaudrait peut-etre mieux pas qu'elle le sache, parce que lui non plus n'est pas certain de vouloir tout savoir. De lui. De la Faux. De tout le monde.

Doutes.

Lysias s'est adossé contre le tronc le plus proche, parce qu'il a eu besoin de cet appui. Un support, n'importe quel soutien. Et il a ignoré son entourage jusqu'à l'Araignée, pendant un moment. Jusqu'a ce que sa voix le ramène à la surface. Que dit-elle encore. Dans son apreté du moment, l'aera percoit le monde comme une contrainte. Alors que veut-elle.
Relevant un regard sombre vers l'Hybride, Lysias l'a devisagée longuement, attendant qu'elle prenne l'initiative de briser ce nouveau silence.

...

Et il l'a vu agiter ses mains, gestes universels dans l'obscurité noire d'une pièce close. Lysias. Où. Pourquoi ...? A cette vue, à ces paroles, le nymphe a senti son coeur se serrer alors que se lève le vent. Se mordillant intérieurement la joue le jeune homme a tente de percer le regard de l'hybride, de capter son regard, comme tout a l'heure; mais ce sont des yeux qui ne suivent plus ses mouvements, qui n'accrochent plus la moindre chose aux alentours. Lysias ne sait pourquoi, il se sent tellement embarrassé à cet instant.

Les paroles remplacant les mots, il a doucement saisi les mains de Svada et a soupiré.

-Je suis là. Et rien n'a changé.

Soulevant les mains de cette dernière, il les a portées sur son propre visage. Non, vraiment, rien n'a changé... et il aimerait y croire. Mais ce n'est là qu'un mince voile sur la réalité. Svada n'y voit-elle vraiment plus rien? D'un coup, cette perspective lui semble beaucoup moins facile à ingurgiter.

-Je suis désolé.

Désolé de quoi.
De s'être emporté ou que Svada ait perdu la vue devant lui.
Il ne sait pas.

S'écartant sur le coté, il a gardé une main de l'hybride.

-Je serai tes yeux... tu te souviens ? Le temps que tu t'y habitues... et après aussi, si tu veux.

Et maintenant. Que va-t-il faire? Est-ce que ce ne serait pas à Svada de se poser la question.
Pris au dépourvu, Lysias a commencé à marcher, lentement. Comme pour accorder son rythme à celui de sa voisine.
Bien qu'il ne soit pas allé bien loin.

-Dis le moi, dans quelles impressions est-ce que tu te trouves.


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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyJeu 1 Juil 2010 - 12:13

Rien n'a changé.... Rien ? Vraiment... Elle veut le croire. Elle voudrait bien. Mais elle qui disait ne croire que ce qu'elle voyait. Si elle n'y voit plus, alors elle ne croit plus. C'est la conclusion logique d'une pensée simple et répandue. Pourtant, elle est obligée d'y croire en cet instant. Ses mains ne la trompent pas. Le visage de l'Aera n'a pas changé. Alors... tout est pareil ? Elle en est juste coupée. Coupée du monde, Svada plus qu'avant. Elle sent sa peau parfaite et chaude sous ses doigts malhabiles. Elle sent bouillir en elle ce sentiment d'injustice propre à ce genre de situation : lorsqu'un évènement nous frappe, hasardeux ou divin, on est au final, toujours démunis.

Désolé ? ... L'injustice qu'elle ressent devient une colère sourde, froide, qui lui rappelle un tant soit peu celle qu'elle ressent envers ceux qui lui ont enlevé sa famille. C'est pareil. Démons, coup du sort... L'imprévu, elle déteste ça. Elle veut une vie sans surprise. Elle n'aime pas se retrouver au dépourvu. Même si certains lui opposeraient que ce serait une vie bien fade et triste, elle s'en moque : elle veut vivre seule. Svada ne sait pas quoi dire, alors elle ne dit rien. Simplement. Il garde une de ses mains et lui promet d'être ses yeux le temps qu'elle s'habitue... Comment le pourrait-elle ?

Au fond, naquit en elle l'idée déjà de retrouver la vue. Quoi qu'il lui en coûte, elle ne compte pas rester ainsi. Elle ne le peut pas. Elle a beau essayer de suivre Lysias, se prenant les pattes dans les obstacles qu'autrefois elle évitait sans peine. Elle a beau essayer de se construire une image à nouveau de la forêt qui l'entoure... Elle ne parvient qu'à rester dans le noir de ses yeux. Elle ne dit toujours rien, car son cerveau peut-être, a du mal à intégrer cette nouvelle inconnue : le monde du visible. Les couleurs. Les visages. Nouvelles inconnues qui lui barrent la route. Elle secoue la tête et s'arrête avec lui.


" Toi qui fut un temps esclave, tu sais mieux que quiconque ce que cela signifie de devoir vivre aux dépens des autres. "
Sa voix est plus acide qu'elle ne le voudrait, elle n'y peut rien. L'amertume de se voir frapper de cécité la prend comme un poison. Et l'on n'y peut rien.

Mais elle ne va pas lier ce jeune être libre à elle, araignée asociale s'il en est. Il a autre chose à faire... Il doit faire ce qui lui semble devoir être fait. Ce n'est peut-être pas juste, mais on doit tous faire ce qui nous tient à cœur, pas vrai ? ... Qu'est-ce-qui tient au cœur d'une araignée ? Juste être. Exister, tant qu'elle le pourrait. Svada inspire profondément, à s'en exploser la cage thoracique. Elle sent le monde chavirer sous ses pattes, hors de sa portée, hors de sa vue. Un grand vide qui l'effraie désormais, ce monde. Avec juste comme ouverture ce qu'elle entend, ce qu'elle sent, ce qu'elle touche. Il faudra... oui il faudra bien qu'elle apprenne à se baser sur ce que lui disent ses organes sensitifs de ses pattes. Même si elle les trouve diablement imprécis.Diablement indécis. Mais c'était nécessaire.

Toujours la colère froide habitait son être, mais ça, elle ne pouvait s'en défaire. Elle pouvait juste vivre avec, éviter de se laisser submerger, comme ceux qui se jettent à corps perdu dans des batailles futiles. Elle resterait digne, ou du moins elle essaierait. Finalement, elle imagine que Lysias ne doit pas être à l'aise... enfin, c'est pas comme s'il l'avait été de toute façon... mais moins disons.


" Excuse une araignée, Lysias... Je ne pensais pas vraiment perdre la vue ainsi. Et je ne te retiendrai pas longtemps. "
Un mince sourire apparait sur sa face, tandis qu'au fur et à mesure qu'elle parle, son ton s'adoucit. " Il me semble que tu voulais partir au plus vite, alors j'apprendrai vite. "

Apprendre à oublier la vue.
Mais jamais elle n'abandonnerait, pas tant qu'elle aurait encore une chance de vivre. Personne ne l'attend, personne ne la cherche, personne n'est attaché à elle. Ses frères, unique famille, sont partis depuis des années déjà. Et elle n'a plus d'attache, à part le repère des élémentalistes, quel qu'il soit. Lui, ce jeune dépositaire du don de l'air, il a quelqu'un. Alors il ne devrait pas perdre son temps à attendre une hybride sans attache. C'est ce qu'elle pense.


" Toi... tu as quelqu'un qui t'attends j'imagine. "

Murmure véridique d'une aveugle. Peut-être est-ce on ne sait quel mécanique du corps après sa cécité, quelque substance de son sang s'activant sans attendre le temps. Mais elle se sent ... bizarrement euphorique. Ses pattes lui semblent légères et les efforts sans peine. Son esprit pense librement, sans contraintes et maux. Un effet secondaire temporaire de son aveuglement peut-être. Toujours est-il qu'elle a l'impression de mieux sentir les brindilles qui lui barrent la rou...

Outch, ça doit faire mal ça. L'euphorie passe vite, et sa patte a rencontré un caillou quelque peu ... massif. Les "os" de ses membres insectoïdes sont plus souples mais aussi plus fins, et surtout plus douloureux. Une vague grimace déchire sa face alors qu'elle soulève la patte blessée, tordue étrangement : la première à droite. Se passer d'une patte n'est pas chose compliquée... Mais il vaut mieux que ça ne se reproduise plus.


" Maudite caillasse... "
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MessageRenaissance EmptyVen 2 Juil 2010 - 8:04

Vivre aux dépends des autres.
Lysias a serré la main de Svada, presque trop fort pendant un moment. Pret a lancer une réplique cinglante comme si elle l’avait offensé. Et se ravisant au dernier moment, il s’est tu.

-Svada.

Lysias a prononcé son prénom calmement, d'un ton plus grave et posé qu’il n’a pas d’ordinaire. Aussi terre a terre qu’il est possible de s’apercevoir en la personnalité de l'hybride, Svada mal a l’aise, ca se sent. Le nymphe ferme un instant les yeux, les rouvre, les referme... oui quelle sensation étrange ce doit etre de se retrouver plongé dans le vide sans vraiment s’y attendre.

-Ne panique pas. Tu es toujours en vie et tu restes ce que tu es.

Doit-il partir maintenant, pied à peine posé sur l’ile.
Et cette personne qui l’attend. Cette personne qui l’attend, pourquoi l’attendrait-il, a lui? Non, vraiment, elle ne devrait pas le faire, pour des raisons trop nombreuses. Parce qu’il ne le lui a jamais demande, parce qu’une Faux n’a aucune raison d’attendre sa presence inutile. Une présence aux lacunes trop marquees, trop faible pour pouvoir prétendre à quelque chose. Et d’ailleurs, Lysias, lui, pourquoi devrait-il y aller au juste, si ce n’est pour constater la superiorité des pouvoirs qui se jouent avec ou sans sa présence. Si ce n’est pour tenter une action aussi futile que désesperée...

Pris entre deux pensées confuses, Lysias fixe longuement l’Araignée.

-Je ne sais pas ce que tu racontes. Mais elle ne doit surement pas etre en train de m’attendre. Je te dis, elle a d’autres chats a foueter en ce moment.

Un rire claire s’est échappe de sa gorge.
Vraiment, quelle absurdité. Non, Lysias ne devrait pas se soucier de ce genre de pensée dérangeantes dont la solution ne se pointe pas. Et puis la Faux se débrouille tres bien sans lui, avec une horde de pretendant à ses pieds. En cela, Lysias n’est non pas naif mais arrange la realité a sa sauce, telle qu’il la percoit. Le refus de faire face a des choses qu’il juge trop complexes. Le retour d’un esprit trop étroit pour vouloir accepter tout ce qui se trame autour de lui. Et un Lysias borné, ça ne veut jamais rien entendre d’autre.

Svada a commencé a aller de son chemin et bientot un juron justifie s’en résultera.

-Si tu te bornes a dire que tu ne vois rien, tu ne verras vraiment plus rien! s’exclame Lysias en jetant un coup d’oeil horrifie a la patte qui forme un angle des plus improbables. -Bouge pas je t’en prie.

Lysias a tire suffisament fort sur la manche de son haut pour en obtenir une bande de tissu et en denichant une branche droite quelque part par la, a plus ou moins improvise une attelle laborieuse. Comme si la patte pouvait se retaper.

-Tu sais, que je m’en aille aujourd’hui ou dans quelques jours, ca ne change rien. Et puis mince hein, utilise ton élément à bon escient au lieu de te briser les pattes!

-
RENAISSANCE
(suite)


Un jour, une semaine, puis peut-etre deux sont passées. Peut etre un petit peu plus, peut etre un petit peu moins. Mais on ne compte plus vraiment le temps au compte goutte. Lysias est revenu tanner l’Araignée tous les jours, entre ses moments passés avec Ruby, tantot avecTyrol. Puis d’autres Elementiens encore. D’ailleurs, depuis quelque jours, Lysias a entrepris de percevoir son environnement tel que Svada le percoit desormais. Un monde de sensations, de bruitages, d’odeur et de gout, sensations rassemblees qui forment de nouvelle couleurs. Couleurs telles qu’il n’est possible de se creer et s’imaginer qu’en fermant les yeux.

Et depuis quelques jours Lysias se pavanne comme il peut avec un bandeau sur les yeux, le privant de toute source de lumiere. Il a décidé la veille d’abandonner son baton dont il se servait jusqu’a la pour tater du terrain... et ce n’est pas un jeu en toute simplicité. Si on peut vraiment appeler cette lubie comme étant un jeu: car, si lui peut retrouver la vue a tout moment, ce n’est pas forcément le cas de Svada. Et il est tout aussi probable qu’elle ne vive pas la meme chose que ce qu’il prend pour expérience.

-Et maintenant. Qu’est ce que tu ressens? Questions deja posée la veille, l’avant veille, et l’avant avant veille encore.

Lysias s’est dit qu’il pouvait se passer d’un sens pour améliorer sa perception. Sans arriver a etre jusqu’a nyctalope, s’il améliore ses sens, s’il les renforce... si tout un tas de choses, alors... alors quoi. Le nymphe ne veut rien savoir.

Dans le noir, les nuits se font plus courtes, a moins que ce ne soit des nuits éternelles ou ne perce plus les jours. Des nuits aux heures de sommeil aussi réduite que s’il se retrouvait dans un milieu hostile.
...Et un sommeil qui tend a fuir au fil du temps.

Cette nuit la, en quelques maigres heures de sommeil c’est d’une Faux qu’il a reve. Le chant des grillons résonne encore dans l’herbe dense lorsque Lysias est venu trouver Svada sans crier gard, pour ne pas changer.
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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyLun 19 Juil 2010 - 13:43

Silence de plomb lorsqu'il approche pour lui confectionner ce bandage de fortune. Enfin, elle suppose que s'en est un. Vaguement rêveuse, perdue dans d'étranges pensées noires, son exclamation lui fait l'effet d'une douche froide. Utiliser son élément ... à bon escient ? Que pense-t-il ... ? ... Ses lèvres s'étirent en un rictus amusé. Et quoi, maintenant, il lui donne des leçons ? On aura tout vu. Sans s'en formaliser - de toute façon, ça changeait quoi ? - elle se sentit soudain plus faible que jamais, sans la moindre défense contrôlée. Elle avait surtout appris à se défendre, à ériger des barrières, à déjouer des sorts et à faciliter la fuite. La mêlée, le corps à corps, tout ça, elle n'y excellait pas du tout. Avait-elle alors seulement déjà une fois dans sa courte vie, usé de son élément à bon escient ? Elle serait tentée de répondre non. Non, si par bon escient, on entend pour la bonne cause, elle n'y avait jamais été engagée vraiment. Pas vraiment.

" J'ai assez de pattes pour m'en briser le temps ... d'utiliser mon élément à bon escient. "


[Renaissance Bis]

Il faudrait du temps. Un temps qu'on n'avait pas forcément. Mais s'il le fallait, alors ... Oui, Svada prendrait le temps nécessaire pour retrouver ses marques, pour apprendre à faire confiance à ses autres sens jusque là délaissés. Il le fallait, si elle voulait rester Passeuse. Dame Ruby lui avait laissé ce temps d'apprentissage. On tenait apparemment à elle, même aveugle. On tenait surtout à ce qu'elle savait, pensait-elle sans amertume. Ainsi les nuits passèrent, semblables aux jours. Une semaine ? Deux ? Qu'en sait-elle ? Tout les jours, elle tente de faire ce même chemin, de chez elle jusqu'à cette clairière. Elle essaie de revenir à cette endroit, sans jamais prendre la même voie. Cherchant l'âme de ce lieu. Cherchant l'empreinte dans son esprit de Terra.

Ce n'est pas facile, ça ne l'a jamais été. Elle s'est perdue, plus d'une fois. Elle est tombée aussi, beaucoup. Mais elle essayait d'utiliser son élément. Ressentir ce qui l'entourait plus qu'avant. Ressentir l'arbre et son enchevêtrement de racines et de branches, de feuilles, de fruits, d'insectes, d'oiseaux, de petits mammifères. Tout ça, lorsqu'on est si indifférente, on a du mal à le repérer. Au début. Un long et pénible début. Et elle y était encore, à ce début. Car on ne ré-apprenait pas à vivre en une quinzaine de jours, ça, c'était certain. Mais elle sentait que ça s'améliorait. Comment ? ... De moins en moins d'ecchymoses. On ne rigole pas, s'il vous plait.

Autre fait notable, tout les jours ou presque, Lysias venait la surprendre. Pourquoi ? Elle ne lui avait rien demandé... Elle ne voulait rien de plus, et surtout pas ennuyer quelqu'un avec sa péripétie malheureuse. Mais il avait bien fallu qu'elle accepte sa question éternelle. Toujours la même question. Jamais la même réponse. Et maintenant, elle le percevait. Elle percevait son pas, si léger et à la fois si lourd. Comme si... chaque personne avait donc son propre pas ? Elle n'y avait jamais réfléchi. C'était assez bizarre. Entendant d'où provenait ce son doux à ses oreilles, elle tourna la tête dans une direction approximative, surprise et en même temps lasse. Elle essaie au passage, de saisir dans la terre, dans les racines, l'écho de sa marche sur le sol. Il semble que ce soit plus précis que son ouï. Et ça l'était en vérité. Elle chercha un instant la réponse. Puis elle lui vint, spontanément.


" Le moindre de tes pas. "


Et c'était vraiment une bonne nouvelle. Bientôt, elle pourrait reprendre sa tâche. Car, aussi surprenant que cela puisse paraitre, ses allers et retours entre l'île et le continent... lui manquaient. Rester ici à ne rien faire ne l'enchantait pas. Elle voulait marcher et naviguer, voyager toujours. Elle n'était pas un insecte sédentaire, et personne ne l'obligerait à abandonner ses pérégrination. Personne, ni même la Cécité qui la frappait. Jamais. Et c'était tout de même un peu grâce à lui. Ce nymphe - on en apprenait des choses en quinze jours et des brouettes - qui avait juste été là au mauvais ou au bon moment, par un hasard qui fait parfois bien ou mal les choses. Elle perçut la chaleur sur son visage et son corps d'insecte, douce chaleur d'un soleil sur lequel elle pouvait lever les yeux sans craindre de brûlure. Regarder l'astre du jour sans le voir. C'était une expérience inédite et mystérieuse, inutile donc absolument nécessaire.

Elle debout dans cette clairière éclairée, sans crainte de tomber, sans peur du noir qui l'entourait. Ou si peu. Encore un peu. Une peur, ça ne disparait jamais. Un traumatisme, ça ne s'oublie pas. Mais ça se surmonte.


" Je vais pouvoir reprendre mes fonctions d'ici peu. "
Sourire " Le pire, c'est que les jérémiades des petits nouveaux commençaient à me manquer tu sais ! "
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyLun 2 Aoû 2010 - 14:29

-Haha tu vas plus vite que moi alors ! Une des prochaines fois, j’arriverai à te surprendre sans que tu perçoives mes pas ! s’est exclamé Lysias, réjoui. Parce que se promener les yeux voilés, ce n’était pas une tâche aussi accessible qu’il se l’était imaginé. Et lui, il ne perçoit pas les vibrations du sol, non. Mais ceux de l’air… ? En l’absence de sa vue, c’est son propre élément qui le guide, comme ce dernier a commencé à le faire depuis quelques mois. Depuis même le moment où la chaîne l’a empêché de faire son apparition. L’Air… le temps passe et Lysias en perçoit sa présence. Sa présence, pas comme un intrus à chasser mais comme une chose nouvelle à accepter. Et plus Lysias avance, plus il est certain de ne pas avoir envie de s’interrompre, où qu’il aille.

-Quand tu reprendras tes fonctions, je veux être le premier passager en sens inverse, à déclaré Lysias, s’installant à côté de l’hybride, manquant de trébucher sur un caillou venu rouler sous un de ses pas. Il a grogné un truc incompréhensible, et a enchaîné, -…et donc forcément le premier à te faire supporter les jérémiades tout au long du trajet, évidemment.

Le temps ne compte plus pour qui se côtoient quotidiennement, et si Lysias ne le dit pas, il en a retenu plus d’une chose, en compagnie de Svada.

-Une des prochaines fois, j’arriverai à te surprendre sans que tu perçoives mes pas, rajoute-t-il un air malicieux sur le visage.

Comment il comptait s’y prendre, nul ne le sait, mais il le saurait bien, d’ici là. Parce que même sans le dire, Lysias avait comme l’impression que son détour hors de l’île ne se résumerait pas à quelques jours seulement. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il y reviendrait, sur cette mystérieuse île, parce que c’est là où il doit être, sans autre raison supplémentaire.

[-]

Et ce fameux jour-là, non pas celui où Lysias saurait rendre ses pas parfaitement silencieux, mais celui qui le ferait traverser le fameux Chemin des Passeurs, oui ce jour là arrive, inconditionnellement. Et c’est un nymphe toujours plus hyperactif et infatigable, qui décide de rompre ce quotidien tourmenté d’activités, des plus futiles aux plus utiles. Parce que même quand il n’y a rien à faire, il y a toujours à faire, Lysias se trouve incapable de s’accorder un moment de répit ou de calme, toujours en train de tourner comme un bourriquet sur l’île, de s’y perdre, de partir à la recherche d’une Svada, de suivre Ruby dans son enseignement, de croiser un autre par ci, puis par là. Intenable, insupportable.
Mais comment expliquer cette désagréable impression de ne pas retrouver un objet perdu, un objet familier si proche et pourtant tellement absent en même temps. Lysias ne s’explique pas, pas plus qu’il ne se trouve capable de pouvoir donner une explication à qui lui reproche son manque de sérénité. Ou quelque chose comme un brin de sagesse mêlée à la maturité.

-Cette fois, je dois passer, c’est la bonne, a alors lancé le nymphe sans crier garde, rattrapant une certaine Hybride, au pas de course, ou du moins aussi vite que possible en absence de vue. -Et je dois y aller, parce que je veux le faire.

C’est ce qu’il a dit sur un ton résolu, comme si sa phrase avait grande signification aux oreilles des autres. Mais tant que lui, il se comprend tout seul, il semble prêt à braver n’importe quoi. Inconscience et témérité, c’est qu’il ne peut se résoudre à changer d’avis. Et même sans vraiment savoir ce qu’il va faire, il se laisse une nouvelle fois guider par ce qu’il pourrait qualifier d’instinct, ou cette sorte de sens du devoir, ou quelque chose dans le même genre.

-Alors on y va, montre moi donc tes talents de Passeuse, que je me plaigne un bon coup !

Eclat de rires.
Renaissance.

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Svada Nir
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MessageRenaissance EmptyJeu 5 Aoû 2010 - 15:16

" Essaie pour voir ! "

Approcher sans qu'elle perçoive ses pas ? C'était bien possible, puisque ses sensations ne lui étaient pas encore toutes connues, et il lui faudrait beaucoup d'expériences nouvelles pour devenir plus assurée, plus en sécurité. Et ce ne serait pas sur cette île qu'elle pourrait ainsi apprendre. Il lui faudrait donc reprendre son rôle bientôt. Reprendre des passagers. Et le premier serait Lysias. Le premier dont elle subirait les discussions qui, de jérémiades étaient devenues intéressantes, pour lui paraitre irremplaçables. Ceux que l'on côtoie tout les jours deviennent indispensables. Comme un rituel ancestral, on aimerait que toujours la même routine emplie de sûreté se répète à l'infini. Mais Svada ne veut pas d'un quotidien sur un endroit clôt. Une île, aussi vaste fut-elle, n'est au final qu'un endroit fermé, sur lequel on tourne en rond. Et un insecte a vite fait de tourner en rond dans cette forêt.

" Soit, tu seras donc le premier à tenter de passer cette mer guidé par une araignée aveugle... quelle chance tu as ! "

Un sourire malicieux aux lèvres, elle acquiesce encore quand il affirme pouvir la surprendre. Hé, pourquoi pas ? Elle était loin de l'omniscience, alors il avait toutes ses chances. Lui, il avait encore tout un pouvoir à explorer et à comprendre. Une belle épreuve s'il en était, que d'apprendre la maitrise de ce don. Alors Svada est prête à attendre que ce nymphe lui donne le signal. Quand sera-t-il prêt ? Quand voudra-t-il passer ? Ce jour là, eux deux seront prêts.

[...]

Surprise par ses paroles, elle se retourne vivement. Vite, la surprise laissa place à la joie. Enfin, elle redevenait Svada la Passeuse. Elle pouvait passer et faire passer, elle pouvait vivre à nouveau, renaître. Un sourire naquit sur ses lèvres. Enfin. Elle ne pensait pas que ça lui manquerait à ce point. Que faire mille allers et retours lui manqueraient. Fatiguant, chiant au possible, mais... tellement satisfaisant. Même si parfois, elle savait que certains passagers allaient mourir dans les jours suivants, même si cela impliquait de retourner sur le territoire des démons, c'était gratifiant. Pas par les louanges ou les remerciements, mais pour elle-même. C'était un but comme un autre, pas plus noble ou utile qu'un autre, mais c'était un but. Et c'était déjà pas mal, dans la vie, d'avoir quelque chose à faire.

" Si tu es prêt, je le suis aussi. "

Elle n'y était pas retournée sur le continent depuis un certain temps. Depuis très longtemps. Se souviendrait-il du chemin ? Sa grande fierté était de le connaitre par cœur, mais elle ne connaissait pas les sensations de ce trajet... Elle comptait sur sa mémoire, sur ses sens nouveaux, sur son élément pour la guider. C'était un peu hasardeux, un peu incertain. Mais c'était mieux que rien. Trouver la Forteresse au gré de ses sensations, voilà ce qu'elle allait faire. Se perdre n'était pas une option - même si c'était bien probable. Se fiant aux embruns qui venaient vers eux, Svada suivit le chemin de la côte sableuse pour y embarquer. Mais lui vint alors les nouvelles qui ce matin même, étaient criées par les annonceurs. C'était le grand sujet du jour, le débat qui animerait l'île pendant un certain temps.


" J'imagine que tu as eu la nouvelle non ? " Elle gardait désormais le regard toujours devant elle. A quoi tourner des yeux sans vies vers les autres ? " ... La Général Faux est bien retenue à la Forteresse. La plupart des réfugiés réclament déjà sa mort sur l'île. "

D'après les rumeurs qu'elle avait entendues, on désirait que son exécution ait lieu ici même. Allez savoir pourquoi ? Peut-être voulaient-ils une mise à mort publique. Beaucoup de réfugiés n'attendaient que ça, de voir mourir un démon ainsi. Sans doute, cela calmerait les plus haineux et vengerait bien des morts. C'était donc a priori la décision qui serait prise. Déjà, à la découverte d'un démon dans la Cité il y a de cela de longs mois, la foule avait réclamé sa mort immédiatement. Pas étonnant que Shin ait voulu garder cette information secrète jusqu'à aujourd'hui. Il avait donc obtenu ce qu'il voulait ? Ou peut-être rien du tout, qui sait ? Toujours est-il que son espérance de vie, par cette simple annonce, serait bientôt nulle. Svada ne pouvait plus voir la réaction de Lysias sur son visage et de toute façon, elle n'avait jamais su décrypter ce genre d'informations, alors elle ne s'arrêta pas et continua à avancer. S'il disait être paré, alors ce genre de nouvelle ne devrait pas changer sa décision croyait-elle.

Évidemment, la barque l'attendait à sa place. L'avant encastré dans le sable, une corde épaisse l'empêchant de rejoindre la mer, cette petite embarcation ne servait que pour ses allers et retours fréquents, à transporter quatre personnes tout au plus. Déjà, l'hybride avait prévenu la Matriarche : elle reprendrait du service bientôt, et son premier passager serait son propre élève. Tout était donc réglé. Et sans doute qu'après, Svada ou un autre Passeur devrait amener Ruby jusqu'à la Forteresse, au sujet de l'emprisonnement de Sappho des Démons. Sûrement. Probablement. Ou bien, passant outre l'aide des Passeurs, la Dame traverserait cette mer à la nage, au sein de son élément. Ce qu'elle faisait souvent aussi en fait.

L'araignée sentait l'eau salée qui, en gouttelettes, venait effleurer sa peau d'insecte. La brise marine était à la fois la plus douce et la plus sauvage, amenant sel, sable, et fraicheur. Le sable n'était qu'une partie de son élément. Sentir cette terre molle sous ses pattes, sentir le poids de l'embarcation, le flux et le reflux de la marée. Cela venait presque naturellement à sa grande surprise. Presque, car elle se focalisait presque entièrement là-dessus. Automatismes revenus d'outre tombe, les gestes routiniers, elle n'hésita pas en les accomplissant dans l'obscurité. Détacher la barque, attraper la rame, poser la moitié de ses pattes à l'intérieur en attendant les passagers. Le passager. Le premier. Lysias. Sans le montrer, elle appréhendait un peu ce voyage à l'aveugle. Un peu. La confiance aveugle ne fait pas tout.


" Toujours prêt ? "
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Lysias
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MessageRenaissance EmptyDim 8 Aoû 2010 - 13:51

    -La chance, c’est d’avoir fait quelque chose qu’un l’autre n’a jamais fait.

    Et passer en premier avec une Hybride qui ne voit pas, c’est franchement le pied. Enfin, surtout quand l’hybride en question se nomme Svada, évidemment. Lysias a ricané face au sarcasme de l’araignée s’imaginant déjà à bord en train de se lancer des vieilles piques comme si de rien n’était.

    -

    -A toi l’honneur, Dame Passeuse, le Passager te suit !

    …Et pourtant, il passe son temps rire et à se moquer de tout et de rien, mais une chose le turlupine au point de l’empêcher de sommeiller comme il se doit, et un Lysias qui ne dort pas de tout son saoul c’est un Lysias peut-être plus râleur, mais surtout plus terne. Il ne comptera plus les nombres de fois où ses nuits aux songes noirs se terminent en un sursaut de terreur, sursaut provoqué par le sentiment que quelqu’un lui effleure le haut du dos, là sur la rune qui demeure encore entre ses omoplates. Mais c’est une sensation qui devient trop vite indistincte, perdue dans les méandres d’un récent souvenir, impression d’avoir rêvé éveillé. Ce n’est pas douloureux, mais c’est son instinct qui a prit le dessus sur cet endroit là, et c’est une réaction qui fait tourner le nymphe en bourrique.

    Tiens voilà. Comme la nouvelle que lui annonce Svada. Nouvelle qui lui fait l’effet d’un coup de massue en plein dans les côtes, et qui manque d’ailleurs de le faire trébucher sur le sable doux de la côte. Bien que Lysias se doutait du fondé de la rumeur, comment avait-il pu espérer croire ne serait-ce qu’un soupçon de vérité opposée. Se ressaisissant, il a suivi les traces de l’Hybride par le frôlement de ses pattes sur sable, pour venir rejoindre ses côtés.

    -Ici ? Sur l’Île ? Tu veux dire ici-même et non pas à la Forteresse ?

    La présence de Sappho dans les parages, -autrement dit sur l’île-, ne peut être que mauvais présage aussi bien pour elle que pour lui. En outre, sa présence en ces lieux rendrait donc possible l’hypothèse de la présence d’autres démons. Tout à coup, aucune de ses perspectives n’enchante Lysias, qui se tient coi pendant un long moment. Il ne veut pas que l’Ile devienne le même carnage qu’Elament, ni qu’il y ait une mise à mort en publique de la Faux. Qu’il n’y ait point de mise à mort tout court. La gorge serrée, il s’est prit les pieds contre un bout de bois, a grogné pendant un moment contre la terre entière manquant de laisser exploser sa fureur, puis a failli refaire le même cinéma avec la corde rattachant ce qui leur servirait de moyen de transport pour ce passage. Les larmes lui sont montées aux yeux, -même effet de se taper l’orteil contre quelque chose-, mais Lysias s’est félicité d’avoir gardé ce bandeau aux yeux parce qu’à cet instant, il n’aurait pas aimé que Svada remarque quel air il affiche, à la seule pensée que Sappho puisse débarquer sur l’île, entourée d’élémentiens clamant sa mort. Le nymphe a secoué la tête et a entendu Svada retrouver ses bonnes habitudes, puis lorsque les bruits se sont tus, il a grimpé à tâtons sur la barque. Prêt ? Même s’il ne l’était pas, l’heure n’était plus au demi-tour. Il y a des opportunités et des chances à attraper au bon moment, mais si elles ne sont pas saisies, la seconde d’après s’avère de trop.

    -…Tu doutes ? lui-a-t-il renvoyé, tel un miroir à sa propre question. Parce que si tu doutes, on sera deux… alors je serai pas trop exigent cette fois, hein !

    Il a fini sur un ton à demi moqueur, avant de s’installer plus confortablement.

    –Tu sais d’ailleurs, le comble de l’histoire, c’est qu’on sera aussi deux à avancer à l’aveuglette ! Combien de temps on met pour atteindre l’autre rive ?

    La première fois qu’il a fait l’aller, c’est en voyage express avec Ruby. Faire le trajet en barque l’enchante davantage que ce qu’il se souvient avoir été à l’aller !

    Se lève alors le vent, souffle puissant qui annonce le rythme des vagues et si Lysias avait songé levé le voile de ses yeux, il aurait peut être remarqué qu’au loin, l’horizon s’annonce déjà grisâtre et lourd.

    –Hé Svada.

    Lysias, pipelette.

    –Tu crois qu’on va vraiment ramener un démon sur l’île ?


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